Antibiotiques Flashcards
(23 cards)
Définition d’un antibiotique
Les antibiotiques sont des substances capables de tuer ou d’inhiber la croissance des bactéries, permettant ainsi de traiter les infections bactériennes. Ils jouent un rôle fondamental en médecine pour combattre les maladies infectieuses.
Origine des antibiotiques
- Antibiotiques naturels : Ce sont des composés chimiques produits directement par des microorganismes, notamment des bactéries du genre Streptomyces, ou des champignons comme Penicillium. Ces substances sont naturellement synthétisées par ces microorganismes dans leur milieu de vie, probablement comme une arme pour limiter la croissance d’autres microbes concurrents.
- Antibiotiques semi-synthétiques (ou d’hémi-synthèse) : Ce sont des antibiotiques issus de modifications chimiques apportées à des molécules naturelles. Par exemple, les céphalosporines dérivent de la molécule naturelle de céphalosporine C, mais sont modifiées pour améliorer leur efficacité, leur spectre d’action, leur stabilité ou leurs propriétés pharmacocinétiques (absorption, distribution, métabolisme, élimination dans l’organisme). Ces modifications peuvent aussi permettre de contourner certaines résistances bactériennes.
Historique de la découverte
Le premier antibiotique découvert fut la pénicilline G, isolée en 1929 à partir du champignon Penicillium notatum. Ce fut une révolution dans la médecine, car avant cela, il n’existait aucun traitement efficace contre de nombreuses infections bactériennes graves.
Par la suite, d’autres antibiotiques naturels ont été découverts, notamment :
- La streptomycine (1944), venant de Streptomyces griseus
- La céphalosporine C (1945), provenant du champignon Cephalosporium acremonium
- La chlortétracycline (1946), la chloramphénicol (1947), la rifamycine SV (1948), et bien d’autres, produits majoritairement par différentes espèces de Streptomyces [[106-107]].
Ces découvertes ont permis d’élargir la gamme des agents antibactériens disponibles, avec des modes d’action variés et des spectres d’activité différents.
Importance de la distinction naturel / semi-synthétique
- Les antibiotiques naturels sont souvent le point de départ pour la recherche et le développement de nouveaux médicaments.
- Les antibiotiques d’hémi-synthèse permettent d’améliorer les caractéristiques des molécules naturelles : par exemple, augmenter leur résistance à la dégradation enzymatique par les bactéries, améliorer leur absorption dans l’organisme, ou étendre leur spectre d’activité contre des bactéries auparavant insensibles.
En résumé
La partie introductive montre que les antibiotiques sont des substances essentielles, initialement découvertes dans la nature, qui ont permis de transformer radicalement le traitement des infections bactériennes. La chimie et la microbiologie ont ensuite permis de modifier ces molécules naturelles pour améliorer leur efficacité et lutter contre les résistances émergentes.
a) Concentration Minimale Inhibitrice (CMI)
- Définition : La CMI est la plus faible concentration d’un antibiotique capable d’inhiber complètement la multiplication bactérienne après une incubation de 18 à 24 heures.
- Mesure : Elle est déterminée en laboratoire en exposant une souche bactérienne à différentes concentrations d’antibiotiques dans un milieu de culture. La concentration la plus faible où aucune croissance n’est observée correspond à la CMI [[110]].
- Utilité : La CMI sert à déterminer la sensibilité ou la résistance d’une bactérie à un antibiotique. Plus la CMI est basse, plus la bactérie est sensible à cet antibiotique.
b) Concentration Minimale Bactéricide (CMB)
- Définition : La CMB est la plus faible concentration d’un antibiotique qui tue 99,99 % de la population bactérienne, également mesurée après 18 à 24 heures d’exposition [[115]].
- Différence avec la CMI : Alors que la CMI indique l’inhibition de la croissance (bactériostase), la CMB indique la mort effective des bactéries (bactéricidie).
-
Rapport CMB/CMI : Ce rapport permet de classer les antibiotiques en bactéricides ou bactériostatiques :
- Si CMB/CMI est proche de 1-2, l’antibiotique est généralement bactéricide (il tue les bactéries).
