Chapitre 1 Elément de base des processus socio-cognitifs Flashcards

1
Q

Approche Adaptative

A

Elle tente de cerner les mécanismes individuels qui contribuent au parcours professionnel : personnalité, valeurs, engagement, capacités de raisonnement notamment. On pourrait dire qu’elle est « interactionniste » au sens où elle articule les caractéristiques de l’environnement professionnel et celles de l’individu.

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2
Q

Approche Reproductive

A

Elle s’intéresse d’abord aux processus qui tendent à maintenir la hiérarchie sociale, ici dans le cadre professionnel : normes de jugement, stéréotypes, discrimination par exemple.

On peut la qualifier de « constructiviste » dans la mesure où elle considère que la « réalité » du travail est construite, sur la base de «grilles de lectures » qui orientent nos façons de percevoir, de juger, d’agir, tout cela dans un contexte organisationnel traversé par des logiques de maintien de la hiérarchie en place.

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3
Q

Polyphasie cognitive

A

Elle fut introduite par Moscovici dans son étude pionnière sur la réception de la psychanalyse en France (1961), où il décrit l’hétérogénéité sociocognitive du champ des représentations.

Fait référence à la coexistence de systèmes cognitif, c’est à dire différent genres de connaissances et différents types de rationnalités.

La polyphasie cognitive se réfère donc à un état où différents genres de connaissances, utilisant différents types de rationalités peuvent coexister chez un individu ou au sein d’un groupe.

La connaissance est alors conçue comme une forme dynamique se renouvelant sans cesse et qui peut manifester autant de rationalités que requises par l’infinie variété des situations socioculturelles de l’expérience humaine. L’utilisation d’une forme de connaissance ou d’une autre dépend des nécessités de l’environnement social et de la configuration socio-psychologique de chaque champ. Ces différentes formes coexistent plutôt qu’elles ne s’excluent ; au lieu de dépasser des formes socialement considérées comme « arriérées », « primitives » ou «infantiles », les communautés humaines puisent continuellement dans les différentes ressources que chaque forme de connaissance offre.

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4
Q

Niveau d’analyse de Doise

A

Les quatre niveaux proposés par Doise sont :

-le niveau intra-individuel (niveau 1)

-le niveau inter-individuel (niveau 2)

-le niveau positionnel/catégoriel (niveau 3)

-le niveau idéologique/croyances (niveau 4)

Le niveau 1 est celui des recherches qui placent au centre de leurs analyses processus fortement dépendants des caractéristiques individuelles (le sexe, la personnalité, les capacités cognitives, la génétique…)

Le niveau 2 s’intéresse aux facteurs impliqués dans les interactions. Nous pouvons citer quelques exemples : le nombre de personnes qui échangent

dans un groupe, la fréquence des interactions entre individus, la méthode pédagogique utilisée qui va susciter des échanges directs ou indirects…

Le niveau 3 accorde une place importante au statut social. Ainsi, la catégorie socio-professionnelle, la nature du métier, le genre (masculin/féminin…) sont des exemples de catégories sociales qui peuvent être prises en compte.

Enfin le niveau 4 traite des facteurs idéologiques, des croyances, des représentations sociales partagées.

Ces quatre niveaux d’analyses sont rarement étudiés de manière exclusive. La grande majorité des recherches combinent deux ou trois niveaux d’analyses simultanément. Ainsi, on peut chercher à comprendre l’effet du sexe(N1) du salarié sur la manière dont il va être évalué par ses collègues ou ses managers (N3), selon son type de personnalité (N1) et la fréquence des échanges avec ses collègues (N2).

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5
Q

Niveau d’analyse de Doise

A

Les quatre niveaux proposés par Doise sont :

-le niveau intra-individuel (niveau 1)

-le niveau inter-individuel (niveau 2)

-le niveau positionnel/catégoriel (niveau 3)

-le niveau idéologique/croyances (niveau 4)

Le niveau 1 est celui des recherches qui placent au centre de leurs analyses processus fortement dépendants des caractéristiques individuelles (le sexe, la personnalité, les capacités cognitives, la génétique…)

Le niveau 2 s’intéresse aux facteurs impliqués dans les interactions. Nous pouvons citer quelques exemples : le nombre de personnes qui échangent

dans un groupe, la fréquence des interactions entre individus, la méthode pédagogique utilisée qui va susciter des échanges directs ou indirects…

Le niveau 3 accorde une place importante au statut social. Ainsi, la catégorie socio-professionnelle, la nature du métier, le genre (masculin/féminin…) sont des exemples de catégories sociales qui peuvent être prises en compte.

Enfin le niveau 4 traite des facteurs idéologiques, des croyances, des représentations sociales partagées.

Ces quatre niveaux d’analyses sont rarement étudiés de manière exclusive. La grande majorité des recherches combinent deux ou trois niveaux d’analyses simultanément. Ainsi, on peut chercher à comprendre l’effet du sexe(N1) du salarié sur la manière dont il va être évalué par ses collègues ou ses managers (N3), selon son type de personnalité (N1) et la fréquence des échanges avec ses collègues (N2).

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6
Q

Le niveau intra-individuel (niveau 1)

A

Il caractérise les modèles qui portent sur les caractéristiques « intrinsèques » des sujets, et la façon dont ceux-ci traitent l’information provenant de l’environnement, et y réagissent. Le contexte social n’y a pas de statut particulier ; il est appréhendé en qualité de stimulus. Les travaux d’Adorno (Adorno et al., 1950) se situent à ce niveau d’explication. Postulant l’existence d’une structure mentale stable qui expliquerait certains comportements exceptionnels (en référence au soutien apporté aux Nazis), l’auteur élabore le concept de Personnalité Autoritaire. Cependant, si l’appel au pouvoir explicatif de la « nature humaine » (cf. Deconchy, 2000) est la base de l’argumentation d’Adorno, celle-ci se révèle, en elle-même, incapable d’expliquer le passage à l’acte. On voit alors que l’évocation d’autres facteurs, et d’autres niveaux d’analyses, est indispensable (les travaux de Rockeach vont y contribuer dans une certaine mesure).

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6
Q

Le niveau intra-individuel (niveau 1)

A

Il caractérise les modèles qui portent sur les caractéristiques « intrinsèques » des sujets, et la façon dont ceux-ci traitent l’information provenant de l’environnement, et y réagissent. Le contexte social n’y a pas de statut particulier ; il est appréhendé en qualité de stimulus. Les travaux d’Adorno (Adorno et al., 1950) se situent à ce niveau d’explication. Postulant l’existence d’une structure mentale stable qui expliquerait certains comportements exceptionnels (en référence au soutien apporté aux Nazis), l’auteur élabore le concept de Personnalité Autoritaire. Cependant, si l’appel au pouvoir explicatif de la « nature humaine » (cf. Deconchy, 2000) est la base de l’argumentation d’Adorno, celle-ci se révèle, en elle-même, incapable d’expliquer le passage à l’acte. On voit alors que l’évocation d’autres facteurs, et d’autres niveaux d’analyses, est indispensable (les travaux de Rockeach vont y contribuer dans une certaine mesure).

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7
Q

Le niveau inter-individuel et situationnel (niveau 2)

A

Il caractérise les travaux portant sur des processus d’interaction tels qu’ils se déroulent dans une situation donnée. Ici la définition du contexte est limitée aux caractéristiques de la situation expérimentale. Les rôles sociaux, et les insertions sociales des sujets en dehors de la situation, ne sont pas pris en compte dans l’analyse des observations. Les études traitant de la conformité (Asch, 1951) sont typiques de ce niveau d’analyse. Nous précisons dès maintenant que ces deux premiers niveaux d’analyse n’auront qu’une

place marginale dans le cadre de ce travail. C’est pour cette raison qu’ils n’ont été abordés que très rapidement. La justification de ce moindre intérêt viendra un peu plus loin, lorsque sera exposé le type d’analyse que nous mènerons.

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8
Q

Le niveau positionnel (niveau 3)

A

Il mobilise des explications ayant trait aux positions sociales des individus telles qu’elles peuvent exister à l’intérieur, mais aussi en dehors, de la situation expérimentale. Les célèbres expérimentations de Milgram (1974) sur la soumission à l’autorité sont emblématiques de ce niveau d’analyse, bien que l’auteur n’ait jamais précisé exactement quel type principal d’explication il sollicitait. Mais ce flou interprétatif est aussi l’occasion de souligner l’intérêt qu’il y a à articuler plusieurs niveaux d’analyse. En effet, Doise rappelle que l’état agentique étudié au cours de ces expériences suscite chez Milgram différents types d’explications. Si l’on analyse le passage à l’état agentique comme une interaction marquée par la mise en acte, de la part d’un sujet, des prescriptions d’un autre individu, la référence aux rapports inter-individuels et intra-individuels suffit. Cependant, les différentes variantes de l’expérience montrent que le statut de l’expérimentateur (celui qui ordonne) influe nettement sur le taux d’obéissance. Une analyse de niveau positionnel est alors nécessaire. Mais il semble aussi que Milgram complète ses explications par l’évocation de l’idéologie dominante. En l’occurrence, le fait que les sociétés occidentales fassent de la science un champ de pratiques socialement valorisé et légitimé, peut expliquer la soumission des sujets à des ordres, contraires à la morale.

