Module 5 : Étiologie des comportements sexuels agressifs Flashcards
(47 cards)
Quelles sont les différentes théories biopsychosociales pour expliquer les comportements sexuels problématiques?
THÉORIE PHYSIOLOGIQUE
- Les comportements sont animés par des besoins physiologiques, incluant l’intérêt sexuel et le désir et requièrent une satisfaction
THÉORIE DE LA RELATION OBJECTALE
- L’attachement social ou le détachement se développe tôt dans la relation parent-enfant. L’impact de l’attachement précoce va influencer les pensées, les émotions, les relations, l’identité personnelle et les comportements tout au long de la vie.
THÉORIE DU TRAUMA
- Le traumatisme d’un abus sexuel et de la victimisation physique créent de graves handicaps émotionnels, cognitifs et possiblement des changements neurologiques qui font en sorte que le trauma est réactivé par l’agression sexuelle.
THÉORIE PSYCHODYNAMIQUE
- Les attitudes, les relations interpersonnelles, les perceptions sont façonnées par des forces inconscientes et primitives qui ont un effet puissant sur l’évolution et le fonctionnement actuel.
THÉORIE DES SYSTÈMES
- Les individus sont en constante interaction avec un plus vaste système de personnes et de structures dont ils font partie; ils sont influencés par les réactions, les interactions et les comportements des autres parties incluant les conditions pathologiques dans ce système.
THÉORIE DE LA PSYCHOPATHIE
- Les individus sont influencés par des demandes narcissiques incessantes pour satisfaire leurs besoins, ils ne reconnaissent pas ou ils ne se soucient pas des besoins des autres. Ils ont peu ou pas de remords. Ils ont peu de relations affectives avec autrui et ils sont guidés uniquement par des besoins personnels, qui ne sont pas en harmonie avec les besoins d’autrui ou de la société.
THÉORIE DÉVELOPPEMENTALE
- Le succès ou l’échec d’obtenir l’appui nécessaire pour accomplir les premières tâches développementales au niveau physique, cognitif et affectif va influencer le développement de l’identité personnelle et l’image de soi, les compétences, les relations et les comportements à travers toutes les étapes du développement.
THÉORIE COGNITIVE
- Les croyances et les attitudes antisociales supportent les comportements sexuels agressifs et la victimisation des autres.
THÉORIE COMPORTEMENTALE
- Les comportements sont conditionnés par un stimuli, incluant les comportements sexuels non agressifs et la satisfaction des intérêts et des désirs sexuels.
THÉORIE DE L’APPRENTISSAGE SOCIAL
- Les individus découvrent les rôles à partir des modèles et des comportements observés dans leur environnement, leurs idées, leurs pensées et leurs comportements imitent ceux appris dans leur environnement.
En essayant de comprendre ce qui amène à des comportements déviants qui sont nuisibles dans la vie et qui sont socialement répugnants, nous devons comprendre plusieurs notions connexes qui se combinent pour transformer l’intention d’agir dans l’action. Quelles sont ces notions?
But utilitaire
il décrit l’objectif immédiat ou à la surface du comportement, ou de sa fonction immédiate — la chose ou les résultats qu’il vise à atteindre. Dans le cas de délinquance sexuelle, par exemple, le but peut être de se sentir socialement compétents et capables, ou d’expérimenter ce que c’est que d’avoir des rapports sexuels.
L’intention (d’agir)
Elle décrit l’acte nécessaire pour répondre aux fins utilitaires et atteindre cet objectif. Ainsi, dans la délinquance sexuelle l’action envisagée est de se livrer à une certaine forme d’acte sexuel, avec ou sans consentement.
L’intention sous-jacente
elle décrit ce qui se cache derrière, l’objectif à accomplir, même si cela n’est pas connu de l’acteur. Dans la délinquance sexuelle, alors que le point de départ est de vivre une expérience sexuelle, l’intention sous-jacente peut être de faire l’expérience du pouvoir sur une autre, d’éprouver un sentiment de maîtrise sociale ou autre forme de réalisation, ou encore de vivre un acte sexuel sadique (sadisme sexuel).
La motivation suffisante
Cela fait référence à la quantité requise de la pression interne de l’individu pour se livrer à l’acte et pour surmonter d’autres forces ou des pressions qui pourraient autrement empêcher ou d’interdire le comportement (pressions externes).
Les inhibiteurs
Ce sont différentes forces internes et externes qui agissent pour prévenir ou réduire la motivation suffisante et contribuent ainsi à empêcher l’action de se produire.
Les opportunités
Elles doivent exister, et les conditions environnementales doivent permettre l’accès à la conduite, dans le cas de délinquance sexuelle, cela signifie un accès à la victime et la capacité d’agresser sexuellement la victime.
David Finkelhor (1984) repris par Rich (2003) a décrit quatre conditions préalables à l’apparition d’agression sexuelle :
- le délinquant doit être motivé pour commettre l’agression,
- de surmonter les inhibitions internes,
- de surmonter les inhibitions externes,
- de surmonter la résistance des victimes.
Quelles peuvent être les motivations derrière l’agression sexuelle chez l’enfant et l’adolescent?
Si nous supposons que tout comportement est délibéré, alors quel est le but vers lequel le comportement est dirigé?
Dans le cas de la délinquance juvénile sexuelle, quelle idée ou quel but le mineur tente-t-il de répondre quand il se livre à un tel comportement pour la première fois, et les fois subséquentes? En d’autres termes, qu’est-ce qui alimente le comportement dans l’immédiat?
