Motilité et tactisme Flashcards
(13 cards)
Motilité bactérienne
- Définition : La motilité désigne la capacité des bactéries à se déplacer activement dans leur environnement. Ce déplacement est souvent assuré par des structures appelées flagelles, qui sont des appendices filamenteux mobiles fixés à la surface cellulaire.
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Types de flagelles :
- Flagelles internes : moins courants, situés à l’intérieur de certaines bactéries.
- Flagelles polaires : un ou plusieurs flagelles localisés à un ou aux deux pôles de la bactérie. Ils peuvent être simples (un seul flagelle) ou multiples.
- Flagelles péritriches : nombreux flagelles répartis sur toute la surface de la bactérie. Ce type est typique d’Escherichia coli.
La nature et la disposition des flagelles influencent la manière dont la bactérie peut se déplacer et s’orienter.
Tactisme : déplacement orienté
- Définition : Le tactisme est la capacité des bactéries à détecter des variations dans leur environnement et à modifier leur déplacement en conséquence. C’est un déplacement orienté vers des conditions favorables (attractifs) ou loin de conditions défavorables (répulsifs).
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Mécanismes de déplacement :
- Déplacement passif : transport involontaire par des flux externes (air, liquide), sur de longues distances.
- Déplacement actif : grâce à la motilité (nage), combinée au tactisme pour s’approcher ou s’éloigner de sites favorables ou défavorables sur de courtes distances.
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Relation motilité-tactisme :
Pour une espèce bactérienne, si elle est motile (c’est-à-dire capable de se déplacer), alors elle possède habituellement un système de tactisme lui permettant un déplacement cohérent et dirigé.
Types de tactismes
Les bactéries peuvent répondre à différents stimuli environnementaux via des tactismes spécifiques :
- Aérotactisme : réponse aux variations de la pression partielle en oxygène. La bactérie peut se déplacer vers des zones avec une concentration optimale d’oxygène.
- Phototactisme : réponse aux variations d’intensité lumineuse. Certaines bactéries ont même la capacité de distinguer différentes longueurs d’onde, leur permettant de se positionner selon la qualité de la lumière.
- Magnétotactisme : réponse à la variation du champ magnétique terrestre, qui aide certaines bactéries à s’orienter dans leur environnement.
- Chimiotactisme : réponse à la présence et à la variation de concentration de molécules chimiques (souvent des nutriments). C’est le tactisme le plus étudié, notamment chez E. coli.
Exemple de chimiotactisme chez E. coli
- E. coli cherche des zones où les conditions chimiques et physiques sont optimales pour sa survie et croissance, telles que un pH neutre et une température comprise entre 25 et 37°C.
Étude expérimentale du chimiotactisme (Pages 181-183)
- Pour comprendre le fonctionnement du chimiotactisme, des mutants de bactéries modèles comme E. coli et Salmonella enterica sont utilisés.
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Types de mutants identifiés :
- Mutants de structure flagellaire : ces mutants ont une altération ou une absence du flagelle, ce qui entraîne une perte totale de la locomotion. Plus de 50 gènes peuvent être impliqués dans la construction du flagelle.
- Mutants du moteur : ces bactéries possèdent un flagelle normal mais immobile, ce qui empêche la motilité.
- Mutants du tactisme : ces bactéries ont un flagelle normal et mobile, donc elles peuvent nager, mais elles ont perdu la capacité de répondre aux signaux chimiques, ce qui entraîne un déplacement aléatoire sans direction cohérente.
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Observation de la motilité :
- La motilité et le chimiotactisme sont observés sur des boîtes de Petri contenant un milieu nutritif avec une gélose molle (3 à 4 g/L d’agar, beaucoup moins que la gélose normale à 15 g/L). Ce milieu plus fluide permet aux bactéries de nager.
- Un gradient de concentration de nutriments se crée naturellement par consommation au centre de la plaque, permettant d’observer la capacité des bactéries à nager vers des zones plus concentrées.
- Les bactéries sauvages (motiles) forment des halos plus larges car elles se déplacent vers les zones riches en nutriments, alors que les mutants non motiles ou incapables de tactisme ne produisent pas ou peu ce déplacement.
