Déterminants de la santé et déterminants sociaux Flashcards

1
Q

Quels sont les 12 déterminants de la santé retenus par Santé Canada?

A
  1. le niveau de revenu et le statut social;
  2. les réseaux de soutien social;
  3. l’éducation et l’alphabétisme;
  4. l’emploi et les conditions de travail;
  5. les environnements sociaux;
  6. les environnements physiques;
  7. les habitudes de santé et la capacité d’adaptation personnelles;
  8. le développement de la petite enfance;
  9. le patrimoine biologique et génétique;
  10. les services de santé;
  11. le sexe;
  12. la culture.

Plusieurs de ces déterminants sont attribuables à une répartition inégale des facteurs sociaux et économiques dans nos sociétés. Ils sont aussi tributaires d’une exposition variable aux conditions et environnements sociaux qui influent sur la santé. Ils sont alors qualifiés de déterminants sociaux de la santé.

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2
Q

Quelles sont les inégalités sociales de santé?

A

Les inégalités sociales de santé sont des écarts de santé entre différents groupes sociaux, pouvant être définis par différents critères (revenu, scolarité, emploi, sexe, origine ethnique, présence de limitations fonctionnelles, orientation sexuelle, territoire).

Les inégalités sociales de santé existent à plusieurs échelles, tant au plan mondial et national, qu’au plan régional et local.

Le concept des inégalités est neutre dans le sens qu’il décrit objectivement la réalité de la situation. Les inégalités sociales de santé sont des données et des faits mesurables. Elles s’appuient sur l’épidémiologie et les statistiques mais aussi sur la notion de parcours de vie et des indicateurs de santé.

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3
Q

Que sont les iniquité sociales de santé?

A

Les iniquités sont une incitation morale à agir. Ce sont des inégalités en santé qui entraînent des désavantages systématiques chez un groupe. On peut prévenir et corriger ces inégalités.

Les déterminants les plus marquants d’iniquités de santé au Canada sont le statut socioéconomique et l’identité autochtone.

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4
Q

Qu’est-ce que le modèle de Whitehead et Dahlgren?

A

C’est un schéma très souvent utilisé pour donner un aperçu des déterminants de santé.

Au centre du schéma se concentrent une première catégorie de déterminants, les caractéristiques individuelles telles que l’âge, le sexe et les facteurs physiques qui déterminent la santé, ainsi que les comportements et modes de vie tels que le tabagisme, les habitudes alimentaires etc.

Une deuxième catégorie est formée des interactions sociales et des interactions avec la communauté au sein de laquelle l’individu évolue. Le fait que quelqu’un soit ou non en mesure de conserver sa santé est également déterminé par les conditions de vie et de travail, qui incluent notamment l’accès à des biens et des services importants (tels que les soins de santé).

Enfin, la santé est également influencée par une troisième catégorie de déterminants que sont les conditions socioéconomiques, culturelles et environnementales générales.

Ce modèle souligne le fait que les catégories interagissent les unes avec les autres : les modes de vie individuels sont ancrés dans des normes sociales et des réseaux, ainsi que dans des conditions de vie, de travail ou de non travail, qui à leur tour sont fortement liées à l’environnement socioéconomique et culturel.

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5
Q

De quoi est constitué le triangle épidémiologique d’une maladie?

A

Selon la représentation traditionnelle que l’on applique souvent aux maladies infectieuses, une maladie survient d’une interaction complexe entre la personne (l’hôte), l’agent pathologique (le virus, la bactérie ou une substance ingérée, comme la fumée de tabac) et l’environnement.

En cas de maladie non infectieuse, on peut substituer à l’agent infectieux le facteur causal (la plaque d’athérosclérose dans une artère coronaire s’il s’agit d’un infarctus cardiaque).

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6
Q

Que sont des facteurs de risque?

A

Les facteurs de risque augmentent la probabilité statistique qu’une personne tombera malade. Certains facteurs de risque, comme ne pas porter de ceinture de sécurité en cas de collision automobile, ont un effet direct et probabiliste sur la vraisemblance d’un résultat indésirable. D’autres font partie d’un profil causal complexe, comme l’effet de l’alimentation sur la coronaropathie, où l’alimentation interagit avec beaucoup d’autres; il est alors plus pratique de résumer cette complexité par un énoncé de probabilité.

La notion de facteurs de risque suppose une relation causale, mais les associations statistiques qui identifient ces facteurs peuvent aussi comprendre des variables qui sont des marqueurs du véritable facteur de risque. L’âge en est un exemple : dans certains cas, l’âge en soi n’est pas le facteur de risque, mais les changements qu’il occasionne le sont. Dans de tels cas, les expressions « marqueur de risque » ou « indicateur de risque » peuvent s’avérer plus pertinents.

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7
Q

Comment appelle-t-on les causes mêmes des facteurs de risque?

A

On les appelle les déterminants. Pour illustrer cette distinction, la figure 2.4 se fonde sur le diagramme de l’histoire naturelle et y ajoute une temporalité antérieure afin d’incorporer les antécédents du trouble médical.

Il s’agit d’un modèle écologique : le patient se situe maintenant dans son milieu social, lequel est tout aussi pertinent avant l’apparition de la maladie que pendant qu’elle évolue et que le patient reçoit des soins (par exemple, la pauvreté aura toujours une influence sur le patient, même si on le traite).

Les déterminants de la santé désignent les caractéristiques sous-jacentes de la société qui, en dernier ressort, façonnent la santé des personnes et des communautés. On peut les définir comme les causes des causes d’une mauvaise santé ou comme des « facteurs en amont ». Attention : le terme « déterminant » ne sous-entend pas un caractère inévitable ou un déterminisme; son origine est le mot latin de termine, ou « à partir du bout » (c.-à-d., à l’origine) de la chaîne causale.

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8
Q

Quelles sont les 3 types de facteurs?

A
  1. les facteurs proximaux, comme le fait de se faire vacciner,
  2. les facteurs intermédiaires, comme l’accessibilité aux établissements locaux de soins de santé,
  3. les facteurs distaux, comme la politique gouvernementale de prestation de services d’immunisation
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9
Q

Quels sont les principaux déterminants de la santé?

A
  1. Le développement du jeune enfant
  2. Le niveau de revenus et la situation sociale
  3. Le niveau d’instruction et la littératie
  4. Les réseaux de soutien social
  5. L’emploi, les conditions de travail et la santé au travail
  6. L’environnement physique
  7. Les services de santé individuelle et publique
  8. Le sexe et le genre
  9. La culture
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10
Q

En quoi le développement du jeune enfant agit-il comme déterminant de la santé?

A

Lorsqu’un médecin traite une maladie, il intervient dans un processus qui a souvent commencé de nombreuses années plus tôt. Lorsqu’on s’interroge sur les causes, on peut choisir la perspective du parcours de vie, qui étend les origines de la maladie encore plus loin. On va même jusqu’à considérer les éléments auxquels les parents du patient ont été exposés. La perspective du parcours de vie insiste sur l’influence profondément formatrice des expériences précoces.

L’alimentation, la croissance et la forme physique pendant la petite enfance sont importantes, tout comme le développement affectif, qui peut renforcer la résilience (s’il est positif) ou augmenter la vulnérabilité (s’il est négatif).

Le moment des expositions et des expériences peut être critique. Par exemple, les expériences traumatiques de la petite enfance façonnent la personnalité et ont un effet durable sur la manière dont une personne perçoit le monde où elle vit, sur ses interactions avec son entourage et sur son interprétation des événements. Une famille désunie ou un stress chronique pendant l’enfance ont des effets non spécifiques, qui se manifestent principalement par une plus grande vulnérabilité affective à l’âge adulte.

L’identification des périodes critiques dans le développement du jeune enfant a popularisé les programmes de stimulation des nourrissons, comme Head Start.

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11
Q

En quoi le niveau de revenus et la situation sociale agissent-ils comme déterminants de la santé?

A

La situation sociale d’une personne se définit à la fois par une combinaison de sa richesse, de son niveau d’instruction, de sa profession et de son mode de vie. Dans un deuxième temps et à différents égards, elle s’explique par d’autres facteurs comme l’ethnicité, la personnalité et le hasard.