Considérant que depuis plusieurs années déjà le pouvoir et la domination ont été considérés comme les principaux motifs derrière la délinquance sexuelle, nous reconnaissons aujourd’hui que ce phénomène en est un des plus complexes et comprend de multiples facettes. En bref, quatre avenues évidentes qui pourraient expliquer les raisons qui amènent le comportement sexuel agressif à se manifester chez l’adolescent agresseur sexuel :
- L’expérience de l’activité sexuelle elle-même est l’objectif prioritaire, avec l’utilisation de la force ou de la coercition comme un moyen pour y parvenir;
- La coercition ou la violence comme moyen en lui-même et dans lequel le comportement sexuel est secondaire à un trouble de comportement plus vaste (la route de la puissance et du contrôle);
- L’expérimentation et l’exploration, avec une reconnaissance naïve ou inexistante des conséquences plus grandes;
- Une maladie mentale ou déficience cognitive dans laquelle l’individu n’est pas compétent pour prendre des décisions ou pour porter des jugements sur les actions bonnes ou mauvaises.
Ces pistes peuvent être élargies pour obtenir un portrait plus large afin de comprendre pourquoi certains jeunes deviennent délinquants sexuels.
1. La recherche du pouvoir
Dans cette perspective, le pouvoir est le principal facteur de motivation pour le comportement des délinquants sexuels. La gratification sexuelle est considérée comme un gain secondaire qui renforce le comportement primaire.
2. La reprise du contrôle sur sa vie
Le comportement et l’attitude du délinquant sexuel qui le mènent à croire qu’il peut s’exprimer ainsi : « Je prends ce que je veux » et « J’ai le droit », peut indiquer qu’il en vient à voir le monde sous l’angle de : victimes et d’agresseurs. Un bon nombre de délinquants sexuels ont eux-mêmes été victimes de violence à un moment donné dans le passé, le comportement d’agression sexuelle peut se révéler un moyen pour établir un contrôle et veiller à ce qu’il ne soit plus confiné à nouveau dans le rôle de la victime.
3. Les erreurs de pensée (distorsion)
L’infraction d’ordre sexuel est considérée comme un exemple de comportement criminel, et tous les comportements criminels sont considérés comme le résultat d’un trouble de la pensée.
4. Vengeance
5. Frustration et réalité émotionnelle
S’engager dans la violence sexuelle soulage les rejets et les émotions.
6. Apprentissage social
Le délinquant a été exposé à des expériences ou des apprentissages flous ou irrationnels concernant les relations sexuelles et il a intégré ces expériences et ses croyances dans ses pensées, ses comportements et ses interactions.
7. Limitation cognitive ou maladie mentale
Le délinquant est aux prises d’une maladie mentale ou d’un déficit cognitif qui influencent de manière considérable ses perceptions, ses croyances, ses interactions et ses comportements.
8. Compulsivité sexuelle
Ici, l’auteur d’agression se sent obligé d’agir ses envies sexuelles et il peut ne pas se sentir en mesure de les contrôler physiquement ou mentalement.
9. Expérimentation
Dans certains cas, chez les jeunes délinquants ou en retard de développement, les comportements sexuels délinquants sont le résultat de la curiosité, de la naïveté, et l’expérimentation classique. Dans ces circonstances, le comportement délictuel peut être situationnel et ne pas être le résultat de ce qui pourrait sembler être une déviance sexuelle.
10. Répétition d’un cycle délictuel
Le comportement sexuel est le résultat d’un cycle répétitif et dysfonctionnel dont l’histoire personnelle, le déclenchement des événements, les pensées et les sentiments, les erreurs de pensées (distorsions cognitives) et les comportements sexuels servent de conditions préalables pour justifier que les mêmes pensées, les mêmes émotions et les mêmes comportements puissent se produire à nouveau, dans un cycle de violence sexuelle. Il s’agit d’un modèle typique utilisé pour traiter les adultes et les mineurs délinquants sexuels, et il est parfois appelé le cycle d’agression sexuelle.
11. Mécanisme d’adaptation
Le sexe utilisé au service des besoins non sexuels, comme un antidote à un état de trouble émotionnel dans lequel l’auteur se sent impuissant, sans défense, frustré, en colère, ou encore comme une victime de la société.
Dans ce contexte, la délinquance sexuelle peut être le seul moyen par lequel le délinquant peut lutter contre des sentiments de dépression, de colère, et ainsi être considérée comme un antidote à ces états négatifs.
En plus des raisons, il y a aussi les besoins psychoaffectifs auxquels les AAS tentent de répondre en posant des gestes sexuels agressifs.
Quels sont les besoins auxquels les jeunes tentent de répondre lorsqu’ils commettent leurs agressions sexuelles?
- Démonstration d’affection : pour démontrer de l’affection
- Quête d’affection : pour recevoir de l’affection
- Colère : pour dissiper sa colère généralisée ou sa colère envers la victime
- Antidote : pour se débarrasser des sentiments contradictoires de la vie, pour rehausser l’estime de soi ou pour faire face aux sentiments d’impuissance et de frustrations.
- Déficit cognitif/intellectuel : en raison d’un retard mental, d’un fonctionnement intellectuel limite ou d’autres déficits cognitifs
- Compulsivité/dépendance : en raison de pressions internes qui ressemblent à des modes de dépendance et à travers lesquelles le jeune se sent rassuré intérieurement.
- Compulsivité/sans dépendance : en raison de pressions internes pour soulager les préoccupations sexuelles, un trouble mental tel que : le trouble obsessionnel compulsif, ou pour d’autres raisons qui l’amènent à des pensées et de comportements obsessionnels.
- Décharge émotionnelle : pour dissiper et exprimer des émotions qui sont refoulées.
- Satisfaction émotionnelle : l’acte est égocentrique et répond à des besoins émotionnels
- Curiosité : principalement pour en apprendre davantage sur le sexe, la sexualité et les questions liées à ses croyances, plutôt que de s’engager dans des agressions sexuelles dans son propre intérêt ou dans le cadre d’un trouble de conduite. (Curieux)
- Exploration : principalement, pour en apprendre davantage sur le sexe, la sexualité et les questions liées à ses croyances, de façon consciente explorer et profiter de l’autre pour arriver à cette fin. (exploitant)
- Naïveté/Ignorance : principalement pour en apprendre davantage sur le sexe, la sexualité et les questions liées à ses croyances, mais parfois l’adolescent peut ne pas être au courant de la nature antisociale et exploitante de ses comportements. (naïf)
- Réalisation d’un fantasme déviant
- Réalisation d’un fantasme non déviant
- Normalité : pour se sentir comme les autres et ainsi se sentir mieux dans sa peau.
