Cours 3 Flashcards
(5 cards)
Expliquer ce qu’est un concept, sa réification, sa conceptualisation et son
opérationnalisation.
En science, et tout particulièrement en criminologie, nous ne travaillons pas directement avec le réel brut, mais avec des représentations du réel. Et c’est là qu’interviennent les concepts.
🔹 Qu’est-ce qu’un concept ?
Un concept est une construction mentale. Il sert à organiser, nommer et structurer les phénomènes sociaux que nous observons.
👉 Exemple simple : “chaise”. Vous imaginez tous un objet pour s’asseoir, mais vos images diffèrent : chaise pliante, fauteuil, tabouret… Le mot désigne une idée générale, pas un objet précis.
En criminologie, des concepts comme violence, criminalité, délinquance, pauvreté sont essentiels — mais ils sont souvent flous s’ils ne sont pas rigoureusement définis.
🔹 La réification : un piège intellectuel
La réification, du latin res (chose), désigne le fait de traiter un concept abstrait comme une chose réelle et concrète.
👉 Exemple : “la criminalité”. On parle d’elle comme si elle existait indépendamment, comme une force autonome. Mais en réalité, ce mot désigne un ensemble d’actes sociaux définis comme illégaux. Il ne s’agit pas d’un “monstre” réel qui plane au-dessus de nous.
La réification est dangereuse car elle fige la pensée. Elle transforme un outil d’analyse en entité autonome, faussant les politiques et les diagnostics.
🔹 La conceptualisation : donner un sens précis au concept
La conceptualisation consiste à définir clairement ce que l’on entend par un concept.
👉 Exemple : Le mot “violence”. Dans le langage courant, il évoque des coups. Mais en criminologie, il peut aussi inclure la violence psychologique, structurelle ou symbolique.
Conceptualiser, c’est donc :
* Clarifier un mot pour éviter les malentendus ;
* Délimiter ses dimensions (ex. : physique, psychologique, institutionnelle) ;
* Le rendre utile à la recherche.
🔹 L’opérationnalisation : rendre le concept mesurable
Une fois conceptualisé, le concept doit être transformé en indicateurs concrets pour pouvoir être étudié.
C’est ce qu’on appelle l’opérationnalisation. Cela passe par plusieurs étapes :
1. Définition du concept → Ex. : La récidive = fait de commettre une nouvelle infraction après une condamnation.
2. Choix des indicateurs → Ex. : nombre d’arrestations, délai entre les délits.
3. Développement d’un outil de mesure → Ex. : questionnaire, base de données policière, observation.
4. Vérification de la fiabilité et validité des mesures.
👉 Exemple concret : La pauvreté peut être définie comme “un revenu inférieur à 60 % du revenu médian”. C’est une opérationnalisation spécifique de ce concept général.
Conclusion
Les concepts sont les briques fondamentales de toute recherche. Mais pour qu’ils soient utiles, ils doivent être définis (conceptualisation), mesurés (opérationnalisation), et débarrassés de leur illusion de réalité (réification).
En criminologie, cette rigueur est cruciale pour éviter les erreurs d’interprétation — et pour produire des savoirs clairs, comparables et exploitables.
Merci de votre attention.
Expliquez et exemplifier les notion de causalités et de corrélations
L’une des erreurs les plus fréquentes — dans les médias, dans la politique, mais aussi parfois en science — est de confondre la corrélation et la causalité.
Et pourtant, distinguer ces deux notions est fondamental en criminologie.
🔹 Corrélation : un lien statistique
La corrélation désigne une relation entre deux variables. Si l’une change, l’autre change aussi — dans le même sens (corrélation positive), ou dans le sens inverse (corrélation négative).
👉 Exemple : On observe que dans certains quartiers, plus le nombre de caméras de surveillance augmente, plus le nombre d’arrestations augmente.
Ces deux variables sont corrélées, mais cela ne veut pas dire que l’une cause l’autre. Peut-être y a-t-il plus de policiers dans les quartiers à risque, ou que les caméras permettent simplement de détecter plus d’infractions.
Une corrélation peut être :
* Réelle mais non causale,
* Causale dans un autre sens (B cause A),
* Ou encore liée à une variable tierce (C cause A et B).
🔹 Causalité : un lien de cause à effet
La causalité implique qu’une variable influence directement une autre.
👉 Exemple : Un programme de réinsertion diminue effectivement la récidive. Ici, on a une relation causale : le programme cause la baisse du comportement criminel.
Mais pour établir une causalité, il ne suffit pas d’observer un lien. Il faut démontrer trois conditions :
1. Temporalité : la cause précède l’effet.
→ Un jeune doit avoir abandonné l’école avant de devenir délinquant, pas après.
2. Lien statistique : les deux variables sont associées.
→ Plus le taux d’abandon scolaire est élevé, plus le taux de criminalité l’est aussi.
3. Absence d’explication alternative : on doit éliminer les causes concurrentes.
→ Ce n’est pas la pauvreté (variable tierce) qui cause à la fois l’abandon scolaire et la délinquance.