Chacun de ces éléments, seul ou combiné, peut influencer la santé d’une personne de manière positive ou négative. Peu importe le marqueur de la situation sociale (richesse, instruction, profession ou pouvoir) et l’indicateur de la santé choisi (longévité, taux de mortalité, morbidité ou détresse autodéclarée), on observe une tendance universelle : les personnes dont la situation sociale est plus élevée sont en meilleure santé. Les exceptions sont rares et souvent transitoires. On en a vu un exemple dans les années 1930 lorsque les cardiopathies étaient en hausse. De nombreux cas sont survenus chez des personnes riches qui avaient les moyens de s’alimenter en conséquence et d’adopter un mode de vie sédentaire. Toutefois, la baisse subséquente des cardiopathies a été plus prononcée chez les riches, et le gradient social familier s’est rétabli.

On a maintenant recours à l’expression inégalités sociales en santé pour définir l’association entre la situation sociale et la santé.

La plus évidente parmi ces influences est le revenu (surtout s’il est insuffisant). L’influence du revenu se fait sentir de manière relative ou absolue. La pauvreté absolue désigne un manque de ressources pour combler les besoins fondamentaux : un logement, une alimentation nutritive, des vêtements et de l’instruction. Les personnes pauvres n’ont pas suffisamment de ressources et de possibilités pour faire des choix qui favorisent la santé. Le fait d’être pauvre peut aussi exposer les gens à un environnement physique de qualité inférieure, qui peut poser des risques pour leur santé. La pauvreté absolue est le déterminant principal de la santé dans les pays à faible revenu; les nourrissons et les enfants sont particulièrement sensibles à ses effets. Dans les pays riches, cependant, les personnes très pauvres ne sont pas les seules victimes des disparités de l’état de santé.

Comme il existe un gradient de santé dans toutes les catégories de revenu, on doit utiliser le revenu relatif, et non la pauvreté absolue, pour analyser les inégalités en santé dans les pays à revenu intermédiaire ou élevé. La pauvreté relative dénote un niveau de revenus beaucoup plus faible que celui des autres groupes dans une communauté. Plus qu’un simple contraste binaire entre riches et pauvres, elle représente le gradient social.

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12
Q

En quoi le niveau d’instruction et la littératie agissent-ils comme déterminants de la santé?

A

L’instruction est l’une des nombreuses caractéristiques qui contribuent à la position sociale, et qui en découlent. La position sociale d’une personne pendant l’enfance influence son accès aux possibilités de s’instruire. Le niveau d’instruction qui en résulte influence la position sociale de diverses façons : il a un impact sur les possibilités d’emploi, le revenu, l’entourage et l’endroit du domicile.

Chacun de ces facteurs influence indirectement la santé. L’instruction a aussi une influence directe sur la santé, car elle modifie l’aptitude d’une personne à naviguer dans le système de soins de santé, à interpréter les renseignements médicaux et à communiquer efficacement avec les médecins et autres professionnels.

La « littératie en santé » désigne l’aptitude du patient à comprendre les renseignements médicaux et à suivre les consignes thérapeutiques. Les médecins doivent être conscients que beaucoup de leurs patients ne sont pas en mesure de comprendre les renseignements concernant leur santé parce qu’on les leur communique en utilisant un format qui ne convient pas à leur niveau d’instruction.

Le niveau d’instruction peut aussi être un facteur de risque pour certaines affections. La démence en est un exemple. Dans ce cas, un manque d’instruction peut mener à des professions qui exposent le travailleur à des substances neurotoxiques qui nuisent à la fonction cérébrale. Inversement, les études supérieures, et les carrières stimulantes qui s’y rattachent, peuvent établir des réseaux neuronaux complexes qui ralentissent le vieillissement du cerveau.

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13
Q

En quoi les réseaux de soutien social agissent-ils comme déterminants de la santé?

A

Le soutien social comporte plusieurs bienfaits pour la santé. Il est une source de réconfort et offre un lieu sûr où une personne peut parler de ses problèmes, ce qui l’aide à affronter l’adversité. Avec un réseau de soutien social, on trouve des renseignements et une aide pratique : on connaît toujours quelqu’un qui peut offrir de l’aide si besoin est. Un tel réseau encourage aussi les gens à adopter des comportements plus sains. Selon l’Enquête sociale générale de 2003, l’état de santé autodéclaré est positivement associé à l’existence d’un bon réseau de soutien social, à l’appartenance à des organismes, à la réciprocité (le fait de donner et de recevoir de l’aide), au bénévolat et au fait de recevoir de l’aide pour accomplir ses tâches quotidiennes.

Ces mêmes associations entre les liens sociaux et la santé sont présentes au niveau de la population : les communautés en santé se créent des réseaux de collaboration pour aborder leurs problèmes sociaux et économiques. Le capital social désigne la volonté des gens de s’unir et de s’engager dans des actions collectives, ce qui en retour renforce la confiance au sein des réseaux; les programmes de surveillance de quartier en sont un exemple.

Par contre, un faible capital social est caractérisé par un manque de volonté de collaborer avec les autres, qui sont perçus comme étant différents. Cette situation se présente généralement là où il existe des disparités importantes dans les revenus et une perception d’inégalités sociales. Selon Kawachi et al., un faible capital social est lié à un taux plus élevé de mortalité, alors que l’adhésion à des groupes sociaux est liée à un taux plus faible de mortalité, toutes causes confondues.

Selon une analyse documentaire transnationale, le capital social serait associé à de plus hauts niveaux de santé, de bien-être et de soins des enfants et à des taux de criminalité plus faibles.

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14
Q

En quoi l’emploi, les conditions de travail et la santé au travail agissent-ils comme déterminants de la santé?

A

Selon l’OMS, les pratiques équitables en matière d’emploi et un travail décent sont les pierres angulaires de la santé. L’Organisation préconise un salaire minimum juste, le plein emploi et des normes de santé et de sécurité en milieu de travail. Bien que le taux global de chômage au Canada (6,3 % en 2008) soit à envier d’un point du vue international, il existe des iniquités dans certaines régions et groupements de population (p. ex., 11,5 % des nouveaux immigrants sont chômeurs, et beaucoup d’autres sont sous-employés).

Le stress professionnel touche de nombreux Canadiens, surtout les femmes. Il coïncide avec d’autres déterminants, comme le revenu : les ménages aux revenus les plus faibles déclarent des niveaux élevés de stress professionnel en raison de la précarité et de l’insatisfaction liées au travail. Les travailleurs qui disent avoir un emploi précaire éprouvent advantage d’effets physiques et mentaux indésirables. Le stress professionnel découle de la combinaison d’exigences psychologiques élevées (comme le fait de devoir travailler rapidement) et d’un manque de liberté par rapport aux décisions relatives au travail (comme le fait d’avoir un poste de subordonné). Ce stress résulte aussi d’une disparité entre l’effort exigé et la récompense : les postes peu rémunérés qui exigent un effort important donnent lieu à un stress, ce qui mène souvent à des problèmes de santé.

Selon une étude dans le cadre de laquelle on a suivi 10 000 fonctionnaires britanniques pendant dix ans, le manque de contrôle en milieu de travail augmente le risque de maladies cardiaques subséquentes. Des tâches plus variées et un plus grand pouvoir décisionnel au travail pourraient diminuer le risque.

Les maladies professionnelles sont des troubles qui découlent des conditions de travail, généralement des expositions aux dangers physiques, chimiques et, parfois, psychologiques. Le mésothéliome qui découle d’une exposition à l’amiante en est un exemple. Il s’agit de dangers environnementaux qui surviennent de manière concentrée en milieu de travail; le traitement et la prévention de telles maladies relèvent de la médecine du travail. On distingue les maladies professionnelles des affections aggravées par le travail, dont les causes sont liées à d’autres aspects de la vie du patient, mais qui sont exacerbées par ses conditions de travail. Par exemple, une maladie cardiovasculaire ou une lombalgie peut se manifester après une période prolongée. Il est possible qu’elle se soit déclarée en l’absence d’un effort lié au travail, mais elle peut être aggravée par certains types d’emplois.

On distingue les maladies professionnelles des accidents du travail, qui résultent d’un traumatisme survenu en milieu de travail (foulure, entorse, lacération, brûlure, contusion). Les accidents du travail découlent surtout de facteurs mécaniques (lever des charges, se pencher) ou de défaillances dans les mesures de sécurité. Ils sont une source importante d’incapacité et de mortalité au Canada. En 2003, 630 000 travailleurs ont subi au moins un accident du travail limitant leur activité. Ces accidents se produisent plus souvent chez les hommes que chez les femmes (5,2 % contre 2,2 %). Plus le revenu d’un travailleur est faible, plus il est probable qu’il subisse un accident de travail.