- Hypersexualité : pour soulager de fortes pulsions sexuelles, qui ne sont pas facilement satisfaites par d’autres moyens.
- Incompétence : incapacité de distinguer l’adéquat de l’inadéquat, le bien du mal et ainsi prendre des décisions qui démontrent son incompréhension du monde.
- Intimité : pour établir une relation intime et de proximité avec une autre personne
- Solitude : le besoin de se connecter et de s’engager avec une autre personne
- Santé mentale : même si l’adolescent possède ou non des compétences, l’agression sexuelle peut être le symptôme d’un problème de santé mentale.
- Consentement réel : le consentement de l’autre partie est accordé même si pour diverses raisons celle-ci n’est pas en mesure de donner un consentement éclairé, entre autres en raison d’une grande différence d’âge
- Consentement présumé : la conviction que la relation est consensuelle malgré le contexte inapproprié ou peu probable
- Opportunité/impulsivité : acte impulsif dans un contexte sain
- Opportunité/préméditation : une occasion qui a été anticipée, planifiée et même mise en place par l’agresseur
- Opportunité situationnelle : aucune planification, mais la réponse à une opportunité qui se présente à lui.
- Paraphilie : le plaisir sexuel ne peut être atteint que dans certaines circonstances, avec une certaine catégorie de personnes ou d’objets ou certains actes sexuels ou une combinaison de facteurs déviants.
- Pression extérieure : pression directe ou influence indirecte ou l’impact des pairs ou d’un groupe
- Pouvoir/contrôle/domination : pour exercer un contrôle direct ou indirect envers une autre personne, sur la victime elle-même ou sur une autre personne sur qui il exerce un contrôle par le biais de la victime.
- Psychose : épisode psychotique dans lequel le jeune est motivé par des raisons qui ne sont pas rationnelles et sur lequel il ne semble pas avoir de contrôle
- Reconstitution de la pornographie : agir un scénario ou une image puisés dans la pornographie
- Établissement d’une relation : pour créer une relation avec quelqu’un, mais dans un contexte inapproprié
- Vengeance : pour obtenir une vengeance de façon directe ou indirecte en conséquence d’une injustice perçue, cette vengeance peut être dirigée vers la victime ou une autre personne proche de la victime
- Modélisation : pour imiter une personne significative dans l’entourage du jeune, qui a déjà commis des agressions sexuelles, afin de connaître l’impact et les effets ressentis
- Cruauté/sadisme : pour obtenir un plaisir sexuel en faisant preuve de cruauté intentionnelle et infliger des dommages à la victime
- Excitation sexuelle déviante : l’excitation sexuelle paraphilique spécifique qui concerne la victime ou encore la violence sexuelle
- Excitation sexuelle non déviante : excitation sexuelle physique qui n’est pas de nature sexuelle ou de la déviance. L’agression devient un moyen d’obtenir une satisfaction de cette pulsion sexuelle où il peut.
- Gratification sexuelle : pour satisfaire une pulsion sexuelle
- Exploration de l’identité sexuelle : l’agression devient un lieu pour explorer son identité sexuelle ou son orientation sexuelle parce qu’il n’est pas en mesure de le faire dans un autre contexte par manque d’habiletés sociales
- Impulsivité sexuelle : pulsions sexuelles sur lesquelles l’adolescent a peu de capacité ou de volonté à exercer un contrôle
- Obsession sexuelle : des pensées récurrentes et répétées que l’adolescent se doit d’agir pour obtenir un soulagement
- Préoccupation sexuelle : pensées, idées, fantasmes sexuels fréquents que l’adolescent se sent obliger d’agir.
- Contrôle au niveau social : une zone dans laquelle le jeune peut sentir qu’il peut avoir du contrôle, il estime être capable d’avoir un contrôle sur son environnement comme le font les autres jeunes de son âge et même les plus vieux, même s’il faut utiliser la force ou la coercition.
- Attentes sociales : l’adolescent a la conviction qu’il doit avoir des comportements sexuels et qu’ils ne peuvent être accomplis autrement.
- Messages sociaux : l’influence des messages sociaux que le jeune a mal perçus ou mal compris rendant l’expérience attrayante et normative.
- Utilisation de substances : L’influence active de l’alcool ou des drogues qui agissent comme un stimulant ou un désinhibiteur peuvent aussi avoir pour effet de se sentir mieux dans sa peau
- Réaction traumatique/récapitulation : l’agression sur autrui sert à réparer l’impact de sa propre victimisation physique ou sexuel en répétant les mêmes comportements.

Qu’est-ce qu’un facteur de risque?
Un facteur de risque se définit comme un événement, une situation, un état, un contexte ou une condition qui, par sa présence et en juxtaposition avec d’autres facteurs, peuvent augmenter les probabilités qu’une personne agresse sexuellement une autre personne.
Un facteur de risque ne cause donc pas une agression à caractère sexuel, mais il peut en précipiter l’occurrence ou les circonstances.
L’état actuel de la recherche ne permet pas d’identifier ou de prédire avec certitude, les individus susceptibles de commettre une agression sexuelle. C’est plutôt l’interaction de certains facteurs qui pourraient engendrer l’agression sexuelle. De plus, chacun de ces facteurs comporte des variables qui, elles aussi, interagissent entre elles.
Ce qui complique notre compréhension des facteurs de risque c’est qu’ils ne sont pas nécessairement particuliers aux délinquants sexuels
Quelles sont les 4 sous-catégories de facteurs de risque?
Facteur fragilisant ou prédisposant
Événements traumatisants ou marquants au cours du développement de la personne, et qui continuent d’influencer sa vie actuelle. Ces facteurs peuvent être personnels, familiaux, environnementaux, sociaux, sexuels, etc.