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9
Q

Le niveau idéologique (niveau 4)

A

Les travaux de Milgram, bien sûr, mais aussi ceux de Lerner ou de Deconchy se situent à ce niveau d’explication. La Croyance en un Monde Juste (Lerner, 1980) illustre très bien un processus idéologique visant à justifier l’ordre social et ses inégalités. L’auteur expliquera les résultats observés au cours des expériences sur « la victime innocente » par l’existence chez les gens d’une conviction que le monde est juste, et que par conséquent les personnes qui souffrent méritent nécessairement leur sort. Les travaux de ce type, même s’ils ne représentent pas la part essentielle des recherches en psychologie sociale, révèlent le poids important de facteurs positionnels et idéologiques dans les phénomènes touchant au thème de l’ordre social.

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9
Q

Le niveau idéologique (niveau 4)

A

Les travaux de Milgram, bien sûr, mais aussi ceux de Lerner ou de Deconchy se situent à ce niveau d’explication. La Croyance en un Monde Juste (Lerner, 1980) illustre très bien un processus idéologique visant à justifier l’ordre social et ses inégalités. L’auteur expliquera les résultats observés au cours des expériences sur « la victime innocente » par l’existence chez les gens d’une conviction que le monde est juste, et que par conséquent les personnes qui souffrent méritent nécessairement leur sort. Les travaux de ce type, même s’ils ne représentent pas la part essentielle des recherches en psychologie sociale, révèlent le poids important de facteurs positionnels et idéologiques dans les phénomènes touchant au thème de l’ordre social.

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10
Q

Approche cognitive

A

L’approche cognitive s’intéresse surtout aux facteurs de niveau 1

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11
Q

Approche de la cognition sociale

A

L’approche de la cognition sociale qui traite d’abord des processus cognitifs envisagés comme rationnels pouvant être biaisés par des facteurs de niveaux 3 et 4

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12
Q

Approche Socio-cognitive

A

L’approche socio-cognitive se caractérise par deux présupposés majeurs. Le premier concerne la notion de “social”, le second traite de la notion de “connaissance”.

L’approche socio-cognitive considère les variables sociales dans leur acception la plus complète, c’est à dire qu’elle attache une importance majeure aux variables de niveaux 3 et 4. A la différence de l’approche cognitive qui s’intéresse surtout aux facteurs de niveau 1, ou de l’approche de la cognition sociale qui traite d’abord des processus cognitifs envisagés comme rationnels pouvant être biaisés par des facteurs de niveaux 3 et 4, l’approche sociocognitive postule que le statut social et les facteurs idéologiques déterminent prioritairement les processus individuels. Dans l’approche socio-cognitive les chercheurs font l’hypothèse que les individus sont d’abord des êtres sociaux, sur lesquels pèsent des mécanismes qui leur “échappent” en grande partie (les rôles sociaux attachés aux statuts profesionnels par exemple, ou encore les déterminations idéologiques). De fait, cette approche ne compare pas les attitudes, les comportements des individus à un idéal rationnel pur, mais au contraire, pose comme “naïve” l’idée que les individus seraient spontanément orientés vers la recherche d’attitudes ou de comportements “rationnels” scientifiquement. Le bain social dans lequel l’individu évolue guide la constrution de ses répères moraux, idéologiques, et l’enjeu est d’abord de comprendre l’influence de ce bain social, et non de mesurer les écarts à ce qui serait jugé comme étant un “bon” comportement, ou une “bonne” attitude. Le statut de la connaissance est envisagée dans la prolongation de ce premier présupposé. Si la connaissance peut être rationnelle (celle produite par les scientifiques), elle est au quotidien, très souvent, orientée par des critères de valeurs, sous tendus par des normes sociales plus ou moins explicites. La connaissance produite par les individus, dans la plupart des situations quotidiennes, n’est donc pas essentiellement dirigée vers la constrution de savoirs scientifiquement purs, mais socialement acceptables, désirables.

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13
Q

Mécanismes de perception endogroupe et exogroupe :

A

La question de la perception de celui appartenant à l’autre groupe (exogroupe) ou de celui appartenant à mon groupe (endogroupe) est fondamentale en psychologie sociale. Elle touche à nos appartenances sociales, et à la manière dont elles guident notre perception du monde. Deux facteurs majeurs doivent être notés. Le premier concerne le déséquilibre des jugements portés entre l’exogroupe et l’endogroupe, en défaveur de l’exogroupe. C’est ce que l’on l’exodéfavoritisme (ou l’endofavoritisme). Pour résumer, toute chose égale par ailleurs, je “préfère” quelqu’un de mon groupe par rapport à l’autre groupe. L’étude classique de Tajfel (cf cours) sur le paradigme des groupes minimaux est exemplaire. Elle illustre que notre appartenance à un groupe, bien que très ponctuelle (quelques minutes dans l’étude), sur des critères sans enjeux pour l’individu (la préférence de tel tableau dans l’étude), détermine significativement notre manière de percevoir ceux de “mon groupe” en opposition à “l’autre groupe”. Cette préférence se traduit par des comportements et des décisions de discrimination durant l’expérience. Dans l’expérience ces discriminations n’ont aucune conséquence sur les individus, mais l’étude illustre à quel point nos appartenances groupales quotidiennes (notre service d’entreprise, notre club, notre association, notre pays…) influencent fortement, et parfois avec des conséquences importantes, notre perception d’autrui.

Le second processus majeur en lien avec les perceptions endogroupe et exogroupe touche à la hiérarchie sociale des groupes. Lorenzi-Cioldi évoque la distinction entre groupes dominants et groupes dominés. Les recherches qu’il a menées indiquent que la façon dont nous percevons, et dont nous évoquons l’endogroupe et l’exogroupe est significativement influencée par le statut social de ces groupes. Les groupes dominants sont perçus comme étant composés d’individus ayant des points communs, mais aussi des particularités qui les distinguent les uns des autres. Cela serait moins vrai lorsqu’il s’agit d’évoquer des groupes dominés, pour lesquels nous aurions “en tête” une image beaucoup plus compacte et homogène de ce type de groupe (“ils se ressemblent tous”). D’autre part, ce facteur jouerait également un rôle important dans la manière de se définir soi-même, selon notre groupe d’appartenance. Ainsi, les membres des groupes dominants se décriraient comme étant plus distincts les uns des autres, alors que les membres des groupes dominés se décriraient plus semblables entre eux. Selon Lorenzi-Cioldi cette homogénéisation par eux mêmes des membres des groupes dominés aurait une fonction de protection identitaire basée sur un sentiment d’appartenance fort, et d’un destin commun qui constituerait un ciment social
majeur.

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14
Q

Ethnocentrisme

A

Les travaux de Levine et Campbell ont pour intérêt d’avoir servi de relais entre les recherches de Sumner (1906) sur l’ethnocentrisme, et celles qui se développeront ensuite au cours des années 1970. Summer avait contribué à poser les bases de recherches sur les rapports inter-groupes, en étant le premier à introduire dans les débats le concept d’ethnocentrisme. Dans son approche, l’ethnocentrisme se caractérise par la tendance à percevoir et évaluer les autres groupes sociaux, par rapport au point de référence qu’est son propre groupe d’appartenance. Cela nous conduirait à n’utiliser que nos propres grilles de lectures culturelles, pour appréhender les particularités des autres groupes. Il serait donc inévitable que, audelà

de l’incompréhension potentielle, ce soit la dévalorisation et le rejet qui découlent de l’ethnocentrisme.

En effet, ils reprennent le concept d’ethnocentrisme élaboré par Summer, mais en lui adjoignant d’autres particularités que la seule distinction entre l’endogroupe et l’exogroupe, notamment l’hypothèse que cette distinction ne s’opère pas simplement sur des critères objectifs (de pratiques, de moeurs…), mais qu’elle conduit aussi ne pas appliquer les mêmes principes d’évaluation et d’interprétation. Ils proposent le concept de “stéréotype universel” pour désigner le fruit de ces processus.