Le domaine de la santé au travail comprend la gestion et la prévention des maladies professionnelles et des accidents du travail, ainsi que l’amélioration globale des milieux de travail. Son fondement est simple : le travail et la santé s’influencent réciproquement de manière positive ou négative. Le rôle du médecin en santé au travail est de maintenir une relation positive entre les deux.

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15
Q

En quoi l’environnement physique agit-il comme déterminant de la santé?

A

Les influences environnementales sur la santé peuvent être positives ou négatives et englober une vaste gamme de facteurs :

  • à l’échelle mondiale (changement climatique),
  • à l’échelle nationale et régionale (récessions économiques, conflit, pollution atmosphérique et des eaux),
  • à l’échelle locale dans le milieu bâti (qualité de l’air intérieur) et dans l’environnement social.

On comprend clairement les effets positifs d’un bel environnement, mais la plupart des recherches médicales portent sur les aspects négatifs de l’environnement. Les expositions aux contaminants dans l’air, l’eau, les aliments et le sol sont associées à de nombreuses maladies chroniques et à des maladies transmissibles émergentes. Le changement climatique et son cortège de températures extrêmes influent aussi sur la santé : l’hyperthermie par temps très chaud, les blessures dues aux conditions éoliennes et pluviales extrêmes, les perturbations sociales entraînées par les changements du niveau de la mer et leurs effets sur l’agriculture, et la répartition changeante des vecteurs et des agents infectieux introduisent des maladies dans des régions où elles étaient absentes auparavant.

La qualité de l’air atmosphérique est en hausse constante au Canada, bien que les habitants des centres urbains vivent encore des épisodes de mauvaise qualité de l’air. L’air intérieur peut contenir des constituants nuisibles pour la santé, comme l’amiante, les moisissures, le radon, le monoxyde de carbone et le méthane. Le « syndrome des bâtiments malsains » désigne une gamme d’affections liées au fait de vivre ou de travailler dans des bâtiments étanches où la qualité de l’air est mauvaise.

Cependant, la plus grande menace à la qualité de l’air intérieur au Canada demeure la fumée du tabac, surtout pour les enfants qui vivent avec des fumeurs. Ces enfants souffrent plus souvent d’asthme et de bronchite, présentent un risque plus élevé de mort subite du nourrisson et sont plus souvent atteints d’infections pulmonaires et d’otites que les enfants qui vivent dans des foyers où l’on ne fume pas.

La conception de l’environnement bâti influence aussi la santé. Le surpeuplement des logements et la conception urbaine (qui touche le transport et le potentiel piétonnier des quartiers) sont de plus en plus perçus comme des facteurs de risque de maladies chroniques, et surtout d’affections respiratoires. À mesure que les gens s’éloignent des centres-villes, ils doivent conduire davantage, ce qui augmente les collisions et favorise « les taux de maladies cardiaques et respiratoires, l’obésité, et le stress découlant des déplacements quotidiens où le trafic est intense et des augmentations des niveaux de bruit. » Dans les régions rurales, notamment, où la voiture personnelle est le seul moyen de transport et où la marche et le vélo ne sont pas pratiques (et même souvent dangereux en raison des conditions routières), l’obésité est plus élevée qu’en milieu urbain, et les accidents de la route sont fréquents.

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16
Q

En quoi les services de santé individuelle et publique agissent-ils comme déterminants de la santé?

A

Les percées dans les soins de santé ont entraîné des avantages énormes pour la santé et la longévité dans les pays développés et dans de nombreux pays en voie de développement. L’invention des antibiotiques, l’antisepsie, les chirurgies salvatrices et les nouveaux produits pharmaceutiques ont révolutionné la prise en charge d’une vaste gamme de maladies.

À l’échelle de la population, les interventions de santé publique (assainissement, lutte contre les maladies transmissibles, etc.) et la prévention des maladies (immunisation, lutte antitabac et dépistage) ont beaucoup contribué à améliorer la survie et la santé. Les mesures relativement simples, comme la protection des sources d’eau, ont souvent le plus d’impact sur l’état général de santé. Un exemple bien connu est la baisse de la tuberculose en Angleterre et au pays de Galles.

Comme l’illustre la figure 2.6, la mortalité liée à la tuberculose était en baisse depuis au moins 100 ans avant l’introduction d’un traitement efficace pour les cas individuels; cette baisse initiale découlait de mesures non spécifiques, comme l’amélioration des logements et de la nutrition, et de mesures législatives, comme l’interdiction de cracher dans les lieux publics, qui ont réduit la transmission de la maladie. Des baisses semblables sont survenues dans l’histoire de la poliomyélite, de la variole et de la coqueluche, lesquelles ont répondu de manière spectaculaire aux améliorations de l’hygiène, bien avant la découverte de traitements médicaux efficaces.

Tous les citoyens profitent des interventions de santé publique qui améliorent la qualité de l’air et de l’eau, mais les bienfaits des soins médicaux individuels sont répartis moins également. À peu près quatre millions de Canadiens n’ont pas accès à un médecin de famille. Malgré les soins de santé universellement assurés, l’accès aux médicaments, à la médecine dentaire, et aux soins et au soutien à domicile varie considérablement en fonction du revenu, du lieu de résidence, voire même de l’ethnicité. Les cabinets de praticiens ont tendance à ouvrir dans les quartiers les plus riches, où la valeur des propriétés est stable et où la qualité de vie attirera davantage d’employés, mais où le besoin est moins grand.

La capacité de tirer parti des programmes de promotion de la santé et de prévention est influencée par les niveaux de revenus et d’instruction : il est moins probable que l’on construise des établissements qui jouent un rôle dans la promotion de la santé, comme les centres de culture physique, dans des quartiers où habitent des personnes à faibles revenus ou des immigrants.

Même en l’absence d’obstacles financiers à l’accès aux soins, nous courons le risque de perpétuer les inégalités en santé si nos programmes ne sont pas accessibles en raison de leur emplacement ou parce que les bénéficiaires ne se sentent pas à l’aise de se présenter aux établissements. Notons que les établissements de soins de santé sont généralement situés dans des endroits plus facilement accessibles aux personnes riches vivant en milieu urbain. De nombreux services spécialisés au Canada sont maintenant régionalisés, ce qui gêne l’accès des personnes à faibles revenus vivant dans les quartiers ruraux.

Il faut mettre sur pied des cliniques qui simplifient l’accès des groupes défavorisés : des cliniques pour les personnes de la rue, les travailleurs du sexe et les toxicomanes; des cliniques de planification familiale pour les adolescentes; et des cliniques où le personnel parle des langues minoritaires et où il est sensible aux réalités culturelles.

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17
Q

En quoi le sexe et le genre agissent-ils comme déterminants de la santé?

A

Le sexe désigne l’identité biologique, le fait d’être un homme ou une femme. À l’heure actuelle, les femmes au Canada vivent en moyenne plus longtemps que les hommes. Les différences biologiques entre les sexes, ainsi que les contrastes dans la répartition d’autres déterminants de la santé (mode de vie, statut et accès aux services) contribuent à cet écart. Les premières sont des différences entre les sexes, tandis que les deuxièmes sont des différences entre les genres. Ces deux types de différences peuvent exercer une force opposée.

Surtout en raison du mouvement féministe, on a porté une attention particulière aux disparités de genre. Elles surviennent dans toutes les sociétés, touchent au pouvoir, à la liberté, aux ressources et aux valeurs, et peuvent avoir des répercussions sur la santé. Comme les disparités sont générées socialement, on pourrait, en principe, les corriger. Certains des exemples les plus frappants sont l’exploitation des femmes dans l’industrie du sexe, les mariages de femmes mineures ou les conditions de travail dans les ateliers clandestins de l’industrie du vêtement.

Dans les pays développés, il existe souvent des iniquités du revenu liées au genre; les femmes (à l’extérieur de l’industrie agricole) gagnent environ 20 % de moins que les hommes. Comme les parents seuls sont presque toujours des femmes, le revenu inférieur des femmes concerne aussi leurs enfants.

