ExG11- Régulation de la Traduction Flashcards
(5 cards)
I. Régulation de la traduction chez les procaryotes
Chez les procaryotes, la régulation de la traduction est étroitement liée à la régulation de la transcription, souvent organisée au sein d’opérons, et peut aussi se faire par des mécanismes spécifiques affectant l’initiation de la traduction.
A. Exemple de l’opéron tryptophane
L’opéron tryptophane chez les bactéries est un modèle classique de régulation de la synthèse protéique en fonction de la disponibilité d’un acide aminé, ici le tryptophane (Trp). Cet opéron comprend cinq gènes codant pour des enzymes nécessaires à la synthèse du tryptophane.
- Régulation négative par le répresseur (apo-répresseur)
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Mécanisme :
En absence de tryptophane, le répresseur est sous forme apo-répresseur, c’est-à-dire inactif et incapable de se fixer à l’opérateur pour bloquer la transcription. Ainsi, la transcription des gènes de synthèse du tryptophane est activée (“transcription ON”).
En présence de tryptophane, celui-ci agit comme co-répresseur en se liant au répresseur, ce qui active ce dernier. Le répresseur activé peut alors se fixer sur l’opérateur de l’opéron tryptophane, bloquant la transcription (“transcription OFF”).
Ce mécanisme permet une régulation négative classique où la présence du produit final (tryptophane) inhibe la synthèse des enzymes qui le produisent [[373]].
- Régulation par atténuation (arrêt prématuré de la transcription)
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Mécanisme d’atténuation :
L’atténuation est un mécanisme qui couple la traduction et la transcription chez les procaryotes, permettant un arrêt prématuré de la transcription selon la disponibilité du tryptophane.
Dans cet opéron, le leader (une courte région en amont des gènes codants) contient des codons pour le tryptophane.- Si les ARNt chargés en tryptophane sont disponibles (en présence de tryptophane), le ribosome peut traduire rapidement cette région leader sans s’arrêter, ce qui favorise la formation d’une structure secondaire dans l’ARNm (terminateur) qui provoque l’arrêt prématuré de la transcription.
- Si les ARNt chargés en tryptophane ne sont pas disponibles (absence de tryptophane), le ribosome se bloque sur les codons Trp du peptide leader. Cela empêche la formation de la structure terminatrice, permettant ainsi la transcription complète des gènes de synthèse du tryptophane.
Ainsi, la traduction contrôle la transcription par ce mécanisme d’atténuation qui ajuste finement la production des enzymes en fonction des besoins en tryptophane [[374], [375]].
B. Inhibition de la traduction par fixation de protéines sur l’extrémité 5’UTR
Ce mécanisme concerne l’inhibition directe de la traduction par interaction de protéines avec la région 5’ non traduite (5’UTR) de l’ARNm.
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Exemple chez E. coli :
Certaines protéines ribosomales régulent leur propre synthèse en se liant à leur ARNm au niveau de la région 5’UTR, spécifiquement sur le site de liaison du ribosome (RBS, contenant la séquence Shine-Dalgarno).
Cette fixation empêche la liaison du ribosome à l’ARNm, inhibant ainsi la traduction de ces protéines.
Ce contrôle en “trans” permet une régulation précise de la quantité de protéines ribosomales produites en fonction des besoins cellulaires [[377]].
Résumé
Chez les procaryotes, la régulation de la traduction est souvent étroitement liée à la régulation de la transcription, comme dans l’opéron tryptophane où le répresseur et le mécanisme d’atténuation ajustent la production des enzymes selon la disponibilité en tryptophane. Par ailleurs, des mécanismes plus directs existent, comme l’inhibition de la traduction par fixation de protéines sur la région 5’UTR des ARNm, empêchant la liaison du ribosome et donc la synthèse protéique.
Cette organisation permet aux procaryotes d’adapter rapidement et efficacement la synthèse protéique à leurs conditions environnementales [[371-377]].