15
Q

Stéréotype universel

A

Le stéréotype universel reflèterait la tendance à évaluer positivement les critères de jugement quand il s’agit de son propre groupe, et négativement quand il s’agit de groupes extérieurs. Levine et Campbell établissent une liste comparative des jugements selon qu’ils concernent l’endogroupe (gras) ou l’exogroupe (italique), en voici quelques exemples :

Voir son groupe comme vertueux et supérieur.

Voir l’autre groupe comme méprisable, immoral et inférieur.

Voir son groupe comme pacifique.

Voir l’autre groupe comme agressif.

Notre groupe est honnête et digne de confiance.

L’autre groupe n’a pas le sens de l’honnêteté ni de code moral.

16
Q

Endogroupe

A

Dans le groupe

17
Q

Exogroupe

A

Extérieur au groupe

18
Q

Catégorisation sociale

A

La catégorisation sociale concerne deux choses : d’une part les processus dynamiques qui nous conduisent à ranger, classer, catégoriser des objets sociaux dans telle ou telle catégorie, d’autre part le résultat de ces processus, qui est la catégorie elle-même.

Lorsque la psychologie sociale reprend cette notion de la psychologie cognitive, et lui accole le qualificatif “sociale”.

En portant son attention sur des objets sociaux, elle rend nécessaire la prise en compte de la valeur sociale de l’objet traité.

Cela pose donc la question de l’identité sociale de l’individu (Tajfel, 1981) comme un élément important dans la catégorisation

19
Q

Biais d’accentuation

A

Contraste (dans le cas des différences entre groupes), et assimilation (dans le cas de la ressemblance entre éléments d’un même groupe). Le biais d’accentuation consiste à percevoir des éléments issus de groupes différents, comme étant beaucoup plus différents qu’ils ne le sont en réalité. Pour résumer : deux individus issus de deux groupes seront perçus comme beaucoup plus différents qu’en réalité (contraste), alors que deux individus d’un même groupe seront perçus comme étant beaucoup plus semblables qu’en réalité (assimilation). Les travaux sur le biais d’accentuation ont d’abord été menées dans le cadre de recherches en psychologie cognitive, et même si l’on y retrouve des auteurs ancrés dans la psychologie sociale (Tajfel et Wilkes, 1963), les objets sur lesquels était analysé ce biais d’accentuation n’avaient pas une connotation sociale très forte. Ainsi ,dans leur étude Tajfel et Wilkes (1963) demandaient aux participants de catégoriser des lignes de longueursdifférentes, selon plusieurs conditions expérimentales : lignes associées à des lettres, ou sans association de lettres. La valeur sociale des éléments perceptifs (lignes et lettres) est dans ce cas toute relative. Mais les apports théoriques de ces travaux vont permettre de développer des recherches mobilisant des éléments ayant une dimension sociale plus évidente. Ainsi le biais d’accentuation va être également mobilisé pour comprendre les biais de perception, selon qu’ils concernent notre propre groupe (endogroupe), ou un groupe auquel nous n’appartenons pas (exogroupe).

20
Q

Biais d’accentuation

A

Contraste (dans le cas des différences entre groupes), et assimilation (dans le cas de la ressemblance entre éléments d’un même groupe). Le biais d’accentuation consiste à percevoir des éléments issus de groupes différents, comme étant beaucoup plus différents qu’ils ne le sont en réalité. Pour résumer : deux individus issus de deux groupes seront perçus comme beaucoup plus différents qu’en réalité (contraste), alors que deux individus d’un même groupe seront perçus comme étant beaucoup plus semblables qu’en réalité (assimilation). Les travaux sur le biais d’accentuation ont d’abord été menées dans le cadre de recherches en psychologie cognitive, et même si l’on y retrouve des auteurs ancrés dans la psychologie sociale (Tajfel et Wilkes, 1963), les objets sur lesquels était analysé ce biais d’accentuation n’avaient pas une connotation sociale très forte. Ainsi ,dans leur étude Tajfel et Wilkes (1963) demandaient aux participants de catégoriser des lignes de longueursdifférentes, selon plusieurs conditions expérimentales : lignes associées à des lettres, ou sans association de lettres. La valeur sociale des éléments perceptifs (lignes et lettres) est dans ce cas toute relative. Mais les apports théoriques de ces travaux vont permettre de développer des recherches mobilisant des éléments ayant une dimension sociale plus évidente. Ainsi le biais d’accentuation va être également mobilisé pour comprendre les biais de perception, selon qu’ils concernent notre propre groupe (endogroupe), ou un groupe auquel nous n’appartenons pas (exogroupe).

21
Q

Bais de perception d’homogénéité endogroupe et d’hétérogénéité exogroupe

A

Lorsque l’on s’intéresse aux relations intergroupes, il est une évidence à ne pas négliger : l’individu qui est étudié fait nécessairement partie de l’un de ces groupes. Il appartient donc à un groupe, quand l’autre, ou les autres groupes, ne sont pas le ou les siens. On parle d’endogroupe (le groupe de l’individu) et d’exogroupe (l’autre groupe). De fait, la perception de son propre groupe, et des autres groupes, va nécessairement être déterminée par la nature des relations sociales que ces groupes entretiennent (concurrence, coopération, liens hiérarchiques, domination…). Le biais d’homogénéité exogroupe consiste à décrire les membres de l’exogroupe comme étant beaucoup plus semblables, ou identiques, qu’ils ne le sont en réalité. A l’inverse, le biais d’hétérogénéité endogroupe conduit à décrire les membres de l’endogroupe comme étant beaucoup plus différents les uns des autres qu’ils ne le sont en réalité. Les premières études à mettre en évidence ces biais ont été réalisées dans le prolongement des travaux de Tajfel et Wilkes (1963), dans le but de situer dans un environnement avec une dimension sociale plus forte, les effets d’assimilation et de contraste (Park et Rothbart, 1982 ; Ostrom et Sedikides, 1992). Mais une étape supplémentaire va être franchie lorsque les chercheurs vont constater que ces biais d’homogénéité et d’hétérogénéité sont d’autant plus marqués que les groupes en présence sont dans des rapports dissymétriques. Le chercheur qui a fourni la plus grande contribution à ce champ d’investigation est Lorenzi-Cioldi (1988, 2002). Ses travaux sur les groupes dominants vs groupes dominés sont déterminants.

22
Q

Endofavoritisme

A

Au-delà des biais perceptifs liés aux relations intergroupes, il est possible de repérer des processus de discrimination découlant de l’appartenance groupale. Evoquer la discrimination active immédiatement dans nos esprits certains faits d’actualité : discrimination dans l’emploi, le logement, le salaire, basée sur des critères de sexe, de couleur de peau, d’âge, par exemple. Si ces cas de discrimination ont une base clairement ancrée dans les rapports sociaux dissymétriques, il est intéressant de noter que les premiers travaux ayant traité des processus engendrant la discrimination, l’endofavoritisme et l’exodéfavoritisme, ont utilisé des groupes n’ayant pas de préexistence à l’étude elle-même. C’est ce que l’on nomme le paradigme des groupes minimaux (PGM), que l’on associe généralement aux premiers travaux menés par Tajfel, Billig, Bundy et Flament (1979). Dans cette expérience, les participants étaient des élèves du secondaire, auxquels on avait, au préalable, fait réaliser une courte tâche de jugement de préférence de plusieurs tableaux abstraits de deux artistes, Klee et Kandinsky, mais sans leur donner cette information. Puis on informait chaque participant que ses réponses indiquaient qu’il préférait soit les tableaux de Klee ou de Kandinsky, et que par conséquent il appartenait à l’un ou l’autre des deux groupes d’élèves identifiés selon leurs préférences. Cependant, les noms des autres élèves composant les deux groupes n’étaient pas révélés. Puis l’expérience se poursuivait par une tâche de rétribution : à l’aide de plusieurs matrices (ou modèles de combinaisons de récompenses), les participants devaient décider des rémunérations que recevraient deux de leurs camarades. Ces camarades peuvent appartenir au même groupe ou aux deux groupes. Les participants ne savent pas à quels camarades précisément iront les récompenses : ils connaissent uniquement le groupe et le numéro de code de chacun des camarades qu’ils doivent récompenser. Les participants ne se rémunèrent jamais eux-mêmes.

Cette tâche est restée célèbre sous le nom de “matrice de Tajfel”. En voici un exemple.

Pour chaque matrice, les participants sont informés du groupe auquel appartient le sujet qui recevra l’une des valeurs de la ligne du haut, et le groupe de celui qui recevra l’une des valeurs du bas. Il est demandé aux participants de choisir une seule colonne pour rémunérer les deux camarades.