Les iniquités liées au genre ne résultent pas uniquement des disparités du revenu; le genre est aussi associé à l’accès différentiel aux services de santé, aux obligations inégales de s’acquitter des tâches familiales non rémunérées et aux disparités dans la nutrition. Des iniquités liées au genre existent également dans la recherche sur la santé : par le passé, il était plus probable que les études évaluant divers médicaments aient recours à des sujets expérimentaux de sexe masculin. L’interaction entre les facteurs liés au sexe et au genre et les résultats cliniques des maladies cardiovasculaires chez les femmes est toujours un domaine de recherche important. Par exemple, les femmes ne présentent pas une maladie cardiaque de la même façon que les hommes et sont moins susceptibles de recevoir un bon diagnostic et un traitement en temps opportun. En outre, les bienfaits de nombreuses interventions varient entre les hommes et les femmes.

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18
Q

En quoi la culture agit-elle comme déterminant de la santé?

A

« La culture est un système d’idées, de valeurs et de métaphores que l’on utilise ou que l’on incarne de manière consciente ou subconsciente dans la vie de tous les jours. Il ne s’agit pas d’un strict ensemble de traits comportementaux, mais d’un système fluide et adaptatif d’attribution de sens. »

L’origine culturelle d’une personne influence grandement ses croyances, ses comportements, ses perceptions, ses émotions, son langage, son alimentation, son image corporelle et ses attitudes quant à la maladie, à la douleur et au malheur. Tous ces éléments peuvent influencer la santé et le recours aux soins de santé. La culture « explique ce que l’on doit savoir et faire pour fonctionner dans une certaine société. »

La science est universelle, mais l’accès à la science et à ses interprétations varie en fonction de la culture. Le savoir acquis est influencé par notre culture, ce qui détermine, par exemple, les sujets que nous étudions et les livres que nous lisons à l’école. En outre, en l’absence de savoir, ce sont souvent les croyances culturelles qui l’emportent. Personne ne sait ce qui arrive après la mort, mais toutes les cultures adoptent des rituels caractéristiques face à la mort, fondés sur leurs croyances. La culture sous-tend aussi les valeurs, lesquelles sont des croyances profondes qui définissent ce qui est souhaitable et moral. Les valeurs influencent les attentes comportementales, comme la manière dont les actions d’un médecin sont perçues par le patient. Les interventions qui visent à appuyer les comportements sains sont plus efficaces lorsqu’elles tiennent compte de la culture de la population cible et que la communauté contribue activement à la conception et à la mise en uvre de l’intervention.

Cependant, bien que les cultures soient partagées, les personnes de même culture sont loin de former un groupe homogène. Il faut éviter le piège de présumer que toutes les personnes d’une certaine culture vivent selon les mêmes normes et valeurs ou réagiront de la même manière aux idées et aux connaissances nouvelles. On peut éviter certaines erreurs en veillant à considérer la culture comme une influence sur le comportement dans chaque contexte, plutôt qu’en général.

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19
Q

Que sont des comportements “liés à la maladie”?

A

L’expression « comportement lié à la maladie » désigne les actions d’une personne en réponse à une morbidité ressentie, y compris le fait de chercher ou non à recevoir des soins de santé et de suivre ou non les recommandations d’un médecin.

En 1951, le sociologue américain Talcott Parsons a décrit le « rôle de malade » comme une attitude socialement définie à l’égard de la maladie qui permet à une personne ayant reçu un diagnostic de se défaire de ses rôles sociaux normaux. Cependant, en retour, la personne malade est tenue d’essayer de retrouver la santé, en allant chercher des soins médicaux compétents et en suivant les recommandations du médecin. La décision d’un patient de consulter un médecin est souvent appelée « demande de soins ». La demande peut chevaucher le besoin de soins, mais s’en distingue d’un point de vue conceptuel. Il arrive que des patients demandent des soins sans en avoir un besoin précis (notamment si le besoin est défini selon le modèle biomédical de la maladie). Inversement, les patients nécessitant des soins pourraient ne pas chercher à en obtenir.

20
Q

Qu’est-ce que le Modèle des croyances relatives à la santé?

A

Le Modèle des croyances relatives à la santé a d’abord été proposé par G.M. Hochbaum en 1958 pour tenter d’expliquer la participation aux programmes de dépistage de la tuberculose. Il présente trois éléments qui peuvent déterminer si une personne suivra ou non la recommandation d’un médecin et modifiera son comportement (en entamant un programme d’activité physique, en cessant de fumer, etc.) :

  1. La personne ressent-elle le besoin d’agir?
    • Cet élément est influencé par le degré auquel elle se croit susceptible à la maladie en question et par la gravité perçue de la maladie.
  2. La personne croit-elle que l’action recommandée est efficace?
    • Préviendra-t-elle la maladie ou en réduira-t-elle la gravité? Y a-t-il des coûts ou des limites sur le plan psychologique, financier ou autre, liés à l’action proposée?
  3. Un certain signal doit également déclencher un véritable changement dans le comportement. Ce peut être un signal interne (l’apparition de symptômes) ou externe (un ami qui tombe malade).
21
Q

Qu’est-ce que la Théorie du comportement planifié?

A

Pendant les années 1980, une analyse approfondie des comportements liés à la santé a donné lieu à la Théorie du comportement planifié (TCP) d’Ajzen. Elle se fonde sur une perspective cognitive, ce qui veut dire qu’elle prend pour acquis que les comportements liés à la santé peuvent être analysés en fonction d’une planification rationnelle.

La TCP tient compte des idées du Modèle des croyances relatives à la santé, mais considère aussi le contexte social, en ajoutant l’effet des « normes subjectives » (les pressions sociales perçues qui portent à agir d’une certaine façon). Ces dernières englobent les croyances du patient quant à la manière dont ses comportements actuels et proposés sont perçus par les autres et la valeur accordée par le patient aux opinions de son groupe de référence.

Le troisième élément de la TCP porte sur le contrôle comportemental perçu par le patient, c’est-à-dire s’il se sent capable de concrétiser le changement proposé. Ce contrôle découle de ses perceptions des obstacles à l’action et de l’assurance de pouvoir les surmonter. Cette notion se rapproche de l’auto-efficacité.

22
Q

Quels sont les « déterminants sociaux de la santé »?

A
23
Q

Décrivez les voies par lesquelles les déterminants sociaux influent sur la santé d’une population.

A
24
Q

Que signifie l’expression « iniquités en santé »?

A
25
Q

Illustrez par des exemples comment le genre peut occasionner des iniquités en santé.

A
26
Q

En tant que médecin, que pouvez-vous faire pour contrer les iniquités en santé?

A
27
Q

À quelle étape du parcours de vie le praticien de santé publique devrait-il intervenir pour prévenir le plus de maladies possible?

A
28
Q

Que sait-on au niveau des inégalités de santé d’origine sociale?

A

Les personnes situées au bas de l’échelle sociale sont au moins deux fois plus exposées au risque de maladie grave ou de décès prématuré que ceux qui se trouvent près du sommet de l’échelle. Mais ces effets ne se limitent pas aux pauvres : les inégalités de santé d’origine sociale sont observées dans l’ensemble de la société.

Ainsi, même dans la classe moyenne, les employés de bureau subalternes sont plus victimes de maladies et de décès prématurés que leurs collègues investis de responsabilités plus importantes (fig. 1).

Ces disparités sont notamment le résultat de facteurs matériels et psychosociaux, dont les effets se manifestent dans la plupart des maladies et des causes de décès.

Une situation défavorisée peut avoir un caractère absolu ou relatif et revêtir des formes multiples :

  • modicité du patrimoine familial,
  • instruction médiocre au cours de l’adolescence,
  • précarité de l’emploi,
  • impossibilité de renoncer à un emploi dangereux ou sans avenir,
  • mauvaises conditions de logement,
  • circonstances rendant difficile l’éducation des enfants,
  • perception d’une pension de retraite insuffisante.

Ces problèmes ont tendance à toucher les mêmes personnes et leurs effets sur la santé s’accumulent avec le temps. Plus les gens vivent longtemps dans des conditions économiques et sociales stressantes, plus l’usure physiologique est grande et moins ils ont de chances de vivre une vieillesse en bonne santé.

29
Q

Quelles sont les actions générales qu’on peut faire pour aider aux inégalités sociales?