C’est pourquoi les études expérimentales ou quasi-expérimentales sont si précieuses : elles permettent de tester des relations causales en contrôlant les autres facteurs.
🔹 Un exemple classique d’erreur : “Le nombre de piscines et le taux de noyade”
On peut observer que les régions avec le plus de piscines ont plus de noyades. Mais les piscines ne causent pas les noyades : ce sont l’exposition, le climat, et la fréquentation qui jouent. Ce lien est corrélé, pas causal.
Conclusion
En criminologie, confondre corrélation et causalité peut mener à de fausses politiques publiques. Ce n’est pas parce que deux phénomènes sont liés qu’il faut en conclure à une cause directe.
Notre rôle en tant que chercheurs est de distinguer rigoureusement les simples associations des liens explicatifs réels. La crédibilité de la discipline en dépend.
Expliquer ce qu’est une variable, la différence entre variable indépendante et dépendante et quelles sont les relations possibles entre les variables.
Dans toute recherche scientifique — et tout particulièrement en criminologie — les variables sont les éléments clés qui nous permettent d’observer, de mesurer et de comprendre les phénomènes sociaux.
🔹 Qu’est-ce qu’une variable ?
Une variable est tout simplement une caractéristique mesurable qui peut prendre différentes valeurs.
👉 Exemples de variables en criminologie : âge, niveau d’éducation, nombre d’arrestations, type de délit, sentiment de sécurité.
Contrairement à une constante, une variable varie d’un individu à l’autre, d’une situation à l’autre.
🔹 Variable indépendante vs. variable dépendante
C’est une distinction essentielle dans la formulation d’une relation causale.
* Variable indépendante (VI) : c’est la cause présumée, celle qui influence une autre variable.
* Variable dépendante (VD) : c’est l’effet supposé, celle qui est influencée.
👉 Exemple :
Si l’on veut étudier si le niveau de scolarité influence la récidive criminelle :
* La scolarité est la variable indépendante ;
* La récidive est la variable dépendante.
Autrement dit : VI → VD (la flèche va de la cause vers l’effet).
🔹 Relations possibles entre les variables
1. Relation positive (corrélation directe)
Les deux variables évoluent dans le même sens.
👉 Exemple : Plus le stress augmente, plus les comportements agressifs augmentent.
2. Relation négative (corrélation inverse)
Les variables évoluent en sens contraire.
👉 Exemple : Plus le niveau d’éducation augmente, moins la récidive est fréquente.
3. Relation nulle
Il n’y a aucun lien observable.
👉 Exemple : Le nombre de tatouages et la propension à voler un vélo (sauf si culturellement lié).
4. Relation faussement apparente (effet d’une variable tierce)
Deux variables semblent liées, mais sont en réalité influencées par une troisième variable.
👉 Exemple : La pauvreté pourrait expliquer à la fois le faible niveau scolaire (VI1) et la délinquance (VD).
🔹 Variables intermédiaires et modératrices
Dans des modèles plus complexes, d’autres types de variables apparaissent :
* Variable médiatrice (ou intermédiaire) : elle explique comment ou pourquoi la VI affecte la VD.
👉 Ex. : Le rejet scolaire pourrait être le mécanisme par lequel le faible niveau scolaire mène à la délinquance.
* Variable modératrice : elle influence l’intensité ou la direction de la relation entre VI et VD.
👉 Ex. : Le sexe pourrait moduler l’effet de la pauvreté sur le passage à l’acte délinquant.
Conclusion
Les variables sont les briques de base de l’analyse scientifique. Comprendre leur nature et leurs relations permet de formuler des hypothèses solides, de construire des modèles explicatifs, et surtout, d’éviter les erreurs d’interprétation.
En criminologie, cela nous permet de passer du constat à la compréhension, et de concevoir des interventions fondées sur des preuves mesurables.
Décrire les attributs et les types des échelles de mesure.
En recherche scientifique — et notamment en criminologie — il ne suffit pas de poser les bonnes questions. Il faut aussi mesurer les bonnes réponses, et surtout, le faire avec rigueur et cohérence. C’est là que les échelles de mesure entrent en jeu.
🔹 Pourquoi parle-t-on d’”échelle” ?
Parce qu’on transforme des phénomènes qualitatifs ou quantitatifs en valeurs chiffrées ou en catégories ordonnées, de manière à pouvoir les analyser. Mais attention : toutes les échelles ne se valent pas. Elles offrent des niveaux de précision différents.
Les 4 types classiques d’échelles de mesure
- Échelle nominale
C’est l’échelle la plus simple. Elle sert à classer sans ordre.- Les valeurs sont des catégories distinctes, mais aucune n’est supérieure à une autre.
- 👉 Exemple : sexe (homme/femme/autre), type de délit (vol, agression, fraude).
On peut calculer des fréquences, mais pas de moyenne.
- Échelle ordinale
Elle permet de classer selon un ordre, mais sans précision sur les écarts entre les rangs.- 👉 Exemple : satisfaction (faible / moyenne / forte), niveau de dangerosité (bas / moyen / élevé).