Facteur précipitant
Surviennent peu de temps avant l’agression et tendent à déterminer le type de délit qui sera perpétré.
Facteur de maintien
Facteurs qui maintiennent l’individu dans une dynamique agressive en augmentant les probabilités que le comportement déviant continuera à l’avenir. C’est un facteur qui est encore présent au moment de l’évaluation.
Facteur de vulnérabilité
Représente une variable ou une condition qui augmente la probabilité que l’individu en vienne à faire face à un résultat négatif lorsqu’il est confronté à un risque donné.

Qu’est-ce qu’un facteur de protection?
Ils peuvent contrebalancer l’impact des facteurs de risque en diminuant la probabilité que ces derniers évoluent vers l’aboutissement d’une mésadaptation ou d’une psychopathologie en raison d’un développement concomitant de compétences.
Il faut se rappeler que les facteurs associés à l’émergence d’une problématique peuvent être différents de ceux associés à la cessation du trouble ou à sa récurrence.
Quelles sont les différentes classes de facteurs de risque?
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Facteurs de risque environnementaux
- facteurs qui ne sont pas liés au jeune, mais qui peuvent affecter et influencer ses pensées et ses comportements.
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Facteurs de risque caractérologiques
- facteurs qui sont déjà ou en cours de devenir intégrés à la personnalité du jeune.
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Facteurs de risque comportementaux
- facteurs qui sont englobés dans le comportement du jeune ou aggravés par le comportement du jeune.
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Facteurs de risque cognitifs
- comprenant les idées, les attitudes, les croyances et autres schèmes de pensée qui influencent et façonnent les comportements du jeune.
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Facteurs de risque développementaux
- contribuent et influencent la personnalité, les comportements et les réponses aux stimuli.
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Facteurs de risque sexuels
- les préférences et les expériences sexuelles qui contribuent au passage à l’acte.
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Facteurs de risque psychiatriques (comorbidité)
- ces facteurs peuvent entraver la capacité du jeune à participer ou à bénéficier d’un traitement spécifique concernant sa problématique sexuelle.
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Facteurs de risque intellectuels
- réfèrent à des déficits cognitifs ou des capacités qui peuvent contribuer à expliquer les comportements du jeune ou entraver le traitement.
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Facteurs de risque familiaux
- les conditions à l’intérieur de la structure familiale qui ont permis de définir et de façonner le comportement du jeune et qui continuent de servir les facteurs de risque.
Quels sont des facteurs pouvant favoriser l’apparition de comportements sexuels agressifs chez l’enfant et l’adolescent?
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Facteurs externes
- Croyances incongrues en rapport à la sexualité
- Renforcement de l’acte agressif à travers la masturbation et les fantaisies
- Peu d’habiletés sociales
- Manque de connaissances sexuelles
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Variables individuelles
- Difficulté à gérer ses pulsions
- Problèmes de comportement
- Habiletés cognitives limitées
- Histoire d’agression physique ou sexuelle
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Variable familiale
- Parents qui encouragent les enfants à avoir des comportements sexuels coercitifs entre eux
- Parents qui ont des comportements sexuels coercitifs
- Parents qui manquent d’empathie
- Négligence émotive ou physique à l’intérieur de la famille
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Variable sociale
- Société qui supporte les comportements sexuels coercitifs et la sexualisation des enfants
- Groupe de pairs engagés dans des comportements antisociaux
À titre informatif, une étude comparative entre les adolescents agresseurs sexuels et les autres adolescents révèle que :
- Les AAS vivent davantage de crises familiales (divorce, période de chômage, etc.) et leur attachement à leur milieu est faible;
- Les AAS sont également plus nombreux à vivre des difficultés scolaires;
- L’agression sexuelle est fortement reliée à la fréquentation de pairs qui approuvent la coercition sexuelle;
- Les AAS sont davantage impliqués dans des activités délinquantes (agression physique, usage de drogues, etc.).
Quels sont des exemples de facteurs de risque dans le développement de comportements antisociaux ou dysfonctionels?
- Statut socio-économique bas
- Manque d’intérêt de la part des parents
- Pauvreté ou absence de supervision parentale
- Relation parent-enfant lacunaire
- Parents antisociaux
- Abus de substance chez les parents
- Discipline sévère, laxiste ou inconsistante
- Parents agressifs ou négligents
- Conflits familiaux
- Séparation
- Soins primaires perturbés
- Déficit d’attention et hyperactivité
- Attitudes et comportements antisociaux
- Agressivité et violence
- Difficultés scolaires
- Expériences et attitudes négatives par rapport à l’école
- Liens sociaux faibles
- Pairs antisociaux
- Usage de substances
Quels sont des exemples de facteurs de protection dans le développement de comportements antisociaux ou dysfonctionels?
- Intérêt actif des parents
- Contrôle parental
- Relation familiale étroite
- Valeurs parentales prosociales
- Parents équilibrés
- Sanctions appropriées en cas de mauvais comportements
- Parents respectueux
- Relation familiale supportante
- Relation familiale intacte
- Stabilité dans les soins
- Relation positive avec les adultes
- Relation positive avec les pairs
- Relation positive avec les frères et soeurs
- Modélisation des comportements prosociaux
- Modélisation des valeurs et attitudes prosociales
- Engagement dans des activités conventionnelles
- Succès relatif dans les études
- Orientation sociale positive
- Groupe de pairs prosociaux

Quel est le cycle de dysfonctionnement comportemental?

Que peuvent être des signes précurseurs d’une agression sexuelle?
La plupart des agresseurs sexuels affirment avoir agi de façon imprévisible ou impulsive. Mais lorsque nous procédons à l’évaluation d’un AAS, on constate que dans la grande majorité des cas, l’agression sexuelle ne s’est pas produite de façon spontanée.