Prenons un exemple : il est indiqué que la ligne du haut correspond aux récompenses potentielles pour un camarade du même groupe que le participant, et que la ligne du bas concerne ce que va recevoir un camarade de l’autre groupe. On remarquera qu’une seule colonne correspond à une récompense identique (17/17). A droite du tableau, les récompenses pour son propre groupe (ligne du haut) sont plus importantes qu’à gauche, mais on voit aussi que les récompenses de l’autre groupe (ligne du bas) dépassent celles qui reviendront à son propre groupe (par ex. 23/29). A gauche du tableau c’est l’inverse : les récompenses allant à son propre groupe sont toujours plus élevées que celles de l’autre groupe.
Les participants ont dans ce cas le choix entre deux stratégies : soit donner beaucoup à un camarade de leur propre groupe (partie droite) mais simultanément donner encore plus à un membre de l’exogroupe, soit donner moins au camarade de son propre groupe (partie gauche), mais simultanément donner encore moins au membre de l’exogroupe.
Les résultats obtenus dans cette configuration par Tajfel, indiquent que c’est la plupart du temps la deuxième stratégie qui est retenue. Autrement dit, plus que le gain absolu, les participants sont attachés à ce que les membres de leur groupe (endogroupe) reçoivent plus que ceux de l’exogroupe, même si cela implique de renoncer à une récompense dans l’absolu plus élevée.

Comment interpréter théoriquement ces résultats ? Tajfel s’appuie sur le concept d’identité sociale. Selon lui, l’individu tend à rechercher une identité sociale positive, ce qui sous-entend que son propre groupe soit valorisé. Dans la majorité des situations, la valorisation de son propre groupe passe par la comparaison sociale avec d’autres groupes. Ainsi, dans l’expérience, les participants tendaient à maximiser le résultat de cette comparaison sociale, en choisissant la solution qui accentuait la différence au profit de l’endogroupe.

23
Q

Exodefavoritisme

A

Au-delà des biais perceptifs liés aux relations intergroupes, il est possible de repérer des processus de discrimination découlant de l’appartenance groupale. Evoquer la discrimination active immédiatement dans nos esprits certains faits d’actualité : discrimination dans l’emploi, le logement, le salaire, basée sur des critères de sexe, de couleur de peau, d’âge, par exemple. Si ces cas de discrimination ont une base clairement ancrée dans les rapports sociaux dissymétriques, il est intéressant de noter que les premiers travaux ayant traité des processus engendrant la discrimination, l’endofavoritisme et l’exodéfavoritisme, ont utilisé des groupes n’ayant pas de préexistence à l’étude elle-même. C’est ce que l’on nomme le paradigme des groupes minimaux (PGM), que l’on associe généralement aux premiers travaux menés par Tajfel, Billig, Bundy et Flament (1979). Dans cette expérience, les participants étaient des élèves du secondaire, auxquels on avait, au préalable, fait réaliser une courte tâche de jugement de préférence de plusieurs tableaux abstraits de deux artistes, Klee et Kandinsky, mais sans leur donner cette information. Puis on informait chaque participant que ses réponses indiquaient qu’il préférait soit les tableaux de Klee ou de Kandinsky, et que par conséquent il appartenait à l’un ou l’autre des deux groupes d’élèves identifiés selon leurs préférences. Cependant, les noms des autres élèves composant les deux groupes n’étaient pas révélés. Puis l’expérience se poursuivait par une tâche de rétribution : à l’aide de plusieurs matrices (ou modèles de combinaisons de récompenses), les participants devaient décider des rémunérations que recevraient deux de leurs camarades. Ces camarades peuvent appartenir au même groupe ou aux deux groupes. Les participants ne savent pas à quels camarades précisément iront les récompenses : ils connaissent uniquement le groupe et le numéro de code de chacun des camarades qu’ils doivent récompenser. Les participants ne se rémunèrent jamais eux-mêmes.

Cette tâche est restée célèbre sous le nom de “matrice de Tajfel”. En voici un exemple.

Pour chaque matrice, les participants sont informés du groupe auquel appartient le sujet qui recevra l’une des valeurs de la ligne du haut, et le groupe de celui qui recevra l’une des valeurs du bas. Il est demandé aux participants de choisir une seule colonne pour rémunérer les deux camarades.

Prenons un exemple : il est indiqué que la ligne du haut correspond aux récompenses potentielles pour un camarade du même groupe que le participant, et que la ligne du bas concerne ce que va recevoir un camarade de l’autre groupe. On remarquera qu’une seule colonne correspond à une récompense identique (17/17). A droite du tableau, les récompenses pour son propre groupe (ligne du haut) sont plus importantes qu’à gauche, mais on voit aussi que les récompenses de l’autre groupe (ligne du bas) dépassent celles qui reviendront à son propre groupe (par ex. 23/29). A gauche du tableau c’est l’inverse : les récompenses allant à son propre groupe sont toujours plus élevées que celles de l’autre groupe.
Les participants ont dans ce cas le choix entre deux stratégies : soit donner beaucoup à un camarade de leur propre groupe (partie droite) mais simultanément donner encore plus à un membre de l’exogroupe, soit donner moins au camarade de son propre groupe (partie gauche), mais simultanément donner encore moins au membre de l’exogroupe.
Les résultats obtenus dans cette configuration par Tajfel, indiquent que c’est la plupart du temps la deuxième stratégie qui est retenue. Autrement dit, plus que le gain absolu, les participants sont attachés à ce que les membres de leur groupe (endogroupe) reçoivent plus que ceux de l’exogroupe, même si cela implique de renoncer à une récompense dans l’absolu plus élevée.

Comment interpréter théoriquement ces résultats ? Tajfel s’appuie sur le concept d’identité sociale. Selon lui, l’individu tend à rechercher une identité sociale positive, ce qui sous-entend que son propre groupe soit valorisé. Dans la majorité des situations, la valorisation de son propre groupe passe par la comparaison sociale avec d’autres groupes. Ainsi, dans l’expérience, les participants tendaient à maximiser le résultat de cette comparaison sociale, en choisissant la solution qui accentuait la différence au profit de l’endogroupe.

24
Q

Paradigme des groupe minimaux

A

Au-delà des biais perceptifs liés aux relations intergroupes, il est possible de repérer des processus de discrimination découlant de l’appartenance groupale. Evoquer la discrimination active immédiatement dans nos esprits certains faits d’actualité : discrimination dans l’emploi, le logement, le salaire, basée sur des critères de sexe, de couleur de peau, d’âge, par exemple. Si ces cas de discrimination ont une base clairement ancrée dans les rapports sociaux dissymétriques, il est intéressant de noter que les premiers travaux ayant traité des processus engendrant la discrimination, l’endofavoritisme et l’exodéfavoritisme, ont utilisé des groupes n’ayant pas de préexistence à l’étude elle-même. C’est ce que l’on nomme le paradigme des groupes minimaux (PGM), que l’on associe généralement aux premiers travaux menés par Tajfel, Billig, Bundy et Flament (1979). Dans cette expérience, les participants étaient des élèves du secondaire, auxquels on avait, au préalable, fait réaliser une courte tâche de jugement de préférence de plusieurs tableaux abstraits de deux artistes, Klee et Kandinsky, mais sans leur donner cette information. Puis on informait chaque participant que ses réponses indiquaient qu’il préférait soit les tableaux de Klee ou de Kandinsky, et que par conséquent il appartenait à l’un ou l’autre des deux groupes d’élèves identifiés selon leurs préférences. Cependant, les noms des autres élèves composant les deux groupes n’étaient pas révélés. Puis l’expérience se poursuivait par une tâche de rétribution : à l’aide de plusieurs matrices (ou modèles de combinaisons de récompenses), les participants devaient décider des rémunérations que recevraient deux de leurs camarades. Ces camarades peuvent appartenir au même groupe ou aux deux groupes. Les participants ne savent pas à quels camarades précisément iront les récompenses : ils connaissent uniquement le groupe et le numéro de code de chacun des camarades qu’ils doivent récompenser. Les participants ne se rémunèrent jamais eux-mêmes.

Cette tâche est restée célèbre sous le nom de “matrice de Tajfel”. En voici un exemple.

Pour chaque matrice, les participants sont informés du groupe auquel appartient le sujet qui recevra l’une des valeurs de la ligne du haut, et le groupe de celui qui recevra l’une des valeurs du bas. Il est demandé aux participants de choisir une seule colonne pour rémunérer les deux camarades.