- Si CMB/CMI est élevé (4-16), l’antibiotique est bactériostatique (il inhibe la croissance sans tuer rapidement) [[117]].
c) L’antibiogramme
- Principe : C’est un test de routine en laboratoire permettant d’évaluer la sensibilité d’une souche bactérienne à plusieurs antibiotiques simultanément [[111]].
-
Méthode :
- Des disques de papier (6 mm de diamètre) contenant une quantité définie d’antibiotique sont placés sur un milieu gélosé (milieu Müller-Hinton) préalablement ensemencé avec une suspension bactérienne standardisée (10^6 bactéries/ml).
- Après 18 heures d’incubation à 37°C, une zone d’inhibition de croissance se forme autour de chaque disque si l’antibiotique est actif.
- Le diamètre de cette zone est mesuré en millimètres ; plus il est grand, plus l’antibiotique est efficace [[112]].
-
Interprétation :
- Le diamètre de la zone est corrélé à la CMI : un grand diamètre correspond à une faible CMI et donc une bonne sensibilité.
- Les résultats sont classés en trois catégories cliniques selon le diamètre et la CMI :
- Sensible : probabilité élevée de succès thérapeutique avec la dose recommandée.
- Intermédiaire : succès imprévisible, dépendant d’autres facteurs (site d’infection, pharmacocinétique).
- Résistante : forte probabilité d’échec thérapeutique, quel que soit le traitement [[113-116]].
d) Différences entre antibiotiques bactéricides et bactériostatiques
- Bactéricides : Ils tuent directement les bactéries. Leur CMB est proche de la CMI (rapport 1-2).
- Bactériostatiques : Ils arrêtent la croissance bactérienne sans tuer les bactéries rapidement. Leur CMB est beaucoup plus élevée que la CMI (rapport 4-16) [[117]].
e) Dépendance à la concentration ou au temps
Les antibiotiques bactéricides peuvent se diviser en deux catégories selon la dynamique de leur action :
-
Antibiotiques concentration-dépendants :
- Leur effet bactéricide est proportionnel à la concentration maximale obtenue dans le sang.
- L’effet est rapide et ne dépend pas de la durée d’exposition.
- Exemple : aminoglycosides, fluoroquinolones [[118]].
-
Antibiotiques temps-dépendants :
- Leur efficacité dépend du temps pendant lequel la concentration de l’antibiotique reste au-dessus de la CMI.
- L’effet bactéricide est plus lent mais nécessite une exposition prolongée.
- Exemple : bêta-lactamines [[118]].
f) Effet post-antibiotique (EPA)
- Définition : C’est la durée pendant laquelle la croissance bactérienne reste inhibée après que la concentration de l’antibiotique dans le milieu soit tombée en dessous de la CMI, voire après élimination complète de l’antibiotique [[119]].
-
Facteurs influençant l’EPA :
- Type de bactérie.
- Nature de l’antibiotique et sa concentration.
- Durée d’exposition initiale.
- Mécanisme : généralement observé avec des antibiotiques ayant une action irréversible ou lentement réversible sur les synthèses bactériennes (ex : liaison forte aux enzymes cibles) [[119]].
g) Association d’antibiotiques
-
Objectifs :
- Obtenir un effet bactéricide maximal.
- Prévenir l’émergence de mutants résistants (en combinant des mécanismes d’action différents).
- Traiter des infections polymicrobiennes (présence de plusieurs bactéries différentes) [[120]].
-
Types d’effets possibles [[121]] :
- Effet synergique : le mélange (A + B) est plus efficace que la somme des effets individuels (A + B > A + B).
- Effet additif : le mélange a un effet égal à la somme des effets individuels (A + B = A + B).
- Effet indifférent : le mélange a un effet équivalent au meilleur des deux seuls (A + B = A ou B).
- Effet antagoniste : le mélange a un effet inférieur à l’un ou l’autre seul (A + B < A ou B), ce qui est à éviter.
En résumé
La connaissance précise des paramètres d’activité des antibiotiques (CMI, CMB), de leurs dynamiques d’action (dépendance concentration vs temps), de leur classification en bactéricides ou bactériostatiques, ainsi que des tests comme l’antibiogramme, permet de mieux choisir et adapter le traitement antibiotique. L’association judicieuse d’antibiotiques peut renforcer l’efficacité et limiter la résistance.