II. Régulation de la traduction chez les eucaryotes
A. Régulation globale via les facteurs de traduction
La traduction chez les eucaryotes est principalement régulée au niveau de l’initiation, qui est un point clé pour contrôler la synthèse protéique en réponse aux signaux cellulaires.
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Rôle de la kinase mTOR (mammalian Target Of Rapamycin)
- mTOR est une sérine/thréonine kinase hautement conservée, qui forme deux complexes : mTORC1 et mTORC2. Le complexe mTORC1 est particulièrement impliqué dans la régulation de la traduction.
- mTORC1 active la traduction en phosphorylant plusieurs cibles, notamment les protéines 4E-BP (eIF4E-binding proteins) et la kinase p70S6K.
- Phosphorylation de 4E-BP : En l’état non phosphorylé, 4E-BP se lie à eIF4E (facteur d’initiation qui reconnaît la coiffe 5’ des ARNm) et empêche son action. La phosphorylation de 4E-BP par mTOR empêche cette liaison, libérant eIF4E pour qu’il puisse initier la traduction.
- Activation directe de eIF4E : eIF4E est aussi phosphorylé au niveau de la sérine 209 par les kinases MNK1 et MNK2 (qui sont des kinases intégratrices du signal MAPK). Cette phosphorylation augmente l’affinité de eIF4E pour la coiffe des ARNm, favorisant ainsi l’initiation de la traduction.
- Implication dans le cancer : La surexpression de eIF4E est fréquemment observée dans divers cancers, car elle favorise la traduction de protéines impliquées dans la prolifération cellulaire (comme Myc, cycline D1, VEGF). Cette surexpression peut être un facteur oncogénique.
- Ce système permet à la cellule d’adapter la traduction en fonction de facteurs de croissance et de signaux environnementaux [[381-384]][[386-388]][[383]].
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Autres facteurs régulés par phosphorylation
- eIF4G : Ce facteur d’assemblage du complexe d’initiation est actif sous forme phosphorylée. Sa phosphorylation est également régulée par différentes voies de signalisation.
- eIF4B : Phosphorylée notamment par p70S6K, eIF4B stimule l’activité hélicase de eIF4A, facilitant le dépliement des structures secondaires dans le 5’UTR des ARNm.
- eIF2 : Ce facteur d’initiation est aussi régulé par phosphorylation (détaillé dans la section suivante).
- L’ensemble de ces régulations par phosphorylation permet une modulation fine et rapide de la traduction selon les besoins cellulaires [[380-385]].
B. Régulation par phosphorylation du facteur d’initiation eIF-2
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Mécanisme d’inhibition via phosphorylation de la sous-unité α de eIF-2
- eIF-2 est un hétérotrimère (α, β, γ) qui, sous sa forme active liée au GTP, transporte le Met-ARNt initiateur vers le ribosome.
- Après l’initiation, eIF-2 hydrolyse le GTP en GDP et doit être recyclé en eIF-2-GTP pour un nouveau cycle, ce recyclage étant assuré par eIF2B.
- La phosphorylation de la sous-unité α de eIF-2 empêche cet échange de GDP en GTP, bloquant ainsi la formation du complexe actif eIF-2-GTP-Met-ARNt initiateur.
- Cette inhibition conduit à un blocage général de la traduction, une réponse rapide et efficace pour réduire la synthèse protéique en situation de stress [[393]][[394]].
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Kinases activées par stress cellulaire
- Plusieurs kinases spécifiques phosphorylent eIF-2α en réponse à différents stress :
- Infection virale (activation de PKR)
- Stress oxydatif
- Choc thermique
- Radiation UV
- Limitation nutritionnelle
- Cette phosphorylation est un mécanisme cellulaire permettant d’adapter la traduction en conditions défavorables ou stressantes, limitant la production protéique et favorisant la survie cellulaire ou l’apoptose si nécessaire [[395]].