Dans cette perspective, il est possible d’identifier la présence d’indices facilement repérables que l’on nomme également signes précurseurs. Il s’avère impératif d’identifier ces signaux d’alarme puisque cela peut aider les parents, enseignants ou toute autre personne présente dans la vie du jeune à dépister la possibilité d’un comportement agressif à survenir ou en cours.
- Jeune fréquentant des enfants d’âge et de niveau de développement différent du sien
- Jeune qui est méfiant envers les pairs de son âge et qui idéalise le monde des enfants
- Jeune évitant les interactions positives avec les pairs de sexe opposé
- Jeune ayant des activités sociales limitées à l’extérieur de la maison
- Jeune présentant des comportements antisociaux pour capter l’attention des autres
- Jeune supprimant la plupart de ses émotions et plus particulièrement la colère
- Jeune démontrant une préoccupation excessive relativement à la sexualité
- Jeune qui privilégie la manipulation lorsqu’il entre en relation avec les autres
- Jeune qui agit très souvent avec impulsivité
- Jeune qui est peu responsable et autonome
- Jeune qui ne respecte pas les règles d’intimité
- Jeune qui présente d’autres troubles de comportement.
Les agresseurs sexuels juvéniles ont-ils ce problème “isolé” ou ont-ils des comorbidités?
Les chercheurs s’intéressant aux caractéristiques des agresseurs sexuels juvéniles se demandent pourquoi certains adolescents commettent des délits sexuels alors que d’autres ne le font pas. Comme nous venons de le voir, une cause unique ne peut évidemment pas être pointée du doigt. C’est plutôt un ensemble d’éléments qui contribuent à la commission d’un délit sexuel.
La comorbidité est un phénomène fréquent. Plusieurs adolescents présentent divers types de pathologies comme le déficit d’attention, l’hyperactivité, les troubles de la conduite, les difficultés d’apprentissage, le trouble d’opposition, le syndrome Gilles de la Tourette, etc., ce qui accentue et favorise leur mésadaptation sociale.
Dans le but de mieux comprendre ce qui incite un adolescent à commettre un délit sexuel, plusieurs chercheurs ont tenté de déterminer certaines caractéristiques propres aux agresseurs sexuels juvéniles en comparant entre autres celles-ci à des groupes de délinquants ayant commis des délits qui ne sont pas de nature sexuelle. Bien que les adolescents agresseurs ne forment pas un groupe homogène, un certain nombre de problèmes sont fréquemment identifiés chez cette clientèle en plus de la problématique sexuelle.
La délinquance non sexuelle est un des problèmes fréquemment associées aux agresseurs sexuels juvéniles. Quelles sont les principales caractéristiques de la délinquance non sexuelle des AAS?
Tout d’abord, mentionnons que pour évaluer l’histoire criminelle des adolescents agresseurs sexuels, plusieurs études se limitent aux données officielles sur la criminalité.
Donc, si l’on considère qu’une proportion importante des délits commis n’est pas dénoncée, les statistiques sur la criminalité des adolescents agresseurs ne reflètent pas l’ampleur réelle de la situation. C’est ainsi qu’entre 40 et 60 % des adolescents agresseurs sexuels ont une histoire de délinquance non sexuelle antérieure au délit sexuel pour lequel ils ont été référés. Cependant, il semblerait que ces derniers commettraient moins de délits que les délinquants non sexuels.
La majorité des délits sont des crimes peu violents tels que la violation de la propriété, les vols mineurs, etc. Toutefois, une minorité d’adolescents agresseurs commettent des crimes plus violents par exemple les vols à main armée, les agressions, etc.
Le type de délit sexuel peut également être mis en relation avec la délinquance non sexuelle. Ainsi, les adolescents ayant commis des délits sexuels violents (ex. : tentative de viol, viol, sodomie) représentent le groupe de délinquants sexuels ayant le plus haut taux de délits non sexuels. Ils sont impliqués dans une variété de comportements antisociaux violents depuis leur enfance et c’est ainsi qu’ils s’apparentent davantage aux adolescents antisociaux qu’aux autres sous-groupes d’adolescents agresseurs sexuels. Ces jeunes auraient, pour la plupart, déjà proféré des menaces de violence envers leur famille, leurs amis et leurs professeurs.
Quant aux adolescents ayant commis des agressions sexuelles sans contact (ex. : exhibitionnisme, voyeurisme), la majorité d’entre eux ne seraient pas engagés dans d’autres comportements antisociaux.
Retenons que le problème majeur lorsque l’on tente d’établir le lien entre la délinquance sexuelle et la délinquance non sexuelle réside dans le manque d’études permettant de différencier les agresseurs sexuels juvéniles ayant commis d’autres types de délits de ceux qui ont commis uniquement des délits de nature sexuelle. Par rapport aux délinquants sexuels juvéniles qui commettent d’autres types de délits, il importe de se demander s’il s’agit d’une paraphilie, c’est-à-dire s’ils ont des fantaisies déviantes et s’ils préfèrent l’activité sexuelle déviante à toute autre activité sexuelle ou encore, si l’agression sexuelle est un comportement délinquant parmi tant d’autres.
Plusieurs adolescents ont une histoire de délinquance plus ou moins violente. Les AAS posent moins de gestes délinquants non sexuels.
Les difficultés d’apprentissage sont aussi souvent associées à la délinquance sexuelle juvénile. Quelles en sont les caractéristiques chez ce groupe de personne?
Selon les différentes études portant sur la question, il semblerait qu’entre 10 et 50 % des adolescents agresseurs sexuels présenteraient des difficultés d’apprentissage. En effet, Fehrenbach et coll. (1986) ont constaté que seulement 55 % des adolescents de leur étude étaient classés à un niveau scolaire approprié à leur âge.
À cela, nous pouvons également ajouter les problèmes de comportement à l’école qui sont fréquemment rapportés chez les adolescents agresseurs sexuels. Selon une recherche portant sur la question, 53 % des sujets ont été soit suspendus, soit expulsés pour troubles de comportement.