A

La vie comporte bon nombre de transitions critiques :

  • les changements affectifs et matériels de la petite enfance,
  • le passage de l’école primaire au collège,
  • le premier emploi,
  • le départ de la maison familiale,
  • la fondation d’un foyer,
  • le changement d’emploi,
  • la perspective d’un licenciement possible,
  • la prise de la retraite.

La santé peut être affectée par chacune de ces transitions selon qu’elles se déroulent dans des conditions plus ou moins favorables. À chaque période de changement, les personnes qui ont connu des conditions difficiles dans le passé sont les plus exposées.

Les politiques sociales doivent par conséquent comprendre, outre les filets de protection traditionnels, des tremplins pour compenser les désavantages antérieurs.

Pour améliorer la santé, il faut réduire les taux d’échec scolaire, l’insécurité et le chômage, et améliorer l’habitat. Les sociétés qui permettent à tous leurs citoyens de jouer un rôle utile dans la vie sociale, économique et culturelle sont dans une meilleure situation sanitaire que celles qui se caractérisent par l’insécurité, l’exclusion et la pauvreté.

30
Q

Comment le stress peut-il être une inégalité sociale?

A

Le stress est source d’inquiétude et d’anxiété, et nous empêche de faire face aux problèmes de l’existence. Il nuit à la santé et peut être à l’origine d’un décès prématuré.

Des difficultés d’ordre social et psychologique peuvent provoquer un stress continu. L’anxiété, un sentiment de vulnérabilité, une mauvaise opinion de soi-même, la solitude ou une maîtrise insuffisante de sa vie professionnelle ou familiale peuvent, à la longue, retentir considérablement sur la santé.

Ces facteurs psychosociaux ont des effets cumulatifs avec le temps et augmentent le risque de dégradation de la santé mentale et de décès prématuré. De longues périodes marquées par l’anxiété, un sentiment de vulnérabilité et l’absence d’amis sur qui on peut compter ont des effets néfastes. Dans les sociétés industrialisées, plus on descend dans l’échelle sociale, plus les problèmes de ce type sont fréquents.

Comment ces facteurs psychosociaux affectent-ils la santé physique ? Dans une situation critique, nos hormones et notre système nerveux nous préparent à faire face à un danger physique immédiat en provoquant une réaction de lutte ou de fuite :

  • augmentation de la fréquence cardiaque,
  • mobilisation de la réserve d’énergie,
  • déviation du flux sanguin vers les muscles,
  • augmentation de la vigilance.

Bien que les situations de stress dans la vie urbaine actuelle exigent rarement une activité physique intense ou même modérée, le stress mobilise l’énergie et les ressources normalement utilisées dans un grand nombre de processus physiologiques importants pour la conservation de la santé à long terme.

Les systèmes cardiovasculaire et immunitaire sont tous deux affectés. Si ces périodes de tension sont brèves, les effets restent insignifiants. Cependant, si l’on est tendu trop souvent ou si la tension se prolonge excessivement, ces systèmes deviennent plus vulnérables à toute une série de problèmes de santé, dont des infections, le diabète, l’hypertension, les crises cardiaques, les accidents vasculaires cérébraux, la dépression et l’agressivité.

31
Q

Que peut-on faire pour diminuer le stress dans notre société?

A

Bien qu’il soit possible de tenter de maîtriser les modifications biologiques induites par le stress à l’aide de médicaments, il vaut mieux agir préventivement en s’attaquant aux principales causes du stress chronique.

  1. À l’école, sur le lieu de travail et ailleurs, la qualité de l’environnement social et la sécurité matérielle sont souvent aussi importantes pour la santé que l’environnement physique. Les cadres favorisant un sentiment d’appartenance, de participation et de valorisation de l’individu sont plus propices à la santé que ceux dans lesquels on se sent exclu, ignoré et exploité.
  2. Il faut que les pouvoirs publics soient conscients que les programmes sociaux doivent prendre en compte les besoins tant psychosociaux que matériels, les deux étant sources d’anxiété et d’insécurité. En particulier, ils doivent:
    • épauler les familles comptant de jeunes enfants,
    • soutenir les activités associatives,
    • combattre l’isolement,
    • réduire la précarité matérielle et financière,
    • par l’éducation et la réinsertion, promouvoir les capacités à affronter les problèmes de l’existence.
32
Q

Comment la petite enfance peut-elle être une inégalité sociale?

A

Pour un bon départ dans la vie, un accompagnement de la mère et du jeune enfant est indispensable : les premières phases du développement et de l’éducation influencent la santé de l’individu sa vie durant.

Les études d’observation et d’intervention démontrent que les fondements de la santé de l’adulte s’établissent dans la période prénatale et la petite enfance. Une croissance insuffisante ou une carence affective pendant cette période augmentent le risque d’une santé physique déficiente et réduit les capacités physiques, intellectuelles et affectives au cours de la vie adulte.

Un mauvais départ dans la vie et une croissance insuffisante laissent une empreinte biologique durable pendant la phase de développement. C’est au cours des premières années que s’acquiert le capital biologique et humain qui détermine la santé de l’individu pendant toute sa vie.

Une grossesse menée dans des conditions défavorables peut nuire au développement du foetus, qui pâtit des problèmes de la femme enceinte :

  • déséquilibre nutritionnel,
  • stress,
  • tabagisme,
  • toxicomanie ou alcoolisme,
  • manque d’exercice physique,
  • insuffisance des soins prénatals.

Un mauvais développement foetal peut s’avérer néfaste à long terme pour la santé de l’individu (fig. 2).

En raison de la malléabilité des systèmes biologiques, la petite enfance joue un rôle important dans la santé de l’individu lors des phases ultérieures de sa vie. Comme le cerveau réagit aux informations cognitives, émotionnelles et sensorielles, un attachement affectif déficient et le manque de stimulation peuvent limiter les capacités scolaires et le niveau d’instruction, provoquer des problèmes de comportement et, le cas échéant, entraîner une marginalisation sociale à l’âge adulte.

L’adoption d’un mode de vie sain (alimentation équilibrée, exercice physique, abstinence tabagique, etc.) est directement liée à l’exemple que l’on a reçu de ses parents ou de ses pairs et à un bon niveau d’instruction. Une croissance physique lente ou retardée lors de la petite enfance entrave le développement cardiovasculaire, respiratoire, pancréatique et rénal, ce qui accroît le risque de maladie à l’âge adulte.

33
Q

Que peut-on faire pour contrer cette inégalité au courant de la petite enfance?

A

Les risques sont bien plus importants lorsque l’enfant vit dans un cadre socioéconomique défavorable. La meilleure façon de les limiter est de dispenser de meilleurs soins préventifs (avant la première grossesse ainsi qu’aux mères et aux nourrissons dans des centres de soins prénatals, postnatals, pédiatriques et scolaires) et d’améliorer le niveau d’instruction des parents et des enfants.

Ces programmes de santé et d’éducation ont des avantages immédiats. Ils sensibilisent davantage les parents aux besoins de leurs enfants et les rendent plus réceptifs aux informations relatives à la santé et au développement, tout en accroissant leur confiance en leur propre efficacité.

Les politiques d’amélioration de la santé dans la petite enfance devraient viser :

  1. à accroître le niveau général d’instruction et à assurer l’égalité des chances en matière d’instruction dans le but d’améliorer la santé des mères et de leurs enfants à long terme ;
  2. à assurer une bonne alimentation et une éducation sanitaire bien conçue, à mettre en place des services de santé et de soins préventifs de qualité, et à mobiliser des ressources sociales et économiques adéquates avant la première grossesse, durant la grossesse et dans la petite enfance
    • ces mesures devront favoriser la croissance et le développement avant la naissance et au cours de la petite enfance, tout en réduisant les risques de maladie et de malnutrition chez le nourrisson
  3. à favoriser des relations harmonieuses entre les parents et leurs enfants depuis la naissance, idéalement en organisant des visites à domicile et en encourageant les parents à établir de bonnes relations avec les établissements scolaires ; cela permet d’aider les parents à mieux connaître les besoins affectifs et cognitifs des enfants, stimule le développement cognitif et le comportement social de l’enfant et prévient la maltraitance.
34
Q

Une autre inégalité sociale est due à l’exclusion sociale. Qu’est-ce que l’exclusion sociale?

A

La vie est courte quand elle est de piètre qualité. En provoquant souffrances et amertume, la pauvreté, l’exclusion sociale et la discrimination entraînent des décès prématurés.