- Mécanismes d’action des antibiotiques
Les antibiotiques agissent principalement en ciblant trois fonctions essentielles des bactéries :
- la synthèse des acides nucléiques (ADN/ARN)
- la biogenèse (formation) de la paroi bactérienne
- la synthèse protéique via les ribosomes
a) Inhibition des acides nucléiques
1. Sulfamides et Triméthoprime
- Ces antibiotiques agissent en bloquant la synthèse de l’acide tétrahydrofolique, un précurseur essentiel à la formation des bases puriques et pyrimidiques nécessaires à la synthèse de l’ADN et de l’ARN.
- Le sulfamide inhibe la dihydropteroate synthétase en se substituant à l’acide p-aminobenzoïque (substrat naturel), tandis que le triméthoprime inhibe la dihydrofolate réductase.
- Leur association est synergique et bactéricide avec un large spectre d’activité.
Effets indésirables :
- Syndrome de Stevens-Johnson (érythème polymorphe + ulcérations muqueuses) ou syndrome de Lyell (nécrose bulleuse étendue de la peau)
- Anémie, thrombopénie, leucopénie (agranulocytose), souvent réversibles avec administration d’acide folique (vitamine B9)
- Interactions médicamenteuses, notamment compétition pour fixation aux protéines plasmatiques avec antivitamines K, sulfamides antidiabétiques, phénytoïne [[124-126, 126]].
a) Inhibition des acides nucléiques
2. Rifamycines (rifampicine, rifabutine)
- Se fixent sur la sous-unité β (rpoB) de l’ARN polymérase, bloquant la transcription de l’ADN en ARN.
- Ils sont bactéricides, à large spectre, et la rifampicine est un anti-tuberculeux majeur [[127]].
a) Inhibition des acides nucléiques
3. Quinolones et Fluoroquinolones (ex : ciprofloxacine, lévofloxacine)
- Inhibent les topo-isomérases II (gyrase) et IV, enzymes nécessaires au surenroulement et au déroulement de l’ADN lors de la réplication.
- Ces antibiotiques sont bactéricides à large spectre, y compris efficaces contre certaines mycobactéries [[128-129]].
Effets indésirables fréquents :
- Troubles digestifs, vertiges, céphalées, hallucinations (1-5%)
- Rash cutané (1-2%) lié à des radicaux libres formés par photodégradation
- Rarement, arthropathies et tendinopathies achiléennes [[129]].
a) Inhibition des acides nucléiques
4. Nitro-5-Imidazolés (ex : métronidazole)
- Ce sont des prodrogues activés par réduction du groupement nitré dans la cellule bactérienne, produisant des radicaux libres toxiques qui altèrent l’ADN.
- Actifs principalement sur bactéries anaérobies et microaérophiles [[130]].
Effets indésirables :
- Troubles neurologiques rares (neuropathie périphérique, encéphalopathie)
- Troubles hématologiques (agranulocytose) [[130]].
b) Inhibition de la biogenèse de la paroi bactérienne
La paroi bactérienne est essentielle à la survie bactérienne, notamment via la synthèse du peptidoglycane. Plusieurs classes d’antibiotiques bloquent différentes étapes de cette synthèse.
-
Bêta-lactamines (pénicillines, céphalosporines, carbapénèmes)
- Ces antibiotiques inhibent de façon compétitive les enzymes transpeptidases (ou protéines liant la pénicilline, PBP) qui catalysent la formation des ponts peptidiques dans le peptidoglycane.
- Le noyau bêta-lactame mime la structure du dipeptide D-Ala-D-Ala, site naturel de liaison des transpeptidases, entraînant une inhibition de la synthèse de la paroi et la lyse bactérienne.
- Ils sont bactéricides à large spectre.
Effets indésirables :
- Troubles de l’hémostase, avec risque de saignements (notamment par diminution de l’agrégation plaquettaire et déficit en vitamine K via perturbation de la flore intestinale)
- Réactions allergiques (éruptions cutanées, urticaire, arthralgies, fièvre), plus fréquentes avec les aminopénicillines, et pouvant être croisées avec les céphalosporines (environ 5%)
- Anémie et thrombopénie périphérique [[139]].
-
Glycopeptides (vancomycine, teicoplanine)
- Ces antibiotiques se fixent directement sur le motif D-Ala-D-Ala du pentapeptide du peptidoglycane, empêchant la transglycosylation et la transpeptidation.