- Plusieurs kinases spécifiques phosphorylent eIF-2α en réponse à différents stress :
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Rôle de eIF2B
- eIF2B est le facteur d’échange de nucléotides (GEF) qui convertit eIF2-GDP en eIF2-GTP.
- Sa fonction peut également être inhibée par phosphorylation (par exemple par GSK3β), ce qui renforce le blocage de la traduction initiée par eIF-2 phosphorylé [[396]][[397]].
C. Régulation des facteurs d’élongation (eEF2)
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Contrôle par phosphorylation de la kinase eEF2K
- eEF2 est un facteur d’élongation responsable de la translocation du ribosome le long de l’ARNm.
- Sa kinase spécifique, eEF2K, phosphoryle eEF2 sur la thréonine 56, ce qui empêche eEF2 de se lier au ribosome et bloque l’élongation.
- La kinase eEF2K est elle-même régulée par phosphorylation à différentes positions (Ser366 inactive eEF2K, Ser398 active eEF2K).
- Cette régulation permet d’ajuster la vitesse d’élongation en fonction des conditions métaboliques [[401]].
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Interaction avec AMPK et voie mTOR
- AMPK, activée en cas de stress énergétique (augmentation du rapport AMP/ATP), active eEF2K et inhibe la voie mTOR, réduisant ainsi la traduction.
- Par contre, la voie mTOR favorise la traduction en inhibant indirectement eEF2K, permettant la continuation de l’élongation.
- Cette coordination permet à la cellule de réguler globalement la synthèse protéique selon l’état énergétique et les signaux de croissance [[401]][[402]].
D. Coordination de multiples voies de signalisation pour la régulation de l’initiation et de l’élongation
- La régulation de la traduction eucaryote implique de nombreuses voies de signalisation qui travaillent ensemble pour moduler l’activité des facteurs d’initiation et d’élongation.
- Ces voies incluent notamment la voie PI3K/Akt/mTOR, la voie MAPK, la voie AMPK, et des kinases spécifiques aux facteurs d’initiation et d’élongation.
- Cette coordination fine permet à la cellule d’adapter rapidement la traduction aux conditions environnementales, au stress, à la disponibilité des nutriments, et à la croissance cellulaire.
- La kinase mTOR joue un rôle central à plusieurs niveaux, régulant aussi bien l’initiation que l’élongation de la traduction [[388-404]].
Résumé
Chez les eucaryotes, la régulation de la traduction repose sur une modulation complexe des facteurs d’initiation (notamment eIF4E, eIF4G, eIF4B, eIF2) et d’élongation (eEF2) par phosphorylation. La kinase mTOR est un acteur majeur qui intègre les signaux de croissance pour activer la traduction, tandis que diverses kinases activées par stress phosphorylent eIF-2α et d’autres facteurs pour inhiber la traduction en situations défavorables. L’équilibre entre ces signaux permet à la cellule de contrôler avec précision la synthèse protéique en fonction de ses besoins physiologiques et environnementaux. Ce mécanisme est également impliqué dans des pathologies telles que le cancer, où une dérégulation de ces facteurs est souvent observée [[381-404]].
A. Rôle des séquences régulatrices dans les régions non traduites (5’UTR et 3’UTR)
Les régions non traduites (UTR) des ARNm, situées en 5’ en amont et en 3’ en aval de la séquence codante, jouent un rôle crucial dans la régulation spécifique de la traduction. Elles contiennent des séquences et des structures qui peuvent influencer l’efficacité de la traduction en modifiant l’initiation, la stabilité de l’ARNm ou l’assemblage du ribosome.
- Structures secondaires dans le 5’UTR
- La région 5’UTR peut contenir des structures en tige-boucle (hairpins) qui modifient l’initiation de la traduction.
- Si une structure est située dans les 20 premiers nucléotides du 5’UTR, elle peut bloquer l’attachement du ribosome au messager, empêchant ainsi la traduction.