La misère, la pauvreté relative et l’exclusion sociale ont un impact majeur sur la santé et la mort précoce. En outre, certains groupes sociaux courent beaucoup plus de risques de vivre dans la pauvreté.

La pauvreté absolue – à savoir le manque de biens matériels essentiels à la vie – continue d’exister, même dans les pays les plus riches d’Europe. Les chômeurs, un grand nombre de groupes ethniques minoritaires, les travailleurs immigrés, les handicapés et les sans-abri sont particulièrement exposés à cet égard. Les sans-abri connaissent le taux le plus élevé de décès prématuré.

La pauvreté relative est le fait d’être beaucoup plus pauvre que la plupart des autres membres de la société. Selon une définition souvent utilisée, elle correspond à des ressources inférieures à 60 % du revenu national médian. Elle empêche d’avoir accès à un logement décent, à l’instruction, aux transports et à d’autres ressources essentielles.

L’exclusion sociale et l’injustice nuisent à la santé et font courir des risques élevés de mort prématurée. Les tensions engendrées par la pauvreté sont particulièrement néfastes pour les femmes enceintes, les bébés, les enfants et les personnes âgées. Dans certains pays, pas moins d’un quart de la population totale – proportion qui est encore plus élevée en ce qui concerne les enfants – vit dans un état de pauvreté relative (fig. 3).

L’exclusion sociale trouve également son origine dans le racisme, la discrimination, la déconsidération, l’hostilité et le chômage. Ces facteurs empêchent de bénéficier de l’instruction, d’activités de formation, de services et de la vie civique. Ils ont un effet négatif sur les plans social et psychologique, engendrent des coûts matériels et sont nocifs pour la santé. Les personnes qui vivent (ou ont vécu) dans des collectivités telles que des prisons, des maisons d’enfants et des hôpitaux psychiatriques sont particulièrement vulnérables.

Plus on vit dans des conditions défavorables, plus on risque de souffrir de problèmes de santé, notamment de maladies cardiovasculaires. Comme la pauvreté est aussi un phénomène épisodique, le nombre de personnes ayant connu la pauvreté et l’exclusion sociale au cours de leur existence est largement supérieur au nombre actuel d’exclus. La pauvreté et l’exclusion sociale sont à la fois les causes et les effets d’un accroissement des risques de divorce, de séparation, d’invalidité, de maladies, de toxicomanies et d’isolement social. Elles créent des cercles vicieux qui ne font que dégrader davantage la situation.

Outre les effets directs de la pauvreté, il peut aussi être néfaste pour la santé de vivre dans un quartier miséreux caractérisé par un chômage élevé, de mauvaises conditions de logement, des services insuffisants et un environnement défavorable.

35
Q

Que peut-on faire pour contrer l’isolement social?

A

Par le biais de leurs politiques en matière de fiscalité, d’avantages sociaux, d’emploi, d’enseignement, de gestion de l’économie, etc., les pouvoirs publics influent considérablement sur la répartition du revenu. En égard aux effets incontestables de leurs politiques sur les taux de mortalité et de morbidité, ils ont donc le devoir d’éliminer la pauvreté absolue et de réduire les inégalités matérielles.

  1. Tous les citoyens doivent bénéficier d’un revenu minimum garanti, d’une législation sur le salaire minimum, et d’un accès aux services.
  2. Il faut prendre des mesures en vue de réduire la pauvreté et l’exclusion sociale au niveau de l’individu et dans les quartiers.
  3. La législation peut contribuer à la protection des minorités et des groupes vulnérables contre la discrimination et l’exclusion sociale.
  4. Les politiques de santé publique devraient lever les obstacles à l’accès aux soins de santé, aux services sociaux et aux logements économiquement accessibles.
  5. Les politiques du marché de l’emploi, de l’enseignement et de la protection des familles devraient viser à réduire la stratification sociale.
36
Q

Le travail engendre aussi une inégalité sociale. Comment?

A

Le stress au travail augmente le risque de maladies. Les personnes qui maîtrisent leur cadre de travail sont en meilleure santé que les autres.

De manière générale, il vaut mieux pour la santé de travailler. Cependant, l’organisation sociale du travail, le mode de gestion et les relations sociales sur le lieu de travail ont un impact sur la santé.

Il a été démontré que le stress au travail est une composante importante des grandes différences concernant l’état de santé, le nombre d’arrêts maladie et la mortalité prématurée observées entre les diverses couches sociales. Plusieurs études européennes réalisées dans ce domaine montrent qu’il est préjudiciable pour la santé de ne pas pouvoir utiliser ses compétences et de ne disposer que d’un pouvoir limité de décision.

Un faible niveau d’autonomie dans son travail est fortement associé à un risque élevé de douleurs lombaires, d’arrêt maladie et de maladie cardiovasculaire (fig. 4). Ces risques pour la santé sont indépendants des caractéristiques psychologiques des personnes étudiées. En bref, ils semblent liés à l’environnement professionnel.

Des études ont également été menées sur l’effet de la charge de travail. Certaines révèlent une relation entre charge de travail et autonomie. Le risque est en effet élevé pour les postes où la charge de travail est importante et le niveau d’autonomie faible. Certains résultats suggèrent que la qualité des relations sociales dans le milieu de travail pourrait jouer un rôle protecteur.

De plus, il a été constaté qu’une valorisation inadéquate pour les efforts fournis au travail était associée à un risque élevé de maladie cardiovasculaire. Cette valorisation peut se manifester sur le plan financier, par la considération dont l’intéressé jouit ou par des satisfactions d’amour-propre. Les perspectives de carrière peuvent changer sous l’effet de l’évolution actuelle du marché du travail, de sorte qu’il peut devenir plus difficile de voir ses efforts récompensés.

L’environnement psychosocial au travail constitue donc un déterminant important de la santé et contribue aux disparités de santé observées entre les catégories sociales.

37
Q

Que peut-on faire pour contrer les inégalités sociales au travail?

A

Ce n’est pas en sacrifiant la santé qu’on peut améliorer la productivité. Au contraire, il est possible de créer un « cercle vertueux » :

  • l’amélioration des conditions de travail améliore la santé des individus, ce qui a pour conséquence d’accroître la productivité et d’instaurer ainsi des conditions de travail encore plus propices à la santé et à la productivité.

Une participation au processus de prise de décisions a de grandes chances d’être bénéfique aux salariés à tous les niveaux de l’entreprise. Il faut donc mettre en place des mécanismes grâce auxquels les salariés peuvent jouer un rôle dans l’organisation et l’amélioration de leur cadre de travail, ce qui leur permet d’être plus autonomes, d’accomplir des tâches plus variées et de s’épanouir dans leur vie professionnelle.

Une valorisation adéquate de l’ensemble des employés – sur le plan financier, de la considération et de satisfactions d’amour propre – doit s’inscrire dans les bonnes pratiques de gestion de l’entreprise.

Afin de réduire l’incidence des troubles de l’appareil locomoteur, il faut aménager les lieux de travail de façon ergonomique.

La protection de la santé sur le lieu de travail doit être servie non seulement par une infrastructure efficace soumise à une réglementation prévoyant des inspections, mais également par un personnel formé à la détection précoce des maladies mentales et capable d’intervenir de façon appropriée.

38
Q

Comment le chômage peut-il être une autre source d’inégalité sociale?

A

La sécurité de l’emploi est bonne pour la santé, le bien-être et la satisfaction professionnelle. Un taux de chômage élevé va de pair avec une incidence importante de maladies et de décès prématurés.

Le chômage nuit à la santé et ses méfaits sont d’autant plus grands que le taux de chômage d’une région est élevé. Des études menées dans plusieurs pays ont démontré que les demandeurs d’emploi et leur famille courent un risque sensiblement plus élevé de décès prématuré. Les effets du chômage sur la santé sont liés à ses conséquences tant psychologiques que financières, en particulier l’endettement.

Les effets commencent à se manifester dès que le travailleur pense que son emploi est menacé. En d’autres termes, l’anxiété suscitée par l’insécurité professionnelle est aussi nuisible à la santé. La précarité de l’emploi influe sur la santé mentale (en particulier, l’anxiété et la dépression). On se sent souffrant et l’on est davantage exposé aux maladies cardiaques ainsi qu’à leurs facteurs de risque. Comme la précarité de l’emploi ou une forte insatisfaction professionnelle peuvent être aussi néfastes que le chômage, le simple fait d’avoir du travail ne suffit pas à protéger la santé physique ou mentale : la qualité de l’emploi est également importante (fig. 5).