- Ils sont bactéricides mais à spectre étroit, principalement actifs contre les bactéries Gram positif [[140]]. -
Inhibiteurs spécifiques des mycobactéries
- Isoniazide et pyrazinamide : bloquent la synthèse des acides mycoliques, composants essentiels et spécifiques de la paroi des mycobactéries.
- Ethambutol : inhibe la formation de l’arabinogalactane, polysaccharide qui lie les acides mycoliques au peptidoglycane.
Effets indésirables :
- Isoniazide : hépatotoxicité (accentuée par induction enzymatique des cytochromes P450 par d’autres drogues), neuropathie sensitivo-motrice liée à un déficit en vitamine B6, arthralgies liées à une hyperuricémie (pyrazinamide) [[144]].
- Ethambutol : névrite optique (baisse de l’acuité visuelle, scotome, troubles de la perception des couleurs), généralement réversible à l’arrêt du traitement, et neuropathie sensitivo-motrice dans certains cas [[145]].
c) Inhibition de la synthèse protéique
Les antibiotiques ciblent les ribosomes bactériens, perturbant les différentes étapes de la synthèse protéique. Ils agissent en se fixant soit sur la sous-unité 30S, soit sur la sous-unité 50S.
-
Antibiotiques altérant la sous-unité 30S
- Aminosides (streptomycine, gentamicine, tobramycine, amikacine, nétilmicine)
- Ces antibiotiques sont bactéricides à large spectre, actifs sur de nombreuses bactéries y compris certaines mycobactéries, mais inactifs sur les anaérobies (résistance naturelle).
- Ils perturbent la fixation de l’aminoacyl-ARNt, la lecture du code génétique et provoquent des erreurs dans la synthèse protéique.
Effets indésirables :
- Néphrotoxicité (nécrose tubulaire proximale réversible), variable selon l’aminoside (néomycine très toxique, gentamicine modérée, autres plus faibles)
- Ototoxicité vestibulaire et cochléaire (troubles de l’équilibre, puis surdité irréversible), aggravée par insuffisance rénale et traitement prolongé
- Ces effets peuvent apparaître plusieurs semaines après l’arrêt du traitement [[149]].
- Antibiotiques altérant la sous-unité 50S
-
Phénicolés (chloramphénicol, thiamphénicol)
- Bactériostatiques à large spectre.
- Toxiques pour la moelle osseuse, provoquant un déficit transitoire de l’hématopoïèse (anémie, leucopénie, thrombopénie) à surdosage, et surtout une aplasie médullaire irréversible, rare mais grave, survenant même après arrêt du traitement, chez sujets génétiquement prédisposés [[152]].
-
Macrolides (érythromycine, clarithromycine, azithromycine)
- Bactériostatiques, bien tolérés, actifs principalement sur bactéries Gram positif.
- Peuvent interagir avec d’autres médicaments en inhibant le cytochrome P450 hépatique (ex : dérivés de l’ergotamine) [[153]].
-
Lincosamides (clindamycine, lincomycine), streptogramines, oxazolidinones (linézolide), acide fusidique
- Bactériostatiques, agissant sur différentes étapes de la synthèse protéique.
- L’acide fusidique est un inhibiteur spécifique du facteur d’élongation EF-G, actif sur bactéries Gram positif [[154-156]].
En résumé
- Les antibiotiques agissent en bloquant des fonctions bactériennes essentielles, avec des mécanismes précis selon leur classe.
- Chaque classe présente des effets indésirables propres, souvent liés à leur mode d’action ou à leur toxicité sur les cellules humaines (ex : moelle osseuse, reins, système nerveux).
- La connaissance de ces effets est cruciale pour un usage thérapeutique adapté et sûr.
Définition de la résistance aux antibiotiques
Une bactérie est dite résistante à un antibiotique lorsque la Concentration Minimale Inhibitrice (CMI) de cet antibiotique est supérieure à la concentration sanguine maximale que l’on peut atteindre avec un traitement standard. Autrement dit, même à la dose maximale que l’on peut administrer sans danger, l’antibiotique ne peut pas inhiber efficacement la croissance bactérienne [[158]].