- À l’inverse, une structure placée un peu plus en aval (10-15 nucléotides après un codon initiateur) peut favoriser l’initiation de la traduction, en facilitant la reconnaissance du site d’initiation.
- Cependant, si la structure est trop stable, avec une énergie libre inférieure à -50 kcal/mol, elle constitue un obstacle trop important pour que le complexe d’initiation (complexe 48S) puisse la franchir au cours du balayage. Cette stabilité excessive empêche donc la traduction [[406]].
- Séquences en 3’UTR empêchant la formation du ribosome complet
- Certaines séquences régulatrices présentes dans la région 3’UTR peuvent bloquer la formation complète du ribosome, en empêchant l’association de la sous-unité 60S avec le complexe d’initiation 48S (qui contient la sous-unité 40S).
- Un exemple caractéristique est la séquence DICE (Differentiation Control Element) présente dans l’ARNm codant la 15-lipoxygénase (LOX).
- Cette séquence recrute des protéines spécifiques, hnRNP K et hnRNP E1, qui se lient à l’élément DICE dans la région 3’UTR. Cette liaison empêche la jonction de la sous-unité 60S au complexe d’initiation, bloquant ainsi la formation du ribosome fonctionnel et inhibant la traduction de cet ARNm [[411-412]].
- Contrôle par des protéines liant l’ARN (RNA-binding proteins, RBP) aux 5’ ou 3’UTR
- Des protéines spécifiques appelées RNA-binding proteins (RBP) se fixent sur des séquences régulatrices situées dans les 5’ ou 3’UTR des ARNm et modulent la traduction.
- Un exemple bien étudié est celui du contrôle de la traduction de l’ARNm « HUNCHBACK » chez la drosophile.
- Dans la région 3’UTR de cet ARNm se trouve un élément appelé NRE (Nanos Response Element), qui est reconnu par la protéine Pumillio.
- Au niveau de l’axe antérieur de l’embryon, l’ARNm est normalement polyadénylé (possède une queue poly-A) et est traduit.
- Au niveau de l’axe postérieur, la protéine Nanos se lie à la protéine Pumillio, ce qui provoque la déadénylation (réduction de la queue poly-A) de l’ARNm « HUNCHBACK », empêchant ainsi sa traduction. Cette modulation spatiale permet un contrôle précis de l’expression protéique au cours du développement embryonnaire [[413]].
- Influence de la longueur de la queue poly-A sur la stabilité et l’efficacité de la traduction
- La queue poly-A située à l’extrémité 3’ des ARNm joue un rôle majeur dans leur stabilité et leur efficacité de traduction.
- En général, la plupart des ARNm possèdent une queue poly-A d’environ 30 adénines.
- Pour certains ARNm, cette queue poly-A peut être allongée ou raccourcie rapidement dans le cytoplasme, modulant leur stabilité (plus longue queue = plus grande stabilité) et leur efficacité à être traduits.
- Les protéines liant la queue poly-A (PABPC, polyadenylate-binding proteins) interagissent avec la queue poly-A et favorisent la circularisation de l’ARNm, ce qui facilite le recrutement du ribosome et augmente l’efficience de la traduction.
- L’efficacité de la traduction est donc liée à la fois à la présence de la coiffe en 5’ et à la longueur de la queue poly-A en 3’, ainsi qu’à la quantité de PABPC présente [[414-418]].
En résumé
La régulation spécifique de la traduction via les régions non traduites repose sur des éléments structuraux et séquentiels dans les UTR qui modulent l’initiation de la traduction, la formation du ribosome, la stabilité de l’ARNm et le recrutement des facteurs nécessaires. Ces mécanismes permettent à la cellule de contrôler finement la synthèse protéique en fonction du contexte cellulaire et des besoins spécifiques [[406-418]].