Au cours des années 90, l’évolution de l’économie et du marché du travail d’un grand nombre de pays industrialisés a exacerbé le sentiment de précarité de l’emploi, une situation qui, à la longue, contribue à un état de stress chronique d’autant plus dommageable qu’il se prolonge. Ce stress augmente l’absentéisme et le recours aux services de santé.

39
Q

Comment peut-on faire pour contrer l’inégalité sociale causée par le chômage?

A

La politique mise en oeuvre doit viser les trois objectifs suivants :

  1. prévenir le chômage et la précarité du travail ;
  2. atténuer les difficultés liées à la condition de chômeur ;
  3. rétablir la sécurité de l’emploi.

L’atténuation des fluctuations des cycles économiques par les pouvoirs publics peut contribuer à améliorer la sécurité de l’emploi et à réduire le chômage.

La limitation du temps de travail peut également être bénéfique si elle va de pair avec la sécurité de l’emploi et la satisfaction professionnelle.

Un système éducatif performant et de bons programmes de recyclage jouent un rôle important dans la préparation des individus aux emplois disponibles.

Pour ceux qui n’ont pas d’emploi, il est probable que l’octroi d’indemnités de chômage représentant une proportion plus élevée du montant des salaires a un effet protecteur.

Enfin, les sociétés de crédit mutuel peuvent jouer un rôle bénéfique en diminuant les dettes et en renforçant les réseaux sociaux.

40
Q

Comment le soutien social peut-il être source d’inégalité sociale?

A

L’amitié, de bonnes relations sociales et de solides réseaux d’entraide améliorent la santé à la maison, au travail et dans le cadre de vie.

Un soutien social et de bonnes relations interpersonnelles ont des effets positifs sur la santé. Le soutien social contribue à donner aux individus les ressources affectives et pratiques dont ils ont besoin. L’appartenance à un réseau de relations et de soutien mutuel donne le sentiment d’être reconnu, aimé et apprécié, ce qui a un effet particulièrement protecteur sur la santé. Le soutien social peut également favoriser l’adoption d’un comportement plus sain.

Le soutien social agit aux niveaux de l’individu et de la société. L’isolement et l’exclusion sont associés à des taux élevés de décès prématurés et à une diminution des chances de survie après une crise cardiaque (fi g. 6). Les personnes qui ne reçoivent qu’un faible soutien social et affectif jouissent généralement d’un bien-être moindre.

Elles sont aussi plus exposées à la dépression et aux complications lors d’une grossesse, et risquent davantage d’être handicapées à la suite de maladies chroniques. Qui plus est, la mauvaise qualité des relations avec les proches peut affecter la santé mentale et physique.

L’intensité de ce soutien affectif et pratique varie selon le niveau social et économique. La pauvreté peut contribuer à l’exclusion et à la solitude.

La cohésion sociale – à savoir la qualité des relations sociales et l’existence d’une confiance, d’obligations réciproques et d’un respect mutuel au sein d’une communauté et dans la société en général – contribue à protéger les individus et leur santé. L’inégalité nuit aux bonnes relations sociales. Dans les sociétés où les disparités de revenus sont importantes, la cohésion sociale a tendance à être plus faible et la criminalité violente, plus répandue. Un soutien mutuel intense est bénéfique pour la santé, alors que la détérioration des relations sociales, parfois due à une inégalité particulièrement prononcée, réduit la confiance et augmente la violence.

Une étude menée au sein d’une localité caractérisée par une forte cohésion sociale a permis de démontrer que les taux de maladie coronarienne, au départ peu élevés, augmentaient lorsque la cohésion sociale baissait.

41
Q

Que peut-on faire pour contrer l’inégalité par rapport au soutien social?

A

Il ressort d’études expérimentales que l’existence de bonnes relations sociales peut réduire les réactions physiologiques au stress. Des études d’intervention ont montré qu’un soutien social pouvait accroître le taux de guérison de maladies diverses et favoriser le bon déroulement d’une grossesse chez les femmes vulnérables.

  • La réduction des inégalités sociales et économiques et la lutte contre l’exclusion peuvent renforcer la cohésion sociale et améliorer la santé.
  • L’amélioration de l’environnement social dans les écoles, au travail et dans la société en général aide les gens à se sentir valorisés et aidés dans davantage de circonstances. Leur santé, et notamment leur santé mentale, s’en trouve améliorée.
  • La mise en place d’infrastructures locales favorisant les réunions et les interactions est susceptible d’améliorer la santé mentale.
  • Dans tous les domaines de la vie personnelle et sociale, les pratiques qui classent certains comme « socialement inférieurs ou moins importants » doivent être proscrites car elles constituent des facteurs de division.
42
Q

Une autre inégalité sociale est due aux dépendances. Pourquoi?

A

Certaines personnes se réfugient dans l’alcool, la drogue et le tabac et en subissent les conséquences. Or la consommation de ces produits dépend du contexte social au sens large.

La toxicomanie est une réaction face à de graves problèmes sociaux et contribue beaucoup à accroître les inégalités de santé qui résultent de ceux-ci. La drogue offre le mirage d’une échappatoire à l’adversité et au stress, mais ne fait qu’empirer la situation.

L’alcoolisme, la consommation de drogues illicites et le tabagisme sont étroitement associés à des indicateurs de situation défavorisée sur les plans économique et social (fi g. 7). Dans certains des pays en transition d’Europe centrale et orientale, par exemple, des bouleversements sociaux se sont produits au cours de la décennie écoulée. De ce fait, le nombre des décès liés à la consommation d’alcool (accidents, actes de violence, intoxications, traumatismes et suicides) a très nettement augmenté. L’association entre alcoolisme et mort violente existe dans d’autres pays également.

La relation de cause à effet est sans doute à double sens. On se réfugie dans l’alcool pour échapper aux dures réalités économiques et sociales, et l’alcoolisme conduit à la déchéance sociale. Hélas, après le soulagement temporaire qu’il procure, l’alcool renforce les causes qui ont incité l’intéressé à commencer à boire.

Cela vaut également pour le tabagisme. Les difficultés sociales – mauvaises conditions de logement, modicité des revenus, situation monoparentale, chômage ou absence de domicile fixe – vont de pair avec des taux élevés de tabagisme et des taux très faibles de sevrage tabagique. Le tabagisme prélève un tribut important sur les revenus des plus démunis, nuit gravement à la santé et provoque un grand nombre de décès prématurés. Or la nicotine ne réduit pas véritablement le stress, pas plus qu’elle n’améliore l’humeur.

La consommation d’alcool, le tabagisme et la toxicomanie sont en outre encouragés par les campagnes publicitaires et de promotion agressives menées par les grandes sociétés multinationales et par la criminalité organisée. Leurs activités constituent un obstacle de taille aux initiatives visant à réduire la consommation chez les jeunes. En outre, leur complicité tacite dans les activités de contrebande, notamment dans le cas du tabac, entrave les efforts déployés par les pouvoirs publics en vue de limiter la consommation par le biais des prix.

43
Q

Que peut-on faire pour contrer les inégalités sociales liées aux dépendances?

A

Pour lutter contre la toxicomanie (drogues légales ou illicites), il faut non seulement offrir soutien et soins aux personnes en état de dépendance, mais aussi s’attaquer aux difficultés sociales qui constituent la cause profonde de ce problème.

La disponibilité de ces produits doit être réglementée par une politique des prix et d’octroi de licences. Il importe également:

  • d’informer le public au sujet des modes de consommation moins néfastes,
  • de recourir à l’éducation sanitaire afin de dissuader les jeunes de consommer des substances nocives
  • d’offrir des traitements efficaces aux personnes dépendantes.

Aucune de ces mesures n’est efficace si les facteurs sociaux qui sont à l’origine de la dépendance restent inchangés. On ne peut montrer du doigt le seul consommateur, car cela reviendrait à rejeter la responsabilité sur la victime au lieu de s’attaquer aux circonstances sociales complexes qui engendrent la dépendance. Une politique efficace de lutte contre les substances toxiques doit donc s’inscrire dans le cadre général de la politique économique et sociale.

44
Q

Pourquoi l’alimentation fait-elle aussi partie des inégalités sociales?