Les difficultés d’apprentissage sont fréquentes chez les AAS, variant dans des proportions de 10 % à 50 %. La fréquence d’un quotient intellectuel bas (inférieur à 80) est plus grande chez les AAS de pairs ou d’adultes que chez l’ensemble des AAS. Les troubles de comportement à l’école (suspension, expulsion) sont fréquents chez les AAS.
Les problèmes de consommation sont aussi fréquent chez les AAS. Quelles en sont les caractéristiques?
L’alcool et les différentes drogues ont de puissants effets psychologiques et physiologiques qui augmentent les comportements sexuels agressifs. Dans cette perspective, l’utilisation d’une substance peut être considérée comme un facteur pouvant contribuer à la commission de délits sexuels par les adolescents. Toutefois, lorsque l’on consulte les recherches portant sur la question, nous pouvons constater qu’il y a de grandes divergences quant aux taux de prévalence des problèmes de consommation chez les adolescents agresseurs sexuels.
Ainsi, l’abus d’alcool et/ou de drogue est probablement un facteur important dans la commission de délits sexuels de certains adolescents. D’après les études effectuées sur le sujet, nous retrouvons des taux allant de 8 à 34 % d’adolescents agresseurs sexuels ayant un diagnostic d’abus d’alcool ou de drogue.
Par contre, mentionnons que la nature de la relation (consommation et délit sexuel) n’est pas claire mis à part son rôle désinhibiteur. Donc, au moment de l’évaluation, il faut se demander s’il s’agit véritablement d’un problème de consommation. Mais ce qui est encore plus important, c’est de déterminer si la consommation est un facteur de risque dans la perpétration de l’agression. En d’autres mots, il faut se demander si l’alcool et la drogue sont utilisés avant l’agression seulement, ou encore si la consommation fait partie d’un problème chronique.
Si l’individu consomme avant de perpétrer son délit, la consommation fait partie du cycle délictuel et c’est ainsi qu’elle doit être ciblée dans le traitement. D’un autre côté, s’il y a des évidences d’un abus chronique, il importe de mettre l’accent sur le traitement du problème de consommation avant d’admettre le jeune à un programme de traitement pour agresseurs sexuels.
Un diagnostic d’abus de substances peut être posé chez certains AAS.
Les compétences sociales sont aussi souvent moins développées chez les AAS. Quelles sont les caractéristiques de cette problématique?
L’une des variables étiologiques les plus souvent citées concernant la délinquance sexuelle est sans aucun doute l’isolement social. Ainsi, selon plusieurs auteurs, les carences dans les habiletés sociales jouent un rôle de première importance dans le développement des comportements d’agression sexuelle. En effet, les adolescents agresseurs sexuels présentent des déficits importants sur le plan des habiletés sociales (plus de 80 %) et ce phénomène est en rapport leurs comportements déviants.
L’incapacité à initier de même qu’à maintenir des relations intimes, l’absence de comportements appropriés, l’inaptitude à gérer ses conduites hostiles sont autant de carences possibles résultant bien souvent d’une socialisation inadéquate.
À l’adolescence, les échanges avec les pairs deviennent de plus en plus nombreux et importants. Cependant, pour un grand nombre d’adolescents agresseurs sexuels, ces échanges sont rares et/ou conflictuels. C’est ainsi que les délinquants sexuels juvéniles ont peu d’habiletés à initier de même qu’à maintenir des relations d’amitié. Le manque de contacts sociaux prive l’adolescent d’occasions lui permettant d’expérimenter les conduites sociales appropriées. Par conséquent, cette situation amène certains individus à créer des liens avec des enfants plus jeunes qu’eux et à sexualiser ces relations. D’autres, au contraire, s’associent à des groupes de jeunes délinquants qui renforcent les conduites agressives et les relations de pouvoir.
Ces déficits ont généralement pris racine dans le passé et sont fonction des liens inadaptés, inadéquats établis avec les parents. Il s’agit souvent d’adolescents qui ont vécu un abandon parental précoce ou qui ont grandi dans une famille, dont les relations se caractérisent par d’importants conflits, de la désorganisation et par une communication difficile. Un grand nombre de ces adolescents ont subi une rupture importante des liens d’attachement. Ils sont aux prises avec des problèmes à établir, mais surtout à maintenir des relations plus intimes avec les autres. Les expériences relationnelles vécues avec les pairs durant la période de latence ont été, pour plusieurs d’entre eux, particulièrement difficiles puisqu’ils étaient rejetés, mis à l’écart, ridiculisés, etc. Un certain nombre parmi ces garçons changent de position sur le plan relationnel à l’adolescence en devenant eux-mêmes des agresseurs.
Précisons que l’isolement social s’observe plus particulièrement chez les agresseurs sexuels d’enfants souvent décrits comme extrêmement isolés, n’ayant pas ou peu d’amis de leur âge et peu habiles socialement. C’est ainsi que ces adolescents sont incapables d’établir et/ou de maintenir des relations privilégiées avec les pairs alors qu’ils rapportent se sentir bien avec les enfants qui sont bien souvent de 4 à 5 ans plus jeunes qu’eux (une méfiance par rapport aux pairs combinée à une idéalisation du monde des enfants).
Si l’on compare les adolescents agresseurs sexuels avec d’autres types de délinquants, on constate que près de la moitié des adolescents agresseurs sont décrits comme étant solitaires et présentent des déficits au niveau des habiletés sociales comparativement à une minorité de délinquants non sexuels. Ces déficits se manifesteraient de différentes façons (ex. : plus de gêne, de retrait, moins de relations intimes, moins d’amis). De plus, les adolescents agresseurs avaient moins tendance à faire partie d’un groupe de pairs que les adolescents qui avaient commis une autre forme de délit.
Les AAS ont aussi des difficultés au niveau des habiletés hétérosociales (habiletés sociales spécifiques aux interactions avec l’autre sexe). Quelles en sont les caractéristiques?