Prenons un exemple : il est indiqué que la ligne du haut correspond aux récompenses potentielles pour un camarade du même groupe que le participant, et que la ligne du bas concerne ce que va recevoir un camarade de l’autre groupe. On remarquera qu’une seule colonne correspond à une récompense identique (17/17). A droite du tableau, les récompenses pour son propre groupe (ligne du haut) sont plus importantes qu’à gauche, mais on voit aussi que les récompenses de l’autre groupe (ligne du bas) dépassent celles qui reviendront à son propre groupe (par ex. 23/29). A gauche du tableau c’est l’inverse : les récompenses allant à son propre groupe sont toujours plus élevées que celles de l’autre groupe.
Les participants ont dans ce cas le choix entre deux stratégies : soit donner beaucoup à un camarade de leur propre groupe (partie droite) mais simultanément donner encore plus à un membre de l’exogroupe, soit donner moins au camarade de son propre groupe (partie gauche), mais simultanément donner encore moins au membre de l’exogroupe.
Les résultats obtenus dans cette configuration par Tajfel, indiquent que c’est la plupart du temps la deuxième stratégie qui est retenue. Autrement dit, plus que le gain absolu, les participants sont attachés à ce que les membres de leur groupe (endogroupe) reçoivent plus que ceux de l’exogroupe, même si cela implique de renoncer à une récompense dans l’absolu plus élevée.

Comment interpréter théoriquement ces résultats ? Tajfel s’appuie sur le concept d’identité sociale. Selon lui, l’individu tend à rechercher une identité sociale positive, ce qui sous-entend que son propre groupe soit valorisé. Dans la majorité des situations, la valorisation de son propre groupe passe par la comparaison sociale avec d’autres groupes. Ainsi, dans l’expérience, les participants tendaient à maximiser le résultat de cette comparaison sociale, en choisissant la solution qui accentuait la différence au profit de l’endogroupe.

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Q

Matrice de Tajfel

A

Au-delà des biais perceptifs liés aux relations intergroupes, il est possible de repérer des processus de discrimination découlant de l’appartenance groupale. Evoquer la discrimination active immédiatement dans nos esprits certains faits d’actualité : discrimination dans l’emploi, le logement, le salaire, basée sur des critères de sexe, de couleur de peau, d’âge, par exemple. Si ces cas de discrimination ont une base clairement ancrée dans les rapports sociaux dissymétriques, il est intéressant de noter que les premiers travaux ayant traité des processus engendrant la discrimination, l’endofavoritisme et l’exodéfavoritisme, ont utilisé des groupes n’ayant pas de préexistence à l’étude elle-même. C’est ce que l’on nomme le paradigme des groupes minimaux (PGM), que l’on associe généralement aux premiers travaux menés par Tajfel, Billig, Bundy et Flament (1979). Dans cette expérience, les participants étaient des élèves du secondaire, auxquels on avait, au préalable, fait réaliser une courte tâche de jugement de préférence de plusieurs tableaux abstraits de deux artistes, Klee et Kandinsky, mais sans leur donner cette information. Puis on informait chaque participant que ses réponses indiquaient qu’il préférait soit les tableaux de Klee ou de Kandinsky, et que par conséquent il appartenait à l’un ou l’autre des deux groupes d’élèves identifiés selon leurs préférences. Cependant, les noms des autres élèves composant les deux groupes n’étaient pas révélés. Puis l’expérience se poursuivait par une tâche de rétribution : à l’aide de plusieurs matrices (ou modèles de combinaisons de récompenses), les participants devaient décider des rémunérations que recevraient deux de leurs camarades. Ces camarades peuvent appartenir au même groupe ou aux deux groupes. Les participants ne savent pas à quels camarades précisément iront les récompenses : ils connaissent uniquement le groupe et le numéro de code de chacun des camarades qu’ils doivent récompenser. Les participants ne se rémunèrent jamais eux-mêmes.

Cette tâche est restée célèbre sous le nom de “matrice de Tajfel”. En voici un exemple.

Pour chaque matrice, les participants sont informés du groupe auquel appartient le sujet qui recevra l’une des valeurs de la ligne du haut, et le groupe de celui qui recevra l’une des valeurs du bas. Il est demandé aux participants de choisir une seule colonne pour rémunérer les deux camarades.

Prenons un exemple : il est indiqué que la ligne du haut correspond aux récompenses potentielles pour un camarade du même groupe que le participant, et que la ligne du bas concerne ce que va recevoir un camarade de l’autre groupe. On remarquera qu’une seule colonne correspond à une récompense identique (17/17). A droite du tableau, les récompenses pour son propre groupe (ligne du haut) sont plus importantes qu’à gauche, mais on voit aussi que les récompenses de l’autre groupe (ligne du bas) dépassent celles qui reviendront à son propre groupe (par ex. 23/29). A gauche du tableau c’est l’inverse : les récompenses allant à son propre groupe sont toujours plus élevées que celles de l’autre groupe.
Les participants ont dans ce cas le choix entre deux stratégies : soit donner beaucoup à un camarade de leur propre groupe (partie droite) mais simultanément donner encore plus à un membre de l’exogroupe, soit donner moins au camarade de son propre groupe (partie gauche), mais simultanément donner encore moins au membre de l’exogroupe.
Les résultats obtenus dans cette configuration par Tajfel, indiquent que c’est la plupart du temps la deuxième stratégie qui est retenue. Autrement dit, plus que le gain absolu, les participants sont attachés à ce que les membres de leur groupe (endogroupe) reçoivent plus que ceux de l’exogroupe, même si cela implique de renoncer à une récompense dans l’absolu plus élevée.

Comment interpréter théoriquement ces résultats ? Tajfel s’appuie sur le concept d’identité sociale. Selon lui, l’individu tend à rechercher une identité sociale positive, ce qui sous-entend que son propre groupe soit valorisé. Dans la majorité des situations, la valorisation de son propre groupe passe par la comparaison sociale avec d’autres groupes. Ainsi, dans l’expérience, les participants tendaient à maximiser le résultat de cette comparaison sociale, en choisissant la solution qui accentuait la différence au profit de l’endogroupe.

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Q

Groupes dominants et dominés

A

“Le statut social agit sur la manière dont les individus se représentent le groupe, sur la manière dont ils se conçoivent et conçoivent autrui et sur les rapports que leur groupe entretient avec d’autres groupes” (Lorenzi-Cioldi et Doise, 1994).
Une prémisse essentielle à la présentation des travaux de Lorenzi-Cioldi est la hiérarchisation sociale des groupes en interaction. Plus clairement dit : dans la grande majorité des cas, lorsque deux groupes sont en interaction, il y en a un qui est positionné plus haut que l’autre sur l’échelle sociale. On parle de groupes dominants et de groupes dominés. Cette hiérarchisation va avoir des conséquences majeures sur les processus perceptifs intergroupes. Dans l’étude des représentations sociales des groupes, Lorenzi-Cioldi va identifier deux grands prototypes majeurs : les groupes dits “agrégats”, situés au bas de l’échelle sociale, et les groupes dits “collections”, situés en haut de l’échelle sociale.
A ce stade de la réflexion, il est extrêmement important de rappeler que lorsque nous parlerons ici d’homogénéité, d’indifférenciation entre les individus, d’agrégat d’individus, ce ne sera nullement en lien avec une réalité effective, qui renverrait à des comportements et attitudes effectivement plus homogènes, mais à des perceptions sociales et des représentations portées par des individus appartenant à des groupes, à l’égard d’autres individus appartenant à d’autres groupes plus ou moins bien placés socialement qu’eux. Par exemple, le fait que le groupe des “caissières de supermarché” soit perçu socialement comme plus homogène que le groupe des “avocats d’affaires”, n’est absolument pas lié à une réalité de fait, mais à des biais perceptifs. Ce sont ces biais que nous allons présenter, et surtout pour lesquels il est nécessaire de bien comprendre quelles sont les théories explicatives concurrentes.

Il faut revenir à la citation introductive de ce chapitre, pour souligner qu’il y est question de perception intergroupes, mais aussi d’identité sociale. Dans les études menées, les individus interrogés évoquent leurs perceptions des exogroupes, mais aussi de leurs propres groupes. En analysant les réponses obtenues, on constate que dans les groupes dominants, les individus se perçoivent, et sont perçus, comme une collection d’individualités ayant chacune leur spécificité. Cela renvoie à l’idée d’un « groupe collection ». On peut dire que l’identité apparaît comme autonome, interne et se veut indifférente à l’emprise du collectif. C’est une identité sociale personnelle. Dans les groupes dominés, les individus se perçoivent, et sont perçus, comme un agrégat d’individualités relativement indifférenciées les unes des autres. On peut évoquer l’idée de « groupe agrégat », dans lequel l’identité apparaît comme hétéronome, externe, indifférenciée et profondément absorbée par le collectif. C’est une identité sociale collective.