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Criblage des mutants :
- Les mutants peuvent être distingués en fonction de leur capacité à nager loin (mutants du tactisme nagent moins loin) ou de la présence/absence du flagelle (mutants de structure ou moteur).
En résumé
La motilité bactérienne est assurée par des flagelles, dont la structure et la disposition varient selon les espèces. Le tactisme permet aux bactéries de détecter leur environnement et de s’orienter vers des conditions favorables. Le chimiotactisme, un type majeur de tactisme, a été largement étudié grâce à l’utilisation de mutants incapables de nager ou de s’orienter, mettant en lumière les mécanismes moléculaires sous-jacents à la détection des signaux chimiques et à la modulation de la motilité.
Mécanique de la motilité liée au flagelle (Pages 186-189)
La motilité bactérienne est assurée par la rotation des flagelles, mais la manière dont ces flagelles fonctionnent et s’organisent varie selon le type de flagelles présents sur la bactérie. Le document présente trois exemples principaux, illustrant différents modes de nage en fonction du type de flagellation :
a) Flagelle polaire simple
- Exemple : Rhodobacter sphaeroides
- Ce type de bactérie possède un seul flagelle situé à un pôle.
- Son moteur est unidirectionnel, ce qui signifie qu’il tourne toujours dans le même sens (pas d’inversion de rotation).
- Le moteur peut cependant changer de vitesse et s’arrêter périodiquement.
- Lorsque le moteur s’arrête, le flagelle se relâche et adopte une conformation repliée en spirale. Ce relâchement provoque une réorientation de la bactérie, c’est-à-dire un changement de direction.
- Ainsi, la nage se fait en ligne droite avec le flagelle en rotation, puis la bactérie se réoriente lors des arrêts du moteur [[186]].
b) Flagelles polaires multiples
- Exemple : Sinorhizobium meliloti
- Ces bactéries ont plusieurs flagelles polaires regroupés en faisceau (hélice).
- Les flagelles tournent tous dans le même sens (sens horloger) et ne changent jamais de direction de rotation.
- La vitesse de rotation d’un flagelle peut varier indépendamment des autres. Cette variation provoque la séparation des filaments du faisceau, ce qui engendre un virage dans la trajectoire.
- Les flagelles ne s’arrêtent jamais de tourner, mais la modulation individuelle de leur vitesse permet à la bactérie de changer de direction sans inversion de rotation [[187]].
c) Flagelles péritriches
- Exemple : Escherichia coli
- Ces bactéries ont des flagelles disposés tout autour de leur surface (péritriches).
- Lorsqu’ils tournent dans le sens anti-horaire, les flagelles s’assemblent en faisceau hélicoïdal, ce qui permet une nage en ligne droite (propulsion efficace).
- Lorsque la rotation change en sens horaire, le faisceau de flagelles se défait (les flagelles s’ébouriffent), la bactérie cesse d’avancer, tourne sur place et se réoriente. Ce processus est appelé une “culbute” ou “tumbling”.
- Ce mécanisme de marche alternée (nage en ligne droite et culbutes) permet à E. coli d’explorer son environnement efficacement.
- La vitesse de nage de E. coli est d’environ 10 à 20 μm par seconde, soit environ 10 fois la longueur de la bactérie par seconde. En comparaison avec un humain, ce serait l’équivalent d’une vitesse de 60 km/h [[188-189]].
En résumé
- La motilité bactérienne est liée à la rotation des flagelles, qui varie selon leur type et leur disposition.
- Le mode de déplacement inclut des phases de nage linéaire et de réorientation, obtenues par des modifications de la rotation ou de la configuration des flagelles.
- Ces mécanismes permettent aux bactéries de changer de direction et d’explorer leur environnement de manière efficace pour trouver des conditions favorables.
Cette diversité mécanique est fondamentale pour la capacité des bactéries à adapter leurs déplacements selon les stimuli extérieurs, notamment dans le cadre du chimiotactisme.