Types de résistance
-
Résistance naturelle (innée)
Certaines espèces bactériennes sont naturellement résistantes à certains antibiotiques, car la cible de ces antibiotiques est absente ou inaccessible dans ces bactéries. Par exemple, les bactéries anaérobies sont naturellement résistantes aux aminosides car ces antibiotiques nécessitent un transport actif dépendant de l’oxygène pour pénétrer dans la cellule bactérienne [[158]]. -
Résistance acquise
Il s’agit de souches bactériennes qui étaient initialement sensibles à un antibiotique, mais qui sont devenues résistantes au cours du temps. Cette résistance se développe sous la pression de sélection exercée par l’utilisation des antibiotiques et peut se propager dans une population bactérienne [[158-160]].
Les principaux stratagèmes de résistance utilisés par les bactéries
Les bactéries ont développé plusieurs mécanismes pour se protéger contre les antibiotiques :
-
Inactivation de l’antibiotique
- Les bactéries peuvent produire des enzymes qui détruisent ou modifient chimiquement l’antibiotique, le rendant inactif.
- Exemple majeur : les bêta-lactamases, enzymes capables d’ouvrir le noyau bêta-lactame des pénicillines et céphalosporines, ce qui détruit leur activité [[161]].
- Autres modifications enzymatiques : phosphorylation, nucléotidylation ou acétylation des aminosides par des enzymes spécifiques (phosphoryl-, nucléotidyl-, acétyltransférases), ce qui inactive ces antibiotiques [[162]].
-
Empêcher l’accès de l’antibiotique à sa cible
- Altération de la membrane externe : chez les bactéries à Gram négatif, la membrane externe contient des porines qui permettent le passage des molécules dont les antibiotiques. Une mutation ou une modification de ces porines peut réduire leur perméabilité, empêchant ainsi l’entrée de l’antibiotique dans la bactérie [[163-165]].
- Pompes d’efflux : ces pompes situées dans la membrane cytoplasmique peuvent expulser activement l’antibiotique hors de la cellule, réduisant sa concentration intracellulaire et son efficacité. Ces pompes sont présentes chez les bactéries à Gram positif et Gram négatif [[166-168]].
-
Modification de la cible de l’antibiotique
- Les bactéries peuvent modifier la structure de la cible sur laquelle agit l’antibiotique, ce qui rend cet antibiotique incapable de se fixer et donc inefficace.
- Exemple : modification des protéines liant la pénicilline (PBP) chez Staphylococcus aureus ou Streptococcus pneumoniae, rendant ces bactéries résistantes aux bêta-lactamines [[170]].
- Synthèse d’enzymes résistantes, par exemple une dihydrofolate-réductase qui n’est plus inhibée par le triméthoprime [[170]].
Génétique de la résistance
La résistance bactérienne peut être due à deux mécanismes génétiques :
-
Résistance par mutation des gènes préexistants
- Il s’agit de mutations ponctuelles dans des gènes codant par exemple pour une porine, une enzyme cible (ADN gyrase, ARN polymérase), ou une protéine ribosomale.
- Ces mutations sont stables, héréditaires et transmises verticalement (de mère à fille bactérienne), mais ne sont pas transmissibles horizontalement à d’autres bactéries [[178]].
- Ces mutations sont rares (fréquence entre 10^-6 et 10^-9), spécifiques à un antibiotique ou une famille d’antibiotiques, mais peuvent aussi induire une résistance à plusieurs antibiotiques via une modification de perméabilité [[178-179]].
- L’antibiotique n’est pas mutagène mais sélectionne les rares mutants résistants présents dans la population [[179]].
-
Résistance par acquisition de gènes exogènes
- La résistance peut être acquise par transfert horizontal de gènes portés par des éléments mobiles tels que les plasmides, les transposons, ou les intégrons.
- Ces gènes codent pour des facteurs de résistance spécifiques : enzymes inactivant l’antibiotique, protéines modifiant la cible, pompes d’efflux, etc. [[180-188]].
- Exemples :
- gène bla codant une bêta-lactamase qui hydrolyse le noyau bêta-lactame.
- gène mec codant une PBP modifiée chez S. aureus (résistance à la méticilline/oxacilline).
- gène vanA codant des protéines modifiant la terminaison peptidique du peptidoglycane (D-Ala-D-Lactate au lieu de D-Ala-D-Ala), conférant la résistance à la vancomycine [[180, 183]].