Les résultats révèlent également une différence dans l’apparition des biais perceptifs entre groupes dominants et groupes dominés. Ainsi les membres des groupes dominants homogénéisent d’autant plus l’exogroupe qu’il s’agit d’un groupe dominé. Par contre, les membres de groupes dominés homogénéisent autant leurs propres groupes que l’exogroupe. Tout se passe comme si les membres des groupes dominés avaient intériorisé les perceptions que les membres des groupes dominants possèdent à leur égard.

Comment rendre compte théoriquement de ces résultats ? On peut distinguer les biais perceptifs attribuables au statut social de la cible (l’individu ou le groupe en question), et ceux attribuables au statut social de l’individu qui perçoit cette cible. On peut repérer deux grands courants théoriques proposant des explications : l’un portant sur les processus strictement cognitifs de perception et catégorisation, l’autre soulignant l’importance de la dynamique identitaire impliquée dans ces mêmes processus.

Dans l’approche cognitive, le statut social d’un groupe-cible détermine la façon dont on se représente sa variabilité en mémoire, ce qui influence son jugement d’homogénéité. Ainsi le groupe dominé est représenté en mémoire au niveau du prototype, en focalisant la perception sur les similarités intra-groupe, alors que le groupe dominant est représenté au niveau des exemplaires, reflétant une plus grande variabilité. Nous stockerions en mémoire un moins grand nombre d’exemplaires des membres du groupe dominé que du groupe dominant. Selon cette approche les individus dominés seraient plus familiers avec l’exogroupe dominant que l’inverse, et le percevrait donc comme étant hétérogène en vue d’une meilleure adaptation sociale (Fiske, 2000). Par ailleurs, le statut social d’un groupe peut influencer la motivation des individus à mieux connaître ses membres et à leur prêter plus d’attention (Fiske, 2000). Ainsi les individus font plus d’erreurs lorsqu’ils doivent identifier les membres d’un groupe dominé plutôt que dominant (Fiske, Haslam, & Fiske, 1991), ils catégorisent plus vite les membres d’un groupe de bas statut que les membres d’un groupe de haut statut (Zárate & Smith, 1990).

Dans l’approche identitaire, ce sont les effets du statut social du percevant dans la perception de l’homogénéité des groupes, qui sont au centre de la réflexion. Dans cette approche identitaire, la perception d’homogénéité peut dépendre de la différence de saillance entre l’identité personnelle et l’identité sociale. L’identité personnelle dérive de l’autocatégorisation au niveau interpersonnel, et se réfère aux caractéristiques qui distinguent un individu des autres membres de son groupe. L’identité sociale dérive de l’autocatégorisation au niveau intergroupe, et se réfère aux catégories auxquelles l’individu appartient. Plus l’individu s’identifie à son groupe, plus son identité sociale est saillante, et plus la perception d’homogénéité intragroupe est importante (Turner, Hogg, Oakes, Reicher & Wetherell, 1987). Dans le cas des groupes asymétriques, il se peut que les membres des groupes dominés s’identifient plus fortement à leur groupe que les membres des groupes dominants, et qu’ils perçoivent ainsi plus d’homogénéité intragroupe. Dans cette approche identitaire, la perception d’homogénéité intragroupe peut être « stratégique » et servir à améliorer ou préserver une identité sociale positive (Tajfel & Turner, 1979). D’autre part, appartenir à un groupe dominé constituerait une menace à l’identité sociale, et percevoir plus d’homogénéité au sein du groupe d’appartenance permettrait d’augmenter le sentiment de solidarité, et d’améliorer l’image du groupe. Les membres des groupes dominants percevraient leur groupe d’appartenance comme étant moins homogène que des exogroupes afin de justifier la discrimination à l’égard de ces derniers, et de garder ainsi une identité sociale positive.

27
Q

Groupes agrégats et collections

A

“Le statut social agit sur la manière dont les individus se représentent le groupe, sur la manière dont ils se conçoivent et conçoivent autrui et sur les rapports que leur groupe entretient avec d’autres groupes” (Lorenzi-Cioldi et Doise, 1994).
Une prémisse essentielle à la présentation des travaux de Lorenzi-Cioldi est la hiérarchisation sociale des groupes en interaction. Plus clairement dit : dans la grande majorité des cas, lorsque deux groupes sont en interaction, il y en a un qui est positionné plus haut que l’autre sur l’échelle sociale. On parle de groupes dominants et de groupes dominés. Cette hiérarchisation va avoir des conséquences majeures sur les processus perceptifs intergroupes. Dans l’étude des représentations sociales des groupes, Lorenzi-Cioldi va identifier deux grands prototypes majeurs : les groupes dits “agrégats”, situés au bas de l’échelle sociale, et les groupes dits “collections”, situés en haut de l’échelle sociale.
A ce stade de la réflexion, il est extrêmement important de rappeler que lorsque nous parlerons ici d’homogénéité, d’indifférenciation entre les individus, d’agrégat d’individus, ce ne sera nullement en lien avec une réalité effective, qui renverrait à des comportements et attitudes effectivement plus homogènes, mais à des perceptions sociales et des représentations portées par des individus appartenant à des groupes, à l’égard d’autres individus appartenant à d’autres groupes plus ou moins bien placés socialement qu’eux. Par exemple, le fait que le groupe des “caissières de supermarché” soit perçu socialement comme plus homogène que le groupe des “avocats d’affaires”, n’est absolument pas lié à une réalité de fait, mais à des biais perceptifs. Ce sont ces biais que nous allons présenter, et surtout pour lesquels il est nécessaire de bien comprendre quelles sont les théories explicatives concurrentes.

Il faut revenir à la citation introductive de ce chapitre, pour souligner qu’il y est question de perception intergroupes, mais aussi d’identité sociale. Dans les études menées, les individus interrogés évoquent leurs perceptions des exogroupes, mais aussi de leurs propres groupes. En analysant les réponses obtenues, on constate que dans les groupes dominants, les individus se perçoivent, et sont perçus, comme une collection d’individualités ayant chacune leur spécificité. Cela renvoie à l’idée d’un « groupe collection ». On peut dire que l’identité apparaît comme autonome, interne et se veut indifférente à l’emprise du collectif. C’est une identité sociale personnelle. Dans les groupes dominés, les individus se perçoivent, et sont perçus, comme un agrégat d’individualités relativement indifférenciées les unes des autres. On peut évoquer l’idée de « groupe agrégat », dans lequel l’identité apparaît comme hétéronome, externe, indifférenciée et profondément absorbée par le collectif. C’est une identité sociale collective.

Les résultats révèlent également une différence dans l’apparition des biais perceptifs entre groupes dominants et groupes dominés. Ainsi les membres des groupes dominants homogénéisent d’autant plus l’exogroupe qu’il s’agit d’un groupe dominé. Par contre, les membres de groupes dominés homogénéisent autant leurs propres groupes que l’exogroupe. Tout se passe comme si les membres des groupes dominés avaient intériorisé les perceptions que les membres des groupes dominants possèdent à leur égard.

Comment rendre compte théoriquement de ces résultats ? On peut distinguer les biais perceptifs attribuables au statut social de la cible (l’individu ou le groupe en question), et ceux attribuables au statut social de l’individu qui perçoit cette cible. On peut repérer deux grands courants théoriques proposant des explications : l’un portant sur les processus strictement cognitifs de perception et catégorisation, l’autre soulignant l’importance de la dynamique identitaire impliquée dans ces mêmes processus.

Dans l’approche cognitive, le statut social d’un groupe-cible détermine la façon dont on se représente sa variabilité en mémoire, ce qui influence son jugement d’homogénéité. Ainsi le groupe dominé est représenté en mémoire au niveau du prototype, en focalisant la perception sur les similarités intra-groupe, alors que le groupe dominant est représenté au niveau des exemplaires, reflétant une plus grande variabilité. Nous stockerions en mémoire un moins grand nombre d’exemplaires des membres du groupe dominé que du groupe dominant. Selon cette approche les individus dominés seraient plus familiers avec l’exogroupe dominant que l’inverse, et le percevrait donc comme étant hétérogène en vue d’une meilleure adaptation sociale (Fiske, 2000). Par ailleurs, le statut social d’un groupe peut influencer la motivation des individus à mieux connaître ses membres et à leur prêter plus d’attention (Fiske, 2000). Ainsi les individus font plus d’erreurs lorsqu’ils doivent identifier les membres d’un groupe dominé plutôt que dominant (Fiske, Haslam, & Fiske, 1991), ils catégorisent plus vite les membres d’un groupe de bas statut que les membres d’un groupe de haut statut (Zárate & Smith, 1990).