- Le chimiotactisme : résultat d’une marche aléatoire biaisée (Pages 190-192)
Contexte :
Le chimiotactisme est la capacité des bactéries, comme Escherichia coli, à se diriger vers des zones riches en substances attractives (nutriments, par exemple) ou à s’éloigner de substances répulsives.
Comment la bactérie se déplace-t-elle ?
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Nage et culbutes :
La motilité de E. coli alterne entre deux comportements :- Nage (run) : la bactérie avance en ligne droite, généralement pendant environ 1 seconde.
- Culbute (tumble) : la bactérie cesse de nager en ligne droite et tourne sur elle-même, puis se réoriente dans une nouvelle direction. Ces culbutes durent environ 0,1 seconde.
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Sans gradient (milieu homogène) :
En l’absence de gradient de concentration (milieu homogène), la bactérie effectue des séquences de nage d’environ 1 seconde entrecoupées de culbutes fréquentes (toutes les 0,1 seconde). Cette alternance produit un déplacement global aléatoire, sans direction privilégiée.
En présence d’un gradient attractif (par exemple, concentration croissante d’un nutriment) :
- La bactérie modifie la durée de ses phases de nage :
- Si elle nage dans la bonne direction (vers une concentration plus élevée d’attractif), elle allonge la durée de nage (plus d’1 seconde).
- Si elle nage dans la mauvaise direction (vers une concentration plus faible), elle raccourcit la durée de nage, c’est-à-dire qu’elle culbute plus fréquemment.
- Ce mécanisme d’allongement ou de raccourcissement de la durée de nage en fonction de la variation de la concentration rencontrée crée une marche aléatoire biaisée.
Pourquoi “marche aléatoire biaisée” ?
- La bactérie ne peut pas mesurer directement la différence de concentration entre son avant et son arrière en même temps (puisqu’elle est très petite).
- Elle mesure plutôt la concentration de manière temporelle, c’est-à-dire à différents instants au cours de son déplacement.
- En comparant la concentration actuelle avec celle mesurée précédemment, la bactérie détecte si elle se dirige vers une meilleure ou une moins bonne condition.
- Cette comparaison temporelle oriente son comportement de nage (plus ou moins de culbutes), ce qui entraîne un déplacement global orienté.
Expériences confirmant ce modèle :
- Dans un milieu homogène avec une variation brutale de concentration (mais homogène spatialement), on observe :
- Augmentation brutale de l’attractif → La bactérie nage de manière plus linéaire, avec moins de culbutes.
- Diminution brutale de l’attractif → La bactérie effectue plus de culbutes et change fréquemment de direction.
- Concentration constante → Comportement de nage aléatoire classique.
Ces observations montrent que la bactérie répond à un changement dans la concentration dans le temps, pas simplement à une différence spatiale instantanée.
En résumé :
- E. coli utilise une stratégie de déplacement appelée “marche aléatoire biaisée”.
- En absence de gradient, le déplacement est aléatoire (nage ~1 sec, culbute toutes les 0,1 sec).
- En présence d’un gradient attractif, la bactérie modifie la durée de nage selon l’évolution temporelle de la concentration, ce qui oriente son déplacement global vers des zones favorables.
- Cette stratégie est efficace et permet à la bactérie de localiser des habitats et ressources optimaux sans mesurer simultanément la concentration à différents points de son corps [[190-192]].
- Nature et fonction des capteurs et transmission du signal (Pages 193-200)
#### Acteurs moléculaires essentiels
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Capteurs membranaires (MCP - Methyl-accepting Chemotaxis Proteins)
- Ces protéines sont situées dans la membrane cellulaire et détectent les variations de concentration des attractifs chimiques dans l’environnement.
- Chaque MCP est spécifique à certains attractifs :
- Tsr détecte la sérine
- Tar détecte l’aspartate et le maltose (avec l’aide de MBP, Maltose Binding Protein)
- Trg détecte le ribose (avec RBP) et le galactose (avec GBP)
- Ces capteurs sont les premières étapes de la perception sensorielle.
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Protéines cytoplasmiques de signalisation
- CheW, CheA, CheY, CheZ, CheB, CheR sont des protéines qui transmettent et modulent le signal perçu par les MCP.