Plusieurs adolescents agresseurs semblent avoir connu une sexualité saine. Les adolescents agresseurs sexuels ont cependant de la difficulté à répondre à leurs besoins sexuels et affectifs à l’intérieur d’une relation égalitaire. Ils ont appris, bien souvent en bas âge à entrer en relation avec les autres sur un mode de domination, et ce, particulièrement lors de leurs rapports avec les filles.
Les adolescents agresseurs ayant commis des délits sexuels sur des enfants se montrent plus craintifs lors de situations sociales et particulièrement, lors de situations d’intimité (ex. : demander à une fille pour sortir, avoir des relations sexuelles) comparativement à un groupe de délinquants non sexuels.
Les autres types de délinquants, quant à eux, font souvent partie de bandes d’adolescents et, dans la plupart des cas, ont une petite amie régulière avec laquelle ils ont des relations sexuelles. Ces pairs sont habituellement loin d’être les agents de socialisation appropriés au développement d’habiletés hétéros sociales adéquates. Une étude effectuée par Ageton (1983) montre clairement que l’appartenance à un groupe de délinquants qui accorde de l’importance aux comportements jugés masculins (ex. : dominant, brutal, froid) et qui renforce l’agression sexuelle est un déterminant important des agressions sexuelles commises par les adolescents.
Ce qu’il importe de se rappeler c’est que même s’il est évident que les jeunes agresseurs sexuels éprouvent, quel que soit le type de délits sexuels commis, des difficultés importantes dans leurs relations interpersonnelles, il est difficile, à l’heure actuelle, de déterminer quels sont les déficits propres aux jeunes délinquants sexuels et ceux qui sont partagés avec les autres types de délinquants et la population des adolescents non délinquants.
Les AAS présentent des déficits sur le plan des habiletés sociales. De tels déficits chez les AAS sont supérieurs à ceux constatés chez les délinquants et les membres d’un groupe normatif. Les AAS d’enfants et les agresseurs de pairs ou d’adultes montrent moins des caractéristiques sociales distinctes : les premiers vivraient un isolement important et les seconds, les mauvaises influences de leur groupe de pairs.
Une autre problématique commune aux AAS est la victimisation sexuelle. En quoi consiste-t-elle?
Une recension des recherches portant sur la victimisation sexuelle des adolescents agresseurs nous renvoie à des fréquences variant de 30 à 70 %. De son côté, Lafortune (1996) a observé une fréquence moyenne de victimisation sexuelle chez les adolescents agresseurs sexuels de 30 % lors de la consultation de 14 recherches portant sur la question. Une étude québécoise démontre que les adolescents agresseurs sexuels sont, de façon significative, plus souvent victimes d’agression sexuelle et psychologique dans leur enfance que les adolescents de la population normale. Une autre recherche québécoise qui, cette fois-ci, s’intéresse à la victimisation sexuelle des adolescents agresseurs versus les délinquants non sexuels arrive à la conclusion qu’il existe une différence significative entre les deux groupes. En effet, 70 % des adolescents agresseurs sexuels ont été sexuellement agressés avant l’âge de 12 ans alors que 17 % des délinquants ont été agressés pendant cette période ou au début de l’adolescence.
Cette grande diversité des pourcentages obtenus dans les études portant sur la victimisation sexuelle des adolescents agresseurs peut s’expliquer de différentes façons.
Premièrement, le moment auquel on questionne l’adolescent agresseur concernant les traumatismes du passé peut contribuer à faire en sorte qu’il en parlera ou non. En effet, certains adolescents sont davantage portés à parler des agressions subies en cours ou encore, à la fin du traitement, plutôt que lors de l’évaluation ou au début du processus thérapeutique. De plus, les mots utilisés pour questionner l’adolescent peuvent influencer la réponse.
Des études se sont penchées sur la fréquence de victimisation sexuelle chez différents types d’adolescents agresseurs sexuels. C’est ainsi que certaines recherches en arrivent à la conclusion que les fréquences de victimisation sont plus élevées chez ceux qui ont agressé d’enfants que chez ceux qui agressent des victimes plus âgées. D’autre part, on observerait des fréquences de victimisation plus élevées chez les adolescents agresseurs sexuels ayant commis des agressions avec contacts physiques (20,2 %), que chez ceux ayant perpétré des agressions sans contact avec la victime (7,5 %). Par ailleurs, les adolescents agresseurs sexuels qui commettent des agressions intrafamiliales seraient plus souvent victimes d’agressions sexuelles dans l’enfance que ceux qui commettent leur délit à l’extérieur de la fratrie.
En conclusion, nous pouvons dire qu’une victimisation sexuelle ou physique n’est pas une condition nécessaire ou suffisante pour agresser quelqu’un. Toutefois, ceux qui ont été agressés agressent à un plus jeune âge, font plus de victimes, sont moins portés à avoir des victimes uniquement féminines, et finalement, présentent plus de signes psychopathologiques et de problèmes interpersonnels. Retenons également que plusieurs intervenants cherchent uniquement au niveau de la victimisation antérieure une explication aux agressions sexuelles commises par l’adolescent. Pourtant, un grand nombre d’adolescents victimisés rapportent pour la première fois avoir été victimes d’agression sexuelle après avoir eux-mêmes commis des agressions sexuelles. Il s’agit aussi pour les adolescents de la réponse la plus facile pour expliquer à leur entourage pourquoi ils ont adopté ce type de comportement.
Les fréquences de victimisation sexuelle dans l’enfance chez les AAS varient grandement (de 30 % à 70 %) d’une étude à l’autre, mais demeurent plus élevées que celles qui sont observées dans la population générale. Il est difficile de savoir si les fréquences de victimisation sexuelle chez les AAS diffèrent de celles des autres délinquants. Bien que d’autres études soient nécessaires, les premiers travaux suggèrent que les fréquences de victimisation sexuelle sont plus élevées chez certains types d’AAS : les agresseurs d’enfants, les agresseurs qui commettent des agressions avec contacts physiques et les agresseurs qui commettent des agressions intrafamiliales. Les AAS qui ont été agressés sexuellement semblent avoir un profil différent de ceux ne l’ayant pas été, notamment en ce qui concerne les caractéristiques liées aux agressions : les premiers agresseraient à un plus jeune âge, feraient plus de victimes, seraient moins portés à n’avoir que des victimes féminines.