Dans l’approche identitaire, ce sont les effets du statut social du percevant dans la perception de l’homogénéité des groupes, qui sont au centre de la réflexion. Dans cette approche identitaire, la perception d’homogénéité peut dépendre de la différence de saillance entre l’identité personnelle et l’identité sociale. L’identité personnelle dérive de l’autocatégorisation au niveau interpersonnel, et se réfère aux caractéristiques qui distinguent un individu des autres membres de son groupe. L’identité sociale dérive de l’autocatégorisation au niveau intergroupe, et se réfère aux catégories auxquelles l’individu appartient. Plus l’individu s’identifie à son groupe, plus son identité sociale est saillante, et plus la perception d’homogénéité intragroupe est importante (Turner, Hogg, Oakes, Reicher & Wetherell, 1987). Dans le cas des groupes asymétriques, il se peut que les membres des groupes dominés s’identifient plus fortement à leur groupe que les membres des groupes dominants, et qu’ils perçoivent ainsi plus d’homogénéité intragroupe. Dans cette approche identitaire, la perception d’homogénéité intragroupe peut être « stratégique » et servir à améliorer ou préserver une identité sociale positive (Tajfel & Turner, 1979). D’autre part, appartenir à un groupe dominé constituerait une menace à l’identité sociale, et percevoir plus d’homogénéité au sein du groupe d’appartenance permettrait d’augmenter le sentiment de solidarité, et d’améliorer l’image du groupe. Les membres des groupes dominants percevraient leur groupe d’appartenance comme étant moins homogène que des exogroupes afin de justifier la discrimination à l’égard de ces derniers, et de garder ainsi une identité sociale positive.

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Q

Le préjugé

A

Les travaux sur le préjugé émotionnel sont basés sur la distinction entre émotion et sentiment. L’article de Leyens, Rodriguez‐Perez, Rodriguez‐Torres, Gaunt, Paladino, Vaes et Demoulin (2001) a servi de catalyseur à un courant de travaux antérieurs portant sur les discriminations inter-groupes et le rôle joué par les préjugés.
Dans cette publication, Leyens et ses collègues font la synthèse des travaux portant sur la place de l’attribution des émotions dans les rapports inter-groupes. Autrement dit : est ce que je perçois chez les membres de mon groupe les mêmes qualités psychologiques que chez les membres de l’exogroupe ? Vais-je utiliser les mêmes indicateurs (émotions et sentiments) pour évoquer mon groupe et l’exogroupe ?
On peut considérer que les émotions sont communes aux humains et à certaines espèces animales (primates, chiens…). On y retrouve la peur, la colère, la joie, la tristesse, le dégoût. Ces émotions seraient acquises et manifestées très tôt dans le développement humain individuel (Ekman, 1992). Par contraste, les sentiments seraient des expressions d’apparition plus tardive dans le développement de l’individu, et seraient associés à la complexification des interactions sociales, et de l’apprentissage des règles et normes d’interaction. Les sentiments sont considérés comme étant spécifiques à l’humain : honte, nostalgie, remords, admiration.
Les résultats de nombreuses études (à titre d’exemples : Cortes, Demoulin, Rodriguez, Rodriguez, et Leyens, 2005 ; Leyens et al., 2001) convergent vers ce que l’on peut appeler “préjugé émotionnel” : nous attribuons à l’exogroupe moins de sentiments, par rapport à l’endogroupe, et plus d’émotions “primaires” à l’exogroupe qu’à l’endogroupe. Pour simplifier : mon groupe est plus humain que l’exogroupe, car nous éprouvons des sentiments que les autres ressentent moins, ou ne ressentent pas, car “ils” sont “par nature” différents de nous, “moins humains”. Demoulin, Leyens, Rodríguez‐Torres, Rodríguez‐Pérez, Paladino, et Fiske (2005) évoquent l’infra- humanisation, comme clé d’explication théorique. Les travaux des ethnologues ont montré, depuis longtemps que, quelque soit la culture en question, les groupes humains distinguaient l’endogroupe de l’exogroupe sur un continuum allant de l’animalité à l’humanité. Bien évidemment, l’endogroupe est toujours le plus représentatif de l’humanité, alors que les exogroupes, notamment ceux avec lesquels il y a rivalité voire conflit, sont identifiés comme plus proche de l’animalité que de l’humanité. Les exemples historiques de discours idéologiques visant à déshumaniser la victime en sont une illustration évidente.
La photo présentée ci-dessous illustre les préjugés associés au morphotype.

29
Q

Le stéréotype

A

On peut emprunter à Leyens, Yzerbyt et Schadron (1996) la définition suivante du stéréotype : “Les stéréotypes sont des croyances partagées concernant les caractéristiques personnelles, généralement des traits de personnalité, mais souvent aussi des comportements, d’un groupe de personnes”.
On peut distinguer les stéréotypes portant sur son propre groupe (auto-stéréotype) et ceux portant sur l’exogroupe (hétéro-stéréotype). En règle générale, les premiers ont une connotation positive, quand les seconds sont plutôt négatifs. La littérature scientifique est en grande majorité centrée sur les hétéro-stéréotypes.

V.3.1.Quel est le contenu d’un stéréotype ?

Un stéréotype est une association de traits, caractéristiques, appliqués à l’ensemble des membres d’un groupe. Les études montrent depuis longtemps la puissance de stéréotypes liés, par exemple, au sexe, à la couleur de peau, au type d’emploi, à la nationalité. Les exemples de groupes stéréotypés ne manquent pas, et les spécialistes de la question (Fiske, Xu, Cuddy, & Glick, 1999) proposent un modèle théorique (le modèle du contenu du stéréotype, ou Stereotype content model : SCM) de la construction des stéréotypes qui serait articulé autour de deux dimensions majeures : la chaleur et la compétence. Le SCM décrit comment certaines variables sociales influencent la construction du stéréotype, et comme comment le contenu du stéréotype conduit à ressentir certaines émotions à l’égard du groupe-cible. Au coeur de ce modèle on trouve les deux dimensions citées : la chaleur et la compétence. La chaleur renvoie à la question “Quelles sont les intentions de ce groupe ?”, et la compétence renvoie à la question “Ce groupe a-t-il les moyens de réaliser ses intentions ?”. La chaleur est liée liée à la sincérité, la confiance, la convivialité ; la compétence est liée à l’efficience, la conscience, l’intelligence et l’habileté. Fiske et ses collègues (1999, 2002) ont montré que ces deux dimensions organisent le contenu de beaucoup de stéréotypes. En croisant ces deux dimensions, le SCM propose quatre prototypes de stéréotypes. Le premier groupe est caractérisé par la chaleur et la compétence ; on y retrouve les classes moyennes, blanches. Le second groupe est marqué par la froideur et l’incompétence ; il concerne les populations pauvres, les sans domicile fixe, les migrants. Le troisième groupe est marqué par la chaleur et l’incompétence ; on y retrouve les handicapés, les femmes au foyer et d’autres groupes perçus comme ayant besoin d’être encadrés de façon paternaliste. Enfin, le quatrième groupe est marqué par la froideur et la compétence ; on y trouve les riches, les gens qui ont très bien réussi). Il est important de rappeler ici que cette typologie n’est pas basée sur les caractéristiques objectives de ces groupes, mais sur le contenu des stéréotypes dont ils sont les cibles. Il est intéressant que cette classification prétend à un niveau de validité important, car ces résultats ont été observés dans plus de trente pays (Durante, Fiske, Cuddy, Kervyn, Akande, Adetoun et al., 2013).

Parallèlement à de la description du contenu de ces stéréotypes, il est primordial de s’interroger sur les causes de la construction et de la pérennisation des stéréotypes. C’est ce point que nous allons aborder maintenant.

Plusieurs hypothèses ont été formulées pour expliquer pourquoi, et comment, les stéréotypes, qui donnent une image aussi réduite et biaisée de la réalité, se propagent et se maintiennent dans les esprits. Nous allons commencer par aborder les deux principales réponses à la question : pourquoi les stéréotypes se construisent ? Quelle est leur fonction ?