- Ces éléments génétiques mobiles facilitent la dissémination rapide des résistances entre différentes espèces bactériennes [[186-188]].
En résumé
- La résistance bactérienne est un phénomène majeur en thérapeutique antibiotique.
- Elle peut être innée ou acquise, avec des conséquences cliniques importantes.
- Les bactéries peuvent neutraliser l’antibiotique, empêcher son accès, ou modifier leur cible pour échapper à son action.
- Sur le plan génétique, la résistance peut provenir de mutations ou de l’acquisition de gènes mobiles, ce qui favorise la propagation rapide de la résistance.
- La compréhension détaillée de ces mécanismes est essentielle pour le développement de stratégies thérapeutiques efficaces et la lutte contre la résistance aux antibiotiques [[158-188]].
- Recherche de nouveaux agents antibactériens
6.1. Bloquer les mécanismes de résistance des bactéries aux antibiotiques actuels
Les bactéries ont développé plusieurs mécanismes pour échapper à l’action des antibiotiques, comme la production d’enzymes qui inactivent ces molécules (ex : bêta-lactamases détruisant le noyau bêta-lactame des pénicillines). Pour contrer cela, une stratégie consiste à développer des inhibiteurs spécifiques de ces mécanismes de résistance.
-
Exemple : Inhibiteurs de bêta-lactamases
L’acide clavulanique est un inhibiteur de certaines bêta-lactamases. Lorsqu’il est associé à une pénicilline comme l’amoxicilline, il protège l’antibiotique de la dégradation enzymatique bactérienne, renforçant ainsi son efficacité. Ce type de combinaison est commercialisé sous des noms comme Augmentin [[161], [173]].
Cette approche permet de “restaurer” l’activité d’antibiotiques qui seraient autrement inactifs contre des souches productrices d’enzymes de résistance.
6.2. Cribler des substances naturelles
Le criblage (ou screening) de substances naturelles est une voie classique et toujours d’actualité pour découvrir de nouveaux antibiotiques. Les microorganismes eux-mêmes produisent souvent des substances antimicrobiennes naturelles qui peuvent être isolées et étudiées.
-
Exemple : Peptides antimicrobiens
Ce sont des peptides produits naturellement par des vertébrés et des invertébrés, ayant une activité antibactérienne. Ils représentent une source prometteuse pour de nouveaux agents antibactériens [[173]].
Le criblage consiste donc à tester de nombreuses substances naturelles pour identifier celles qui ont une activité antibactérienne intéressante, puis à les optimiser chimiquement ou biologiquement.
6.3. Identifier de nouvelles cibles bactériennes
Une autre stratégie essentielle est de cibler des fonctions bactériennes qui ne sont pas encore exploitées par les antibiotiques actuels, afin de contourner les mécanismes de résistance existants.
-
Exemple : Inhibition de la synthèse du lipide II
Le lipide II est un précurseur essentiel dans la biosynthèse du peptidoglycane, un composant fondamental de la paroi bactérienne. L’antibiotique teixobactine, isolé d’Eleftheria terrae (un microorganisme récemment découvert dans le sol), inhibe la synthèse du lipide II, ce qui bloque la formation de la paroi bactérienne [[174]].
Teixobactine est active principalement contre les bactéries à Gram positif, et son mode d’action différent de celui des bêta-lactamines pourrait réduire le risque de résistance croisée.
-
Autres nouvelles cibles potentielles
Le document mentionne aussi la biogenèse du lipide A, un composant essentiel de la membrane externe des bactéries Gram négatif, comme une piste pour le développement de nouveaux agents antibactériens [[176]].
Résumé de la partie 6
La recherche de nouveaux agents antibactériens s’appuie sur trois axes majeurs :
- Neutraliser les mécanismes de résistance déjà présents (ex : inhibiteurs de bêta-lactamases).
- Explorer les ressources naturelles via le criblage de substances naturelles, comme les peptides antimicrobiens.
- Découvrir de nouvelles cibles bactériennes non exploitées jusqu’à présent, comme la synthèse du lipide II ou du lipide A, pour développer des antibiotiques avec des modes d’action innovants.
Ces approches sont essentielles face à l’augmentation rapide des résistances bactériennes, qui compromettent l’efficacité des traitements actuels et nécessitent l’innovation pour assurer le contrôle des infections bactériennes à l’avenir.