A

Comme l’approvisionnement alimentaire est tributaire des marchés mondiaux, la garantie d’une alimentation saine est une question politique.

Un régime alimentaire équilibré et un approvisionnement suffisant en denrées alimentaires sont essentiels pour la santé et le bienêtre. Les pénuries alimentaires et une alimentation peu variée engendrent la malnutrition et des maladies carentielles. L’excès de nourriture (une autre forme de malnutrition) contribue à l’apparition de maladies cardiovasculaires, du diabète, du cancer, de maladies dégénératives de l’oeil, de l’obésité et de caries dentaires. En matière d’aliments, l’insuffisance côtoie l’abondance.

Le véritable problème de santé publique réside dans la disponibilité et le coût d’aliments sains et nourrissants (fig. 8). La possibilité de se procurer des aliments sains et bon marché a des effets plus importants sur les habitudes alimentaires que les efforts d’éducation pour la santé.

La croissance économique et l’amélioration des conditions de logement et de l’assainissement sont à l’origine de la transition épidémiologique : les maladies infectieuses ont régressé et les maladies chroniques ont progressé (en particulier les affections cardiaques, les accidents vasculaires cérébraux et les cancers). Ce phénomène s’est accompagné d’une transition nutritionnelle : en Europe occidentale, notamment, une surconsommation de graisses et de sucres à teneur élevée en énergie a entraîné une progression de l’obésité. Dans le même temps, l’obésité est devenue plus courante chez les pauvres que chez les riches.

Le marché mondial de l’alimentation est devenu un gros enjeu économique. L’Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce et la Politique agricole commune de l’Union européenne permettent aux forces du marché mondial de déterminer les approvisionnements alimentaires. Des instances internationales telles que la Commission du Codex Alimentarius, qui fixent les normes de qualité et de sécurité sanitaire des aliments, n’ont pas de défenseurs de la santé publique en leur sein, alors que les entreprises du secteur alimentaire sont puissantes. La production alimentaire locale peut être plus viable et plus accessible, et elle soutient l’économie locale.

Les conditions économiques et sociales créent des disparités d’ordre social dans la qualité de l’alimentation, ce qui contribue à accentuer les inégalités de santé. La principale différence entre classes sociales réside dans les sources de nutriments. Dans un grand nombre de pays, les pauvres remplacent les aliments frais par des produits transformés bon marché. Néanmoins, on retrouve souvent des régimes riches en graisses dans tous les groupes sociaux. Les personnes disposant de revenus peu élevés (jeunes ménages, personnes âgées, chômeurs, etc.) sont les moins à même de bien s’alimenter.

Pour la prévention des maladies chroniques, il faut consommer davantage de légumes et fruits frais, de légumineuses et de féculents peu transformés, mais moins de graisses animales, de sucres raffinés et de sel. Plus de 100 comités d’experts se sont accordés sur ces objectifs diététiques.

45
Q

Que peut-on faire pour diminuer les inégalités sociales liées à l’alimentation?

A

Les organismes publics locaux, nationaux et internationaux, les organisations non gouvernementales et l’industrie agroalimentaire devraient assurer :

  1. la prise en compte de considérations de santé publique dans le domaine alimentaire, pour que tous, notamment les populations vulnérables, puissent se procurer des aliments nutritifs et frais à un prix abordable ;
  2. un processus démocratique, transparent et responsable de prise de décisions pour l’ensemble des questions relatives aux dispositions réglementaires sur les aliments, avec la participation de toutes les parties prenantes, y compris les consommateurs ;
  3. la promotion de méthodes de production agroalimentaire viables préservant les ressources naturelles et l’environnement ;
  4. une sensibilisation aux vertus d’une alimentation saine, notamment par le biais des programmes scolaires, en diffusant des informations sur l’alimentation et la nutrition, les bonnes pratiques culinaires, la production d’aliments et les bienfaits sociaux de la préparation d’un repas convivial ;
  5. la disponibilité d’informations utiles concernant les aliments, la diététique et la santé, ciblant notamment les enfants ;
  6. l’utilisation de références nutritionnelles scientifiquement incontestables et de recommandations diététiques pour faciliter l’élaboration et l’application de politiques en matière d’alimentation et de nutrition.
46
Q

Comment les transports peuvent-ils mener à une inégalité sociale?

A

Une politique des transports soucieuse de la santé décourage le recours à l’automobile et favorise la marche à pied et le vélo, tout en améliorant les transports en commun.

La bicyclette, la marche et l’utilisation des transports en commun améliorent la santé de quatre façons :

  1. elles favorisent l’exercice,
  2. font baisser le nombre d’accidents mortels,
  3. augmentent les contacts sociaux,
  4. réduisent la pollution atmosphérique.

Comme la mécanisation a permis de limiter les travaux manuels et domestiques, et a contribué à l’épidémie croissante d’obésité, il faut trouver de nouvelles façons de faire de l’exercice physique.

La politique des transports peut donc jouer un rôle crucial dans la lutte contre un mode de vie sédentaire en décourageant l’utilisation de la voiture, en favorisant le recours à la marche et au vélo et en améliorant les transports en commun. La pratique régulière d’une activité physique protège des maladies cardiaques et, en limitant l’obésité, prévient le diabète. Elle procure une sensation de bien-être et protège les personnes âgées de la dépression.

Une réduction de la circulation routière diminuerait aussi le nombre de décès et de traumatismes graves consécutifs aux accidents de la route. Bien que les accidents de voiture causent également des lésions corporelles chez les cyclistes et les piétons, les accidents de vélo ne blessent qu’un nombre relativement peu élevé de personnes. Des aménagements urbains bien planifiés, séparant cyclistes et piétons des voitures, augmentent la sécurité des premiers.

Contrairement à l’utilisation de la voiture, qui isole les gens, la marche à pied, le vélo et les transports en commun stimulent les contacts sociaux. La circulation routière divise artificiellement les quartiers et sépare les deux côtés d’une même rue. À cause de la diminution du nombre de piétons, la rue perd son rôle d’espace social et le piéton isolé craint d’être agressé. Qui plus est, les banlieues accessibles uniquement aux voitures tendent à isoler les personnes non motorisées, en particulier les jeunes et les personnes âgées. L’isolement et le manque de contacts sociaux sont fortement associés à une santé déficiente.

À une réduction du trafic correspond une diminution de la pollution liée aux gaz d’échappement. La marche et la bicyclette réduisent la consommation d’énergies non renouvelables et ne contribuent pas au réchauffement de la planète. Elles n’engendrent pas de pollution atmosphérique, sont peu bruyantes et représentent des modes de déplacement de choix dans les villes denses du futur.

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Q

Que peut-on faire pour contrer l’inégalité sociale causée par les transports?

A

Le XXIe siècle doit être marqué par une réduction de la dépendance vis-à-vis de la voiture. Malgré leurs effets néfastes sur la santé, le nombre de déplacements en voiture augmente rapidement dans tous les pays européens, alors que les déplacements à pied ou à vélo diminuent (fig. 9).

Les politiques nationales et locales doivent inverser cette tendance, malgré la forte pression des nombreux secteurs (pétrole, caoutchouc, aménagement des routes, construction, vente et réparation de voitures, publicité) qui profitent de l’utilisation de la voiture.

  • La voiture devrait laisser la place à la bicyclette et à la marche pour les déplacements courts, surtout dans les villes.
  • Les transports publics devraient être améliorés pour les déplacements plus longs, avec des liaisons régulières et fréquentes dans les zones rurales.
  • Les incitations doivent changer ; par exemple, il faut réduire les subventions de l’État pour la construction de routes, augmenter le soutien financier aux transports en commun, créer une taxe qui pénaliserait l’utilisation professionnelle de la voiture, et augmenter le coût du stationnement ainsi que les amendes en cas d’infraction.
  • Des modifications de l’aménagement du territoire sont également nécessaires :
    • conversion des routes en espaces verts,
    • diminution des superficies de parking,
    • réservation de certaines voies aux piétons et cyclistes,
    • multiplication des couloirs d’autobus et des pistes cyclables,
    • arrêt de la croissance des banlieues à faible densité et de la construction de supermarchés en dehors des villes, une situation qui favorise le recours à l’automobile.
  • De plus en plus, l’expérience prouve que la construction de routes encourage l’usage de la voiture, alors que les restrictions imposées à la circulation peuvent, paradoxalement, réduire les embouteillages.