V.3.2.Fonction des stéréotypes

Une première hypothèse propose que les stéréotypes ont une fonction essentiellement cognitive : ils permettraient de simplifier la perception de la réalité. Ainsi un stéréotype ne serait pas nécessairement faux, ou tout du moins certains de ces composants reflèteraient une réalité objective. Mais bien sûr, cette simplification aurait comme limite de ne représenter finalement aucun des individus du groupe stéréotypé, mais plutôt un prototype caractérisé par quelques traits majeurs qui, après analyse individuelle, ne pourront que très rarement s’appliquer simultanément à chacun de ces individus. Une conséquence de ce processus de simplification se manifesterait lors du jugement que l’on porte sur un individu du groupe-cible : on parle ici de “jugeabilité sociale.” (Schadron, 2005). La jugeabilité sociale concerne le lien entre l’individu qui porte un jugement à l’égard d’un membre d’un groupe-cible, et son propre jugement. La jugeabilité permet de déterminer les conditions qui mènent un observateur à émettre ou non un jugement concernant une autre personne. Cette approche insiste sur la distinction qu’il convient d’opérer entre le fait de disposer d’une impression, d’un jugement d’une part et la décision d’émettre ce jugement d’autre part. Elle considère en effet que les deux conditions suivantes doivent être remplies pour qu’un jugement soit exprimé : il faut que le juge dispose d’une impression, d’un contenu de jugement et il est aussi nécessaire qu’il estime que cette impression peut être émise en tant que jugement valide. Pour décider si une impression dont il dispose à l’égard d’une personne est fondée ou non, l’observateur a donc recours à une lecture largement automatique, non consciente de la situation de jugement qui le renseigne de façon indirecte sur la qualité de son jugement. Pour émettre un jugement, l’observateur social doit donc disposer de deux éléments : d’une part, du contenu d’un jugement (niveau informationnel) et d’autre part d’une estimation des paramètres de la situation de jugement qui lui permette de penser que les critères de « jugeabilité » y sont remplis (niveau méta- informationnel). Une telle méta-information peut être simplement constituée par la connaissance de la quantité d’information que le sujet sait avoir eue à sa disposition, ou par la nature de cette information, ou encore par sa source. Les études expérimentales ont notamment montré qu’une personne paraît plus facile à juger lorsqu’elle est présentée comme membre d’un groupe que si elle est définie comme individu. Les observateurs émettent alors des jugements plus extrêmes, et éprouvent une plus grande confiance dans ce jugement (Schadron et Yzerbyt, 1999). De même, un ensemble de personnes paraît plus « jugeable » et fait l’objet de jugements plus tranchés lorsqu’il est présenté comme un groupe homogène que lorsqu’il est présenté comme un simple agrégat d’individus hétérogènes (Morchain et Schadron, 1999).

La deuxième hypothèse renvoie aux relations que les groupes entretiennent entre eux. Ainsi les stéréotypes seraient une illustration de l’état des relations inter-groupes : coopération, domination, compétition. Pour être plus précis, il s’agirait d’une justification, ou rationalisation, de ces relations. Il est intéressant de noter ici que cette hypothèse sur la fonction de justification de l’état des relations inter-groupes est très proche de ce que l’on peut retrouver dans d’autres modèles théoriques (on peut penser par exemple à la Théorie de la Justification du Système). Le postulat est le suivant : les groupes sociaux occupent leurs places dans la hiérarchie sociale parce que leurs caractéristiques “intrinsèques” les conduisent “naturellement” à occuper ces places, et à avoir des attitudes et des comportements en phase avec cette “nature”. De fait, les stéréotypes vont se nourrir de la nature des relations entretenues par les groupes. Pour mettre cela en évidence, Hurtig et Pichevin (2000) se sont intéressés aux relations entre hommes et femmes. Le but de l’étude était de montrer que les jugements portés sur les individus sont plus influencés par les stéréotypes lorsqu’il s’agit de femmes que lorsqu’il s’agit d’hommes. L’expérience consistait à demander aux participants de choisir un livre qu’ils pourraient offrir à un ou une amie. Trois types de livres étaient à disposition : orientation “masculine” (par ex. policier), orientation “féminine” (par ex. Roman sentimental), et orientation non sexuée (par ex. Livre historique). Les résultats montrent que les participants choisissent beaucoup plus souvent des livres en lien avec le groupe d’appartenance lorsqu’il s’agit d’une amie, et moins lorsqu’il s’agit d’un ami. Pour résumer : les livres offerts sont plus variés lorsqu’il s’agit d’un ami, et plus “féminin” lorsqu’il s’agit d’une amie. Ce résultat est en phase avec le statut social des groupes en question : les hommes sont perçus comme dominants, et donc comme des groupes “collections” et donc une plus grande hétérogénéité, alors que les femmes, du fait de leur statut plus “dominés”, sont perçues comme composant des groupes plus “agrégats”, caractérisés par une plus forte homogénéité.

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Le préjugé émotionnel

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Les travaux sur le préjugé émotionnel sont basés sur la distinction entre émotion et sentiment. L’article de Leyens, Rodriguez‐Perez, Rodriguez‐Torres, Gaunt, Paladino, Vaes et Demoulin (2001) a servi de catalyseur à un courant de travaux antérieurs portant sur les discriminations inter-groupes et le rôle joué par les préjugés.
Dans cette publication, Leyens et ses collègues font la synthèse des travaux portant sur la place de l’attribution des émotions dans les rapports inter-groupes. Autrement dit : est ce que je perçois chez les membres de mon groupe les mêmes qualités psychologiques que chez les membres de l’exogroupe ? Vais-je utiliser les mêmes indicateurs (émotions et sentiments) pour évoquer mon groupe et l’exogroupe ?
On peut considérer que les émotions sont communes aux humains et à certaines espèces animales (primates, chiens…). On y retrouve la peur, la colère, la joie, la tristesse, le dégoût. Ces émotions seraient acquises et manifestées très tôt dans le développement humain individuel (Ekman, 1992). Par contraste, les sentiments seraient des expressions d’apparition plus tardive dans le développement de l’individu, et seraient associés à la complexification des interactions sociales, et de l’apprentissage des règles et normes d’interaction. Les sentiments sont considérés comme étant spécifiques à l’humain : honte, nostalgie, remords, admiration.
Les résultats de nombreuses études (à titre d’exemples : Cortes, Demoulin, Rodriguez, Rodriguez, et Leyens, 2005 ; Leyens et al., 2001) convergent vers ce que l’on peut appeler “préjugé émotionnel” : nous attribuons à l’exogroupe moins de sentiments, par rapport à l’endogroupe, et plus d’émotions “primaires” à l’exogroupe qu’à l’endogroupe. Pour simplifier : mon groupe est plus humain que l’exogroupe, car nous éprouvons des sentiments que les autres ressentent moins, ou ne ressentent pas, car “ils” sont “par nature” différents de nous, “moins humains”. Demoulin, Leyens, Rodríguez‐Torres, Rodríguez‐Pérez, Paladino, et Fiske (2005) évoquent l’infra- humanisation, comme clé d’explication théorique. Les travaux des ethnologues ont montré, depuis longtemps que, quelque soit la culture en question, les groupes humains distinguaient l’endogroupe de l’exogroupe sur un continuum allant de l’animalité à l’humanité. Bien évidemment, l’endogroupe est toujours le plus représentatif de l’humanité, alors que les exogroupes, notamment ceux avec lesquels il y a rivalité voire conflit, sont identifiés comme plus proche de l’animalité que de l’humanité. Les exemples historiques de discours idéologiques visant à déshumaniser la victime en sont une illustration évidente.
La photo présentée ci-dessous illustre les préjugés associés au morphotype.

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L’infra humanisation

A

Lorsque l’on s’intéresse aux mécanismes impliqués dans les rapports intergroupes, la question de la perception d’autrui est centrale. Nous avons vu plus haut la prédominance de l’exodéfavoritisme. Cette tendance à juger plus défavorablement les membres de l’autre groupe se traduit notamment par la description psychologique. Les tragiques exemples historiques en situation de conflit armé révèlent que la dégradation de l’ennemi passe d’abord par la mise en cause de son statut d’être humain. L’ennemi serait mois humain que moi. C’est ce que l’on nomme la déshumanisation. Elle emprunte des voies particulièrement avilissantes et violentes (comparer l’autre à un animal…). Mais certains auteurs en psychologie sociale (notamment Leyens) suggèrent que d’autres processus de dégradation, plus subtils, coexistent avec la déshumanisation, mais sur un mode moins violent, qu’ils appellent infra- humanisation.
Ils décrivent l’infrahumanisation comme un processus d’attitude dans lequel l’attributionde caractéristiques dépend du groupe d’appartenance des individus : les membres du groupe d’appartenance se voyant attribuer des caractéristiques typiquement humaines alors que les membres des se voient attribuer des caractéristiques moins humaines. Ainsi, l’ représente l’essence de l’humanité tandis que l’exogroupe possède des traits considérés comme “moins humains”. Dans ce processus, le rôle des émotions est central. Ainsi, l’infra-humanisation peut se traduire par l’attribution à autrui d’une moindre capacité à ressentir des émotions