- CheA est une kinase qui s’autophosphoryle et transfère le phosphate à CheY et CheB.
- CheY-P (phosphorylé) interagit avec le moteur du flagelle pour moduler sa rotation.
- CheZ déphosphoryle CheY-P, terminant ainsi le signal.
- CheB-P est une déméthylase qui enlève des groupes méthyles des MCP, modulant leur sensibilité.
- CheR est une méthylase qui ajoute des groupes méthyles aux MCP.
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Moteur du flagelle
- Composé principalement de protéines Mot et Fla, c’est la structure qui génère la rotation du flagelle.
- Le moteur répond aux signaux transmis par CheY-P pour changer la direction et la fréquence de rotation.
- Nature et fonction des capteurs et transmission du signal (Pages 193-200)
#### Mécanisme de perception et transmission
Le système fonctionne comme une boucle de rétroaction complexe :
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Perception du changement de concentration d’attractif :
- Les MCP détectent la variation (augmentation ou diminution) de la concentration d’attractif.
- Ils transmettent cette information à CheA, qui modifie son activité de phosphorylation.
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Cascade de phosphorylation :
- En présence d’une hausse d’attractif, l’activité kinase de CheA diminue, ce qui réduit la phosphorylation de CheY.
- Moins de CheY-P signifie que le moteur du flagelle tourne de façon à prolonger la durée de nage droite (moins de culbutes).
- En cas de baisse d’attractif, l’activité kinase de CheA augmente, plus de CheY-P est produit, ce qui induit plus de culbutes (changement de direction).
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Méthylation/déméthylation des MCP (mémoire adaptative) :
- Pour éviter une réponse continue à un niveau stable d’attractif, le système ajuste la sensibilité des MCP par méthylation (ajout de groupes CH3 par CheR) ou déméthylation (retrait par CheB-P).
- Cette modification agit comme une mémoire qui permet à la bactérie de comparer les nouvelles concentrations à celles précédemment rencontrées.
- Par exemple, lors d’une hausse prolongée d’attractif, les MCP deviennent plus méthylées, ce qui diminue leur affinité et rétablit la phosphorylation de CheA à un niveau basal, permettant au système de rester sensible aux futures variations.
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Boucle de rétroaction :
- Ainsi, le système fonctionne en boucle : perception → modification de phosphorylation → modification du comportement moteur → adaptation de la sensibilité des capteurs → nouvelle perception, etc.
- Cela permet une navigation fine dans un environnement où les concentrations chimiques varient dynamiquement.
- Nature et fonction des capteurs et transmission du signal (Pages 193-200)
#### Visualisation du processus (schémas pages 193-200)
- Les schémas montrent la localisation des protéines dans la membrane et le cytoplasme.
- L’état de phosphorylation des protéines Che et le niveau de méthylation des MCP sont indiqués pour différentes conditions (hausse ou baisse d’attractif).
- Par exemple :
- Hausse d’attractif → baisse phosphorylation CheA et CheY → augmentation méthylation MCP → nage prolongée.
- Baisse d’attractif → augmentation phosphorylation CheA et CheY → diminution méthylation MCP → nage courte avec plus de culbutes.
- Nature et fonction des capteurs et transmission du signal (Pages 193-200)
###Importance biologique
- Ce système permet à la bactérie de se déplacer efficacement vers des environnements plus favorables (riches en nutriments ou conditions optimales).
- La capacité d’adaptation via la méthylation/déméthylation évite une saturation du système et maintient la sensibilité aux nouvelles variations.
- C’est un exemple sophistiqué de signalisation cellulaire chez un organisme unicellulaire.
En résumé
Le chimiotactisme chez les bactéries repose sur un système de capteurs membranaires (MCP) qui détectent les changements dans la concentration d’attractifs chimiques. Ces capteurs modulent une cascade de phosphorylation impliquant les protéines Che, qui à leur tour contrôlent la rotation du flagelle et donc le comportement de nage. Un mécanisme adaptatif basé sur la méthylation des MCP permet à la bactérie de “mémoriser” les concentrations antérieures et d’ajuster sa sensibilité, ce qui assure une navigation efficace dans un environnement changeant.