B. Régulation par les séquences IRES (Internal Ribosome Entry Sites)
Les IRES sont des éléments spécifiques situés dans la région 5’ non traduite (5’UTR) de certains ARNm qui permettent au ribosome de s’y fixer directement, sans avoir besoin de la coiffe 5’ classique présente sur la majorité des ARNm. Ce mode d’initiation alternative de la traduction est particulièrement important dans certaines conditions cellulaires ou lors d’infections virales.
- Découverte et rôle des IRES chez les virus
- Les IRES ont été découverts initialement chez les picornavirus, un groupe de virus qui peuvent initier la traduction de leur ARNm même en l’absence de la coiffe 5’.
- Ces virus détournent la machinerie de traduction cellulaire en bloquant la traduction dépendante de la coiffe et en favorisant la traduction via les IRES, ce qui leur permet de synthétiser leurs protéines malgré l’inhibition de la traduction normale des ARNm cellulaires [[420]].
- Types d’IRES et leurs mécanismes
Les IRES sont classés en plusieurs types selon leur structure et leur mode de recrutement du ribosome :
-
Type I (exemple : poliovirus)
Le ribosome est recruté dans la région 5’UTR mais pas directement sur le codon initiateur AUG. Il doit effectuer un balayage (scanning) pour atteindre le codon initiateur correct avant de commencer la traduction [[422]]. -
Type II (exemple : encephalomyocarditis virus, EMCV)
Le ribosome est recruté directement sur le codon initiateur sans nécessité de balayage. Ce type d’IRES est très spécifique, et un déplacement du codon initiateur par rapport à la structure de l’IRES empêche l’initiation [[422]]. -
Type III (exemple : virus de l’hépatite C, HCV)
L’IRES inclut une partie de la séquence codante, ce qui signifie qu’une portion du codon codant est nécessaire pour l’activité de l’IRES [[422]]. -
Type IV (exemple : Cricket Paralysis virus)
Ce type d’IRES est capable d’initier la traduction sans codon initiateur et sans les facteurs d’initiation classiques, ce qui est unique et illustre une grande flexibilité dans les mécanismes d’initiation [[422]].
- Facteurs d’initiation alternatifs – ITAF (IRES trans-acting factors)
- La traduction initiée par les IRES nécessite souvent des protéines cellulaires spécifiques nommées ITAF.
- Ces facteurs agissent comme des chaperonnes qui modifient et stabilisent la conformation de l’IRES, facilitant ainsi le recrutement et l’association correcte de la sous-unité ribosomale 40S [[425]].
- Sans ces protéines, la structure de l’IRES ne serait pas optimale pour permettre l’initiation efficace de la traduction.
- Rôle des IRES dans la traduction des ARNm cellulaires
- Environ 3 à 5 % des ARNm cellulaires utilisent un mécanisme IRES-dépendant pour leur traduction, ce qui leur permet d’être traduits indépendamment de la coiffe [[427]].
- Ce mécanisme est souvent utilisé dans des situations où la traduction coiffe-dépendante est réduite, comme lors du stress cellulaire, de l’apoptose ou de certaines phases du cycle cellulaire.
- Parmi ces ARNm traduits via IRES, on trouve des gènes importants comme :
- FGF-2, PDGF, VEGF (facteurs de croissance)
- c-myc (facteur de transcription clé dans la prolifération cellulaire)
- eIF4G (facteur d’initiation de la traduction)
- Des protéines impliquées dans l’apoptose [[419, 427]].
- Importance biologique
- L’utilisation des IRES permet aux cellules et aux virus de moduler la traduction de manière flexible, particulièrement dans des conditions où la traduction classique via la coiffe est compromise.
- Cela offre un avantage adaptatif, notamment aux virus, qui peuvent ainsi continuer à produire leurs protéines dans un environnement hostile.
- Chez les cellules, cela permet aussi de réguler la traduction de certains ARNm critiques en réponse à des stimuli ou stress spécifiques.