On peut dire qu’un élément est supérieur à un autre, mais pas combien.
- 👉 Exemple : satisfaction (faible / moyenne / forte), niveau de dangerosité (bas / moyen / élevé).
- Échelle d’intervalle
Les valeurs sont ordonnées et les écarts sont égaux, mais il n’y a pas de zéro absolu.- 👉 Exemple : température en Celsius.
Cela permet des opérations arithmétiques comme la moyenne, mais pas de proportion (on ne peut pas dire qu’un individu à 20 °C est “deux fois plus chaud” qu’un autre à 10 °C).
- 👉 Exemple : température en Celsius.
- Échelle de rapport (ou de proportion)
C’est l’échelle la plus précise. Elle a toutes les caractéristiques précédentes avec un zéro absolu.- 👉 Exemple : revenu, âge, nombre d’infractions.
On peut tout faire : moyennes, écarts, pourcentages, comparaisons de ratios.
→ Un individu de 20 ans est bien “deux fois plus vieux” qu’un enfant de 10 ans.
- 👉 Exemple : revenu, âge, nombre d’infractions.
🔹 Les attributs fondamentaux d’une échelle
Pour être fiable, une échelle doit être :
1. Valide : elle mesure bien ce qu’elle prétend mesurer.
👉 Un test de “stress” qui mesure en réalité la colère n’est pas valide.
2. Fiable : elle donne les mêmes résultats dans les mêmes conditions.
👉 Un questionnaire doit produire des réponses stables s’il est répété.
3. Sensée (pertinente) : elle doit être appropriée au contexte de la recherche.
🔹 En criminologie, bien choisir l’échelle est essentiel
* Pour coder des types de délits, on utilisera une échelle nominale.
* Pour classer des niveaux de risque de récidive, une échelle ordinale.
* Pour mesurer l’âge moyen des contrevenants, une échelle de rapport.
Mauvais choix = données inexploitables = résultats trompeurs.
Conclusion
Choisir la bonne échelle de mesure, c’est garantir la qualité des données, et donc, la crédibilité des conclusions. Une mesure imprécise, c’est comme une boussole déréglée : elle nous mène dans la mauvaise direction, même avec la meilleure intention du monde.
Expliquer les concepts de prévalence, incidence et diversité de la
délinquance.
Lorsqu’on cherche à mesurer la délinquance, il ne suffit pas de compter les délits. Il faut aussi comprendre la dynamique de ces comportements dans le temps et dans l’espace. Pour cela, trois notions sont essentielles : prévalence, incidence et diversité de la délinquance.
🔹 1. La prévalence de la délinquance
La prévalence désigne le nombre de personnes qui ont commis au moins un acte délinquant dans une période donnée, au sein d’une population donnée.
👉 Exemple : Sur une population de 1 000 adolescents, si 150 ont commis un vol au cours de l’année, la prévalence du vol est de 15 %.
Elle permet de répondre à la question :
“Combien de personnes sont concernées ?”
Cela peut concerner la délinquance en général, ou un type spécifique d’acte (vol, agression, vandalisme…).
La prévalence est un indicateur de diffusion du phénomène.
🔹 2. L’incidence de la délinquance
L’incidence, quant à elle, mesure le nombre total d’actes délinquants commis pendant la même période.
👉 Exemple : Si les 150 adolescents ont commis en tout 450 vols, alors l’incidence est de 450 actes.
Elle répond à la question :
“Combien d’actes ont été commis au total ?”
L’incidence reflète donc l’intensité ou la fréquence du phénomène.
Un même taux de prévalence peut cacher des incidences très différentes :
* Si chacun a volé une fois, incidence = 150.
* Si chacun a volé trois fois, incidence = 450.
🔹 3. La diversité de la délinquance
La diversité fait référence à la variété des types d’infractions commises par une même personne ou dans une population.
👉 Exemple : Un jeune qui commet un vol, un acte de vandalisme et une agression présente une plus grande diversité que celui qui ne fait que répéter le même acte.
Cela permet d’évaluer :
* Le profil des délinquants : polyvalents ou spécialisés.
* Le niveau de gravité ou de progression possible dans la carrière délinquante.
La diversité est souvent utilisée dans les études longitudinales sur la trajectoire criminelle des individus.
🔍 Pourquoi ces distinctions sont-elles importantes ?
Parce qu’elles permettent de nuancer notre compréhension du phénomène criminel :
* Deux quartiers peuvent avoir la même prévalence, mais des incidences très différentes.
* Deux individus peuvent avoir la même fréquence d’actes, mais une diversité criminelle très différente.
Et donc, des stratégies d’intervention différentes :
→ Un jeune qui expérimente différents types d’infractions n’est pas forcément le même profil qu’un autre qui répète compulsivement un seul acte.
Conclusion
Prévalence, incidence, diversité : trois indicateurs complémentaires, indispensables pour une analyse fine, rigoureuse et opérationnelle de la délinquance. Sans eux, on risque de sous-estimer ou de mal interpréter les dynamiques criminelles.
En criminologie, mesurer mieux, c’est intervenir mieux.