Quelles sont d’autres caractéristiques problématiques qu’on voit souvent chez les AAS?
On y retrouve tout d’abord, le manque de contrôle des pulsions qui serait plus présent chez les adolescents agresseurs de pairs ou d’adultes que chez ceux qui agressent des enfants. Mentionnons également que nous retrouvons moins ce diagnostic chez les adolescents qui font des délits sans contact physique.
Certains adolescents qui commettent des agressions sexuelles ont du mal à identifier les émotions qu’ils vivent puisqu’ils ont davantage l’habitude de les nier, de les rationaliser ou de les fuir. Leur registre émotif est souvent très pauvre, se limitant à se sentir bien ou mal ou, au mieux, en colère. Cette négation demeure aussi présente lors des passages à l’acte. Chez d’autres, nous remarquons un débordement de l’agressivité, la moindre remise en question ou déception génère une colère difficile à contenir. Les agressions sexuelles ont souvent pour fonction d’exprimer de la colère et de l’hostilité. C’est ainsi que le passage à l’acte peut être interprété en partie comme étant une sexualisation des conflits.
D’autres auteurs ont identifié la dépression comme étant une caractéristique partagée par les adolescents agresseurs sexuels. Leur étude a révélé un score moyen significativement plus élevé que les normes habituelles, avec une proportion de 42 % des sujets ayant rapporté des symptômes indiquant une dépression sérieuse. Quant à Vizard et coll. (1995), ils constatent que les adolescents ayant été sexuellement ou physiquement agressés ont fourni des scores significativement plus élevés que ceux ne l’ayant pas été. Dans cette perspective, nous pouvons nous questionner à savoir si les symptômes dépressifs sont en lien avec l’agression subie plutôt qu’en lien avec l’agression commise.
Par ailleurs, plusieurs adolescents agresseurs sexuels ont de la difficulté à s’intéresser à ce que vivent les autres. Leur préoccupation est d’abord égocentrique et il est ardu de les amener à se soucier des autres, même des personnes plus significatives dans leur vie par exemple, leurs parents. L’empathie pour la victime est donc généralement faible et elle ne devrait pas être le critère en fonction duquel on évalue la possibilité d’entreprendre ou non une démarche thérapeutique. Cela devrait plutôt être considéré comme un objectif thérapeutique.
Il est difficile de tirer des conclusions des données relatives à la symptomatologie dépressive, bien qu’on observe chez certains AAS quelques symptômes dépressifs. Le diagnostic le plus fréquemment rencontré semble être celui du trouble de conduite et du manque de contrôle au niveau des pulsions, et ce, plus chez les AAS de pairs ou d’adultes que chez les AAS d’enfants. Ce diagnostic serait moins présent chez les AAS qui commettent des agressions sans contacts physiques. Malgré les limites rencontrées dans ce secteur, un diagnostic d’agressions de substances peut être posé chez certains AAS.
Les AAS sont-ils influencés par leur milieu familial?
Quel que soit le comportement problématique du jeune, dans la très grande majorité des cas, il se manifeste dans le contexte des relations interpersonnelles. Généralement, ce sont les relations familiales qui ont le plus d’influence.
Que le comportement se produise dans la famille ou à l’extérieur de celle-ci, les relations familiales demeurent extrêmement importantes. Elles sont le contexte dans lequel s’inscrit le comportement problématique de même que l’endroit où il est interprété et où il provoque une série de réactions qui le conditionneront désormais. C’est donc dire que l’influence de la famille dans le façonnement des comportements et des croyances du jeune est particulièrement importante.
En ce qui concerne les adolescents agresseurs sexuels, une proportion significative d’entre eux proviendrait de milieux familiaux dans lesquels, certaines dysfonctions familiales sont présentes. Parmi les facteurs de risque se rapportant à la famille qui sont fréquemment mentionnés dans le développement des comportements sexuels agressifs, nous retrouvons :
- une famille nombreuse;
- des antécédents psychiatriques, criminels et de toxicomanie;
- un environnement sexuel non conforme;
- des modèles sexuels inappropriés;
- une expérience de victimisation sexuelle, d’humiliation et de traumatismes;
- une inconsistance quant aux soins;
- la perte précoce d’un parent;
- une absence de confident durant l’enfance.
Donc, comme nous pouvons le constater, plusieurs éléments de la dynamique familiale sont cités dans la genèse des comportements sexuels déviants.
Quelles sont des caractéristiques psychologiques communes aux parents d’enfants AAS?
Même si cette variable demeure complexe à estimer, plusieurs auteurs s’entendent pour dire que les parents des adolescents agresseurs sexuels éprouvent fréquemment des difficultés d’ordre psychologique dont la nature n’est pas toujours spécifiée.
Par contre, lorsqu’un diagnostic psychiatrique est posé, c’est celui de la dépression qui est le plus souvent rapporté. Graves et coll. (1996) soutiennent que 20 % des mères et 12 % des pères sont identifiés comme ayant des troubles psychiatriques. Toutefois, retenons que lors de l’évaluation de l’adolescent agresseur sexuel, cette dimension demeure difficile à déterminer.
Les parents d’AAS ont-ils des problèmes de consommation?
Plusieurs parents d’adolescents agresseurs sexuels ont déjà connu ou connaissent des problèmes d’agressions de substance et l’étude de Graves et coll. (1996) corrobore cette observation. En effet, leur étude indique que 55 % des pères et 36 % des mères admettent avoir usé ou abusé d’alcool. Quant aux substances psychoactives, 62 % des pères et 43 % des mères reconnaissent en avoir déjà abusé.