En résumé, les IRES sont des éléments structuraux dans le 5’UTR qui autorisent une initiation de la traduction indépendante de la coiffe, impliquant des facteurs spécifiques (ITAF), et jouent un rôle essentiel dans la régulation fine de la synthèse protéique en conditions normales et pathologiques [[419-427]].
C. Régulation par les micro-ARNs (miRNAs)
Les micro-ARNs sont de petits ARN non codants jouant un rôle majeur dans la régulation post-transcriptionnelle de l’expression génique chez les eucaryotes.
- Nature et caractéristiques des micro-ARNs
- Les micro-ARNs (miRNAs) sont des oligonucléotides très courts, généralement de 21 à 23 bases.
- Ils sont présents chez les animaux et les plantes, et peuvent être transcrits à partir d’introns ou d’exons d’autres ARNm.
- Chez l’homme, on en compte plus de 700 types différents.
- Un seul miRNA peut cibler une centaine de gènes ou plus, ce qui leur confère un rôle puissant dans la régulation génique [[436]].
- Biosynthèse des micro-ARNs
La biogenèse des miRNAs se déroule en plusieurs étapes :
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Dans le noyau :
- Les miRNAs sont d’abord transcrits sous forme de longues molécules appelées pri-miARN (primary miRNA).
- Ces pri-miARN sont ensuite clivés par une enzyme ARNase III appelée Drosha (chez les animaux) pour former un précurseur appelé pré-miARN, d’environ 70 nucléotides, ayant une structure en épingle à cheveux (tige-boucle).
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Exportation et maturation dans le cytoplasme :
- Le pré-miARN est exporté du noyau vers le cytoplasme via la protéine Exportine 5.
- Dans le cytoplasme, une autre ARNase III appelée Dicer clive le pré-miARN pour libérer un duplex miARN double brin.
- Ce duplex est ensuite dénaturé, et un brin simple (le brin guide ou miARN mature) est incorporé dans le complexe RISC (RNA-induced silencing complex), tandis que l’autre brin est généralement dégradé [[436-438]].
- Mécanismes d’action des micro-ARNs
- Le complexe RISC, contenant le miARN mature et la protéine Argonaute (Ago), se lie principalement à la région 3’UTR des ARNm cibles.
- Selon la complémentarité entre le miARN et l’ARNm cible :
- Complémentarité parfaite : La protéine Ago2 du complexe RISC induit la dégradation de l’ARNm cible, ce qui empêche la traduction.
- Complémentarité imparfaite : La protéine Ago1 bloque la traduction sans dégrader l’ARNm, en réprimant son utilisation par le ribosome [[437]].
- Exemples fonctionnels
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Chez C. elegans :
- Le micro-ARN lin-4 est un des premiers miRNAs découverts et régule le développement du ver.
- Lin-4 se lie à plusieurs sites répétés dans le 3’UTR de l’ARNm du gène lin-14, inhibant ainsi la traduction de cette protéine nucléaire importante pour le développement.
- De même, lin-4 cible l’ARNm de lin-28, une protéine cytoplasmique, en se fixant sur une séquence spécifique dans son 3’UTR, ce qui conduit aussi à l’inhibition de sa traduction [[434-435]].
- Importance biologique
- Les micro-ARNs sont des éléments majeurs de la régulation post-transcriptionnelle, permettant une modulation fine et rapide de l’expression des gènes.
- Ils interviennent dans de nombreux processus cellulaires, comme le développement, la différenciation, la réponse au stress, et la régulation cellulaire générale.
- Leur capacité à cibler de nombreux gènes en fait des acteurs centraux dans la régulation de la traduction et la dynamique cellulaire [[436]].
En résumé, les micro-ARNs agissent en ciblant spécifiquement des ARNm via leur région 3’UTR, pour induire soit la dégradation des ARNm, soit la répression de leur traduction, ce qui leur permet de contrôler efficacement l’expression des protéines dans la cellule [[